par energy_isere » 01 févr. 2025, 19:44
L’eau, talon d’Achille de la florissante industrie des engrais au Maroc (Fitch)
Agence Ecofin 30 janvier 2025
Acteur majeur du marché mondial des engrais phosphatés, le Maroc lutte contre des défis hydriques qui menacent sa production et sa compétitivité. Bien que possédant les réserves de phosphates les plus importantes au monde, le royaume reste à la traîne en matière de production réelle.
La pénurie d’eau constitue une menace pour l’industrie des engrais au Maroc malgré les efforts déployés par les autorités pour limiter l’impact d’un stress hydrique structurel en augmentant les capacités de dessalement de l’eau de mer, selon un rapport publié le 20 janvier 2025 par Fitch Solutions.
Intitulé « Tailwinds for Morocco’s fertiliser industry while water availability remains a concern », le rapport rappelle que le royaume chérifien est un acteur de premier plan sur le marché mondial des engrais, grâce à ses abondantes réserves de phosphates. Selon les données de l'US Geological Survey, le pays concentrait en 2023 près de 68% des réserves mondiales de ce minerai, contre 58,3 % en 2000, soit plus de 12 fois plus que le deuxième pays en matière de réserves, en l'occurrence la Chine (5,1 % des réserves mondiales).
Or, l'extraction et la transformation des phosphates en engrais nécessitent d'importantes quantités d'eau. On estime que 7 à 8 m3 d’eau sont nécessaires pour produire une tonne d’acide phosphorique, ce qui pose de sérieux problèmes dans le cas du Maroc. D’après l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le niveau de stress hydrique du pays s’élève à 50,8 %, contre une moyenne mondiale de 18,6 % et une moyenne européenne de 8,41 %.
L'accent mis par le gouvernement marocain sur l'augmentation des capacités de dessalement d’eau de mer, avec des initiatives telles que la construction de nouvelles usines et le récent achat d’une technologie américaine pour réduire le coût d’exploitation des stations de dessalement, n’est pas jusqu’ici suffisant, compte tenu de l'ampleur de la pénurie d'eau dans le pays.
En dépit de ce grand défi lié au manque d’eau, Fitch Solutions estime que les perspectives de l’industrie marocaine des engrais restent positives. Bien qu'il dispose de loin des réserves les plus abondantes au niveau mondial, le Maroc reste à la traîne en termes de production réelle par rapport à ses concurrents. En 2023, le pays a contribué à hauteur de 15,9 % à la production mondiale du minerai, derrière la Chine (40,9 %). L’extraction des phosphates dans ce pays d'Afrique du Nord a cependant connu une tendance haussière au cours de la dernière décennie. La moyenne annuelle de production a atteint 37 millions de tonnes durant le quinquennat 2019-2023, ce qui représente une hausse de 22,8% par rapport à la période 2014-2018. Cette tendance haussière de la production devrait se poursuivre au cours des prochaines décennies alors que le gouvernement s’efforce d’augmenter les investissements dans le secteur, dans un contexte marqué par une envolée de la demande mondiale des engrais.
1 mineral
L’OCP devrait renforcer son tropisme africain
Bien qu’ils aient considérablement diminué par rapport au pic atteint en 2022, peu après le déclenchement du conflit russo-ukrainien, les prix des engrais restent supérieurs à la moyenne de la période 2015-2019. Plus généralement, les récentes perturbations du commerce mondial des engrais ont également poussé les pays du monde entier à donner la priorité à l'accès à ces produits et à la sécurité alimentaire en général. Naturellement, ces facteurs encouragent davantage l'exploitation minière et la transformation des phosphates au Maroc.
L’Office chérifien des phosphates (OCP), l’un des plus grands acteurs de l’industrie à l’échelle mondiale, devrait concentrer ses efforts sur l'amélioration de la chaîne de valeur durant les prochaines années, avec des investissements dans des usines portuaires pour transformer la roche phosphatée et l'acide en engrais.
Le rapport indique dans ce même cadre que l’OCP devrait augmenter son engagement dans le secteur dans d’autres pays africains, rappelant que le groupe s’est déjà doté d’une filiale dédiée à l’Afrique (OCP Africa), qui a investi dans des usines d'engrais au Nigeria et au Ghana. Le Maroc est devenu ces dernières années le plus grand fournisseur d’engrais aux autres pays africains, avec 15,0 % des importations totales en 2023, contre 8,3 % en 2012 et 0,1 % en 2004. Ses exportations vers l’Afrique présentent un grand potentiel de croissance, car le continent affiche les taux les plus bas d'utilisation des engrais au niveau mondial.
Fitch Solutions note par ailleurs que le Maroc a accaparé 25,9 % des exportations mondiales des engrais phosphatés minéraux et chimiques en 2023, ce qui incite de plus en plus les institutions financières multilatérales à s'engager dans le financement de l’industrie, et plus particulièrement dans le domaine de l’amélioration de l’accès à l’eau. A titre d'exemple, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) a décaissé, en novembre 2024, un prêt de 200 millions d’euros en faveur de l’OCP pour la construction de deux usines de dessalement de l’eau de mer. De son côté, la Société financière internationale (SFI) a accordé, deux mois plus tôt, un prêt de 100 millions d'euros au groupe pour la construction d’un pipeline de 219 kilomètres et d’une station de pompage destinée à transporter de l’eau depuis les stations de dessalement situées sur l’océan Atlantique jusqu’aux sites de production des engrais dans le centre du pays.
https://www.agenceecofin.com/actualites ... aroc-fitch
[quote] [b][size=120]L’eau, talon d’Achille de la florissante industrie des engrais au Maroc (Fitch)[/size][/b]
Agence Ecofin 30 janvier 2025
Acteur majeur du marché mondial des engrais phosphatés, le Maroc lutte contre des défis hydriques qui menacent sa production et sa compétitivité. Bien que possédant les réserves de phosphates les plus importantes au monde, le royaume reste à la traîne en matière de production réelle.
La pénurie d’eau constitue une menace pour l’industrie des engrais au Maroc malgré les efforts déployés par les autorités pour limiter l’impact d’un stress hydrique structurel en augmentant les capacités de dessalement de l’eau de mer, selon un rapport publié le 20 janvier 2025 par Fitch Solutions.
Intitulé « Tailwinds for Morocco’s fertiliser industry while water availability remains a concern », le rapport rappelle que le royaume chérifien est un acteur de premier plan sur le marché mondial des engrais, grâce à ses abondantes réserves de phosphates. Selon les données de l'US Geological Survey, le pays concentrait en 2023 près de 68% des réserves mondiales de ce minerai, contre 58,3 % en 2000, soit plus de 12 fois plus que le deuxième pays en matière de réserves, en l'occurrence la Chine (5,1 % des réserves mondiales).
Or, l'extraction et la transformation des phosphates en engrais nécessitent d'importantes quantités d'eau. On estime que 7 à 8 m3 d’eau sont nécessaires pour produire une tonne d’acide phosphorique, ce qui pose de sérieux problèmes dans le cas du Maroc. D’après l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le niveau de stress hydrique du pays s’élève à 50,8 %, contre une moyenne mondiale de 18,6 % et une moyenne européenne de 8,41 %.
L'accent mis par le gouvernement marocain sur l'augmentation des capacités de dessalement d’eau de mer, avec des initiatives telles que la construction de nouvelles usines et le récent achat d’une technologie américaine pour réduire le coût d’exploitation des stations de dessalement, n’est pas jusqu’ici suffisant, compte tenu de l'ampleur de la pénurie d'eau dans le pays.
En dépit de ce grand défi lié au manque d’eau, Fitch Solutions estime que les perspectives de l’industrie marocaine des engrais restent positives. Bien qu'il dispose de loin des réserves les plus abondantes au niveau mondial, le Maroc reste à la traîne en termes de production réelle par rapport à ses concurrents. En 2023, le pays a contribué à hauteur de 15,9 % à la production mondiale du minerai, derrière la Chine (40,9 %). L’extraction des phosphates dans ce pays d'Afrique du Nord a cependant connu une tendance haussière au cours de la dernière décennie. La moyenne annuelle de production a atteint 37 millions de tonnes durant le quinquennat 2019-2023, ce qui représente une hausse de 22,8% par rapport à la période 2014-2018. Cette tendance haussière de la production devrait se poursuivre au cours des prochaines décennies alors que le gouvernement s’efforce d’augmenter les investissements dans le secteur, dans un contexte marqué par une envolée de la demande mondiale des engrais.
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L’OCP devrait renforcer son tropisme africain
Bien qu’ils aient considérablement diminué par rapport au pic atteint en 2022, peu après le déclenchement du conflit russo-ukrainien, les prix des engrais restent supérieurs à la moyenne de la période 2015-2019. Plus généralement, les récentes perturbations du commerce mondial des engrais ont également poussé les pays du monde entier à donner la priorité à l'accès à ces produits et à la sécurité alimentaire en général. Naturellement, ces facteurs encouragent davantage l'exploitation minière et la transformation des phosphates au Maroc.
L’Office chérifien des phosphates (OCP), l’un des plus grands acteurs de l’industrie à l’échelle mondiale, devrait concentrer ses efforts sur l'amélioration de la chaîne de valeur durant les prochaines années, avec des investissements dans des usines portuaires pour transformer la roche phosphatée et l'acide en engrais.
Le rapport indique dans ce même cadre que l’OCP devrait augmenter son engagement dans le secteur dans d’autres pays africains, rappelant que le groupe s’est déjà doté d’une filiale dédiée à l’Afrique (OCP Africa), qui a investi dans des usines d'engrais au Nigeria et au Ghana. Le Maroc est devenu ces dernières années le plus grand fournisseur d’engrais aux autres pays africains, avec 15,0 % des importations totales en 2023, contre 8,3 % en 2012 et 0,1 % en 2004. Ses exportations vers l’Afrique présentent un grand potentiel de croissance, car le continent affiche les taux les plus bas d'utilisation des engrais au niveau mondial.
Fitch Solutions note par ailleurs que le Maroc a accaparé 25,9 % des exportations mondiales des engrais phosphatés minéraux et chimiques en 2023, ce qui incite de plus en plus les institutions financières multilatérales à s'engager dans le financement de l’industrie, et plus particulièrement dans le domaine de l’amélioration de l’accès à l’eau. A titre d'exemple, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) a décaissé, en novembre 2024, un prêt de 200 millions d’euros en faveur de l’OCP pour la construction de deux usines de dessalement de l’eau de mer. De son côté, la Société financière internationale (SFI) a accordé, deux mois plus tôt, un prêt de 100 millions d'euros au groupe pour la construction d’un pipeline de 219 kilomètres et d’une station de pompage destinée à transporter de l’eau depuis les stations de dessalement situées sur l’océan Atlantique jusqu’aux sites de production des engrais dans le centre du pays.
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