par energy_isere » Hier, 17:48
Les terres rares Made in USA se portent bien
MP Materials, la société qui exploite la seule mine de terres rares en activité aux États-Unis a vu son chiffre d’affaires bondir de 84 % au second trimestre 2025. Il y a un mois, Apple et le Pentagone ont investi des centaines de millions de dollars dans l’entreprise minière californienne.
Julien Gouesmat le 08/08/25 latribune.fr
MP Materials, seule société à exploiter une mine de terres rares en activité aux États-Unis, a dévoilé hier des résultats trimestriels encourageants. L'entreprise a enregistré une hausse de 84 % de son chiffre d'affaires par rapport à la même période l'an dernier. La perte ajustée a reculé à 12,5 millions de dollars (contre 27 millions un an plus tôt) et l'action du groupe a bondi de 9,6 % en pré-ouverture.
Cette embellie repose sur une production record d'oxyde de néodyme-praséodyme (NdPr), en hausse de 119 % sur un an, atteignant 597 tonnes. À elle seule, cette production permettrait de fournir environ 500 000 moteurs de véhicules électriques par an. Surtout, cette production record de matière première intervient à un moment stratégique : au cours du mois d'avril, en pleine tension commerciale sino-américaine, MP Materials a cessé ses exportations vers la Chine, qui représentaient encore la majorité de ses revenus en 2024.
Chaîne de valeur intégrée
Si l'arrêt de ces exportations a d'abord été présenté comme une forme de prudence face aux droits de douane, il reflète surtout la réussite du pari de la chaîne de production Made in USA. En effet, il y a moins d'un an, les terres rares extraites de la mine de Mountain Pass par MP Materials devaient être expédiées en Chine pour être séparées et raffinées. Ces deux étapes sont essentielles avant la conception des aimants de terres rares, utilisés dans les voitures, éoliennes, drones, etc.
Mais en janvier, l'entreprise américaine jubile : sa nouvelle usine texane de Fort Worth produit les tout premiers aimants néodyme fer bore Made in USA, symbole d'un contrôle désormais quasi complet de la chaîne de valeur et d'une plus grande indépendance de l'entreprise vis-à-vis de la Chine. Résultat, le segment magnétique de l'entreprise affiche ainsi une croissance fulgurante : son chiffre d'affaires a quadruplé en trois mois, atteignant près de 20 millions de dollars, d'après les résultats annoncés hier.
Apple et le Pentagone à la rescousse
Malgré ces signes de réjouissance, l'entreprise continue de vivre sous perfusion. Les prix du marché, dictés par l'offre chinoise sont particulièrement bas et obligent l'État fédéral à soutenir son producteur stratégique. Début juillet, le Pentagone a officialisé un investissement de plus de 400 millions de dollars, qui fera de lui le premier actionnaire de MP Materials, à hauteur de 15 % du capital. Surtout, l'accord prévoit également un prix plancher de 110 dollars le kilo de néodyme-praséodyme pendant dix ans, soit près du double des prix pratiqués par la Chine.
Cette stratégie s'inscrit dans le vaste programme de réindustrialisation lancé par la deuxième administration Trump. Cette dernière multiplie les investissements dans les chaînes de valeur critiques. Quelques jours après l'annonce du Pentagone, Apple a révélé un investissement de 500 millions de dollars dans MP Materials. Une manière de sécuriser l'approvisionnement en aimants permanents, utilisés dans les iPhone et MacBook, mais aussi dans les futurs appareils de réalité augmentée.
Fort de ces nouveaux soutiens, MP Materials prévoit déjà la construction d'une seconde usine de fabrication d'aimants, qui porterait la capacité totale du groupe à 10 000 tonnes par an d'ici à 2028, avec pour objectif de répondre à la demande croissante du secteur de la défense, comme celui de l'automobile.
Un challenger surgit du Wyoming
Bien qu'il jouisse pour le moment d'un monopole aux États-Unis, la montée en puissance de MP ne se fait pas sans concurrence. Le 11 juillet, la société Ramaco Resources a inauguré la première nouvelle mine de terres rares aux États-Unis depuis plus de 70 ans, dans le Wyoming. Le site de Brook Mine pourrait produire jusqu'à 1 400 tonnes par an, selon son PDG, Randall Atkins, qui revendique la découverte inattendue d'un important gisement d'éléments lourds, jugés plus précieux que ceux produits à Mountain Pass.
Contrairement à MP, Ramaco finance son projet sur fonds propres, adossé à une activité charbonnière rentable. Le timing lui est favorable : une nouvelle loi fiscale signée par le président Trump début juillet inclut un crédit d'impôt pour les producteurs de charbon métallurgique, principale source de revenus de Ramaco. Randall Atkins ne cache pas ses ambitions : établir un indice américain des prix des terres rares et militer pour la création d'une réserve stratégique nationale, sur le modèle de la réserve pétrolière.
Il espère aussi que Washington accordera à Ramaco le même niveau de soutien que celui dont bénéficie MP Materials, même s'il affirme ne pas vouloir de participation publique directe. À ce stade, l'entreprise est déjà en contact avec le Conseil national pour la domination énergétique, créé en février par l'administration Trump, et pourrait prochainement solliciter le ministère de la Défense. MP Materials, malgré ses soutiens déjà acquis, devra désormais compter avec ce concurrent indépendant, potentiellement mieux positionné sur les terres rares lourdes et bénéficiant du soutien politique de figures républicaines influentes, comme les sénateurs John Barrasso (Rép., Wyoming), Joe Manchin (Dém., Virginie occidentale) ou Cynthia Lummis (Rép., Wyoming). Cette dernière a d'ailleurs salué l'ouverture de Brook Mine comme « une déclaration d'indépendance énergétique américaine pour le XXIe siècle ».
https://www.latribune.fr/economie/inter ... 30947.html
[quote][b] Les terres rares Made in USA se portent bien
MP Materials, la société qui exploite la seule mine de terres rares en activité aux États-Unis a vu son chiffre d’affaires bondir de 84 % au second trimestre 2025. Il y a un mois, Apple et le Pentagone ont investi des centaines de millions de dollars dans l’entreprise minière californienne.[/b]
Julien Gouesmat le 08/08/25 latribune.fr
MP Materials, seule société à exploiter une mine de terres rares en activité aux États-Unis, a dévoilé hier des résultats trimestriels encourageants. L'entreprise a enregistré une hausse de 84 % de son chiffre d'affaires par rapport à la même période l'an dernier. La perte ajustée a reculé à 12,5 millions de dollars (contre 27 millions un an plus tôt) et l'action du groupe a bondi de 9,6 % en pré-ouverture.
Cette embellie repose sur une production record d'oxyde de néodyme-praséodyme (NdPr), en hausse de 119 % sur un an, atteignant 597 tonnes. À elle seule, cette production permettrait de fournir environ 500 000 moteurs de véhicules électriques par an. Surtout, cette production record de matière première intervient à un moment stratégique : au cours du mois d'avril, en pleine tension commerciale sino-américaine, MP Materials a cessé ses exportations vers la Chine, qui représentaient encore la majorité de ses revenus en 2024.
[b]Chaîne de valeur intégrée[/b]
Si l'arrêt de ces exportations a d'abord été présenté comme une forme de prudence face aux droits de douane, il reflète surtout la réussite du pari de la chaîne de production Made in USA. En effet, il y a moins d'un an, les terres rares extraites de la mine de Mountain Pass par MP Materials devaient être expédiées en Chine pour être séparées et raffinées. Ces deux étapes sont essentielles avant la conception des aimants de terres rares, utilisés dans les voitures, éoliennes, drones, etc.
Mais en janvier, l'entreprise américaine jubile : sa nouvelle usine texane de Fort Worth produit les tout premiers aimants néodyme fer bore Made in USA, symbole d'un contrôle désormais quasi complet de la chaîne de valeur et d'une plus grande indépendance de l'entreprise vis-à-vis de la Chine. Résultat, le segment magnétique de l'entreprise affiche ainsi une croissance fulgurante : son chiffre d'affaires a quadruplé en trois mois, atteignant près de 20 millions de dollars, d'après les résultats annoncés hier.
[b]Apple et le Pentagone à la rescousse[/b]
Malgré ces signes de réjouissance, l'entreprise continue de vivre sous perfusion. Les prix du marché, dictés par l'offre chinoise sont particulièrement bas et obligent l'État fédéral à soutenir son producteur stratégique. Début juillet, le Pentagone a officialisé un investissement de plus de 400 millions de dollars, qui fera de lui le premier actionnaire de MP Materials, à hauteur de 15 % du capital. Surtout, l'accord prévoit également un prix plancher de 110 dollars le kilo de néodyme-praséodyme pendant dix ans, soit près du double des prix pratiqués par la Chine.
Cette stratégie s'inscrit dans le vaste programme de réindustrialisation lancé par la deuxième administration Trump. Cette dernière multiplie les investissements dans les chaînes de valeur critiques. Quelques jours après l'annonce du Pentagone, Apple a révélé un investissement de 500 millions de dollars dans MP Materials. Une manière de sécuriser l'approvisionnement en aimants permanents, utilisés dans les iPhone et MacBook, mais aussi dans les futurs appareils de réalité augmentée.
Fort de ces nouveaux soutiens, MP Materials prévoit déjà la construction d'une seconde usine de fabrication d'aimants, qui porterait la capacité totale du groupe à 10 000 tonnes par an d'ici à 2028, avec pour objectif de répondre à la demande croissante du secteur de la défense, comme celui de l'automobile.
[b]Un challenger surgit du Wyoming[/b]
Bien qu'il jouisse pour le moment d'un monopole aux États-Unis, la montée en puissance de MP ne se fait pas sans concurrence. Le 11 juillet, la société Ramaco Resources a inauguré la première nouvelle mine de terres rares aux États-Unis depuis plus de 70 ans, dans le Wyoming. Le site de Brook Mine pourrait produire jusqu'à 1 400 tonnes par an, selon son PDG, Randall Atkins, qui revendique la découverte inattendue d'un important gisement d'éléments lourds, jugés plus précieux que ceux produits à Mountain Pass.
Contrairement à MP, Ramaco finance son projet sur fonds propres, adossé à une activité charbonnière rentable. Le timing lui est favorable : une nouvelle loi fiscale signée par le président Trump début juillet inclut un crédit d'impôt pour les producteurs de charbon métallurgique, principale source de revenus de Ramaco. Randall Atkins ne cache pas ses ambitions : établir un indice américain des prix des terres rares et militer pour la création d'une réserve stratégique nationale, sur le modèle de la réserve pétrolière.
Il espère aussi que Washington accordera à Ramaco le même niveau de soutien que celui dont bénéficie MP Materials, même s'il affirme ne pas vouloir de participation publique directe. À ce stade, l'entreprise est déjà en contact avec le Conseil national pour la domination énergétique, créé en février par l'administration Trump, et pourrait prochainement solliciter le ministère de la Défense. MP Materials, malgré ses soutiens déjà acquis, devra désormais compter avec ce concurrent indépendant, potentiellement mieux positionné sur les terres rares lourdes et bénéficiant du soutien politique de figures républicaines influentes, comme les sénateurs John Barrasso (Rép., Wyoming), Joe Manchin (Dém., Virginie occidentale) ou Cynthia Lummis (Rép., Wyoming). Cette dernière a d'ailleurs salué l'ouverture de Brook Mine comme « une déclaration d'indépendance énergétique américaine pour le XXIe siècle ».
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