Climat : le bilan et les questions, 10 ans après l'accord de Paris
Connaissance des Énergies avec AFP le 13 octobre 2025
Négociations lors de la COP21 à Paris fin 2015 (©flickr-UNclimatechange)
Dix ans après l'adoption de l'accord de Paris, la diplomatie climatique se trouve à l'heure des bilans et des questions, dans un monde qui continue de se réchauffer et reste divisé par des fractures géopolitiques et économiques.
Loin de la promesse de la COP28
Pour la présidence brésilienne de la COP30 (10-21 novembre), organisée à Belém, un nouveau chapitre s'ouvre : celui de la mise en œuvre des promesses formalisées depuis 2015 dans le cadre de négociations onusiennes fondées sur le consensus.
À Paris, 196 pays s'étaient alors engagés à maintenir le réchauffement climatique "bien en dessous" de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et à poursuivre les efforts pour le limiter à 1,5°C. Mais ce dixième anniversaire est marqué par les difficultés. À commencer par la décision du président américain Donald Trump, lequel qualifie le changement climatique d'"arnaque", de retirer le deuxième pollueur mondial de l'accord pour une seconde fois.
Les États-Unis, avec d'autres pays, prévoient de produire toujours plus de pétrole, de gaz naturel, voire de charbon. Malgré la promesse faite lors de la COP28 de Dubaï (2023) d'engager une transition pour abandonner ces énergies responsables de l'essentiel du réchauffement.
Pour appliquer l'accord de Paris, les pays devaient également mettre à jour d'ici à septembre leurs feuilles de route climatiques à l'horizon 2035. Or l'Union européenne n'a toujours pas finalisé sa copie, tandis que la Chine, premier émetteur mondial, s'est contentée d'objectifs minimalistes.
Une question de « survie »
Les COP, malgré ces déceptions, demeurent "absolument nécessaires" pour réunir les pays du monde et les tenir responsables de leur manque d'ambition, juge Patricia Espinosa, l'ancienne cheffe de l'ONU Climat. "Je ne pense pas qu'il existe un autre moyen de faire face à une aussi grande menace pour l'humanité", dit-elle à l'AFP. Et malgré leurs imperfections, les COP "ont fourni un programme très clair sur ce que nous devons faire".
Les limites de températures posées par l'accord n'ont rien d'abstrait pour les nations menacées par la montée du niveau des mers. C'est une question de "survie", déclare à l'AFP le ministre du Climat de l'archipel pacifique des Tuvalu, Maina Talia. "Dix ans après l'accord de Paris, nous essayons toujours de faire entendre notre voix".
Selon l'ONU, l'accord historique a permis un changement de trajectoire notable pour le monde. Avant lui, la planète s'orientait vers un réchauffement cataclysmique de 5°C d'ici à la fin du siècle, contre une trajectoire de 3°C aujourd'hui. C'est loin d'être satisfaisant. Le monde a vécu sa première année calendaire au-dessus de + 1,5°C en 2024, subissant feux géants, inondations et canicules meurtrières.
Dans l'accord de 2015, ce seuil de température s'entend en moyenne sur 10 ou 20 ans. Et la plupart des scientifiques estiment que le seuil d'une augmentation moyenne 1,5°C sur plusieurs années sera franchi dans quelques années, à moins d'un changement radical de direction.
« Un échec à protéger les personnes et les nations »
"Nous devons admettre un échec à protéger les personnes et les nations face aux effets ingérables du changement climatique d'origine humaine", a déclaré Johan Rockström, directeur de l'Institut de recherche sur le climat de Potsdam (PIK), devant l'ONU à New York le mois dernier. "Mais nous ne sommes pas obligés de continuer à échouer".
L'accord ne concerne pas que ces seuils de température. Il a également consacré des principes importants comme la finance pour le climat ou l'adaptation au dérèglement climatique. Il a aussi joué un rôle clef dans une décision en juillet de la Cour internationale de justice (CIJ), qui a déclaré "illicite" le manquement des États à leurs obligations climatiques. Ces gouvernements pourraient se voir réclamer des réparations par les pays affectés.
Quant aux solutions les plus efficaces qui ont émergé, comme le développement des énergies solaire et éolienne, porté par la chute des coûts, elles n'ont certes pas de rapport direct avec l'accord.
La Chine a commencé à prendre la tête de la course aux renouvelables dans les années 2000, s'appuyant sur des innovations développées en Europe et aux États-Unis pendant les décennies précédentes, rappelle Kingsmill Bond, du groupe de réflexion Ember. Ce dernier encourage le processus onusien à favoriser leur développement. "Nous avons désormais ces technologies nouvelles. Dégageons-leur le chemin", plaide-t-il.