par energy_isere » 10 nov. 2006, 21:09
Premier tir d'essai «réussi» du missile stratégique M51
L'engin de 56 tonnes équipera les sous-marins nucléaires à partir de 2010.
La France a procédé hier au premier tir d'essai du nouveau missile stratégique M51. «Un succès», s'est réjoui le ministère de la Défense dans un communiqué. A 9 h 52, au milieu des dunes couvertes de pins du Centre d'essais des Landes, un engin de 56 tonnes s'est élevé dans le ciel. Direction l'Atlantique plus précisément un «carreau» au large des côtes américaines qu'il a atteint environ un quart d'heure plus tard, après être rentré dans l'atmosphère à une vitesse de Mach 25.
Ce missile est l'un des principaux programmes d'armement français. L'un des plus discrets, également. Il s'agit de rééquiper, à partir de 2010, les quatre sous-marins nucléaires lance-engins (SNLE) de la Marine nationale avec un missile de portée sensiblement accrue.
Référence.
Cette portée est l'un des secrets les mieux gardés de la défense nationale. L'ouvrage de référence, Flottes de combat, avance le chiffre de 9 000 kilomètres. Assez, en tout cas, «pour qu'aucun point important de la planète soit hors de portée», selon l'ingénieur général de l'armement Christophe Fournier, responsable du programme Coelacanthe, la composante océanique de la dissuasion. L'Iran, la Corée du Nord ou la Chine pourraient ainsi être touchés à partir d'un sous-marin français qui croiserait, par exemple, entre le Spitzberg et la Norvège. Le missile M45, actuellement en service, avait été conçu durant la guerre froide et permettait surtout d'atteindre des cibles dans l'ex-URSS.
Haut de 12 mètres et large de 2,3 mètres, le M51 a été conçu afin de pouvoir être tiré depuis un sous-marin en plongée. Ejecté par une «chasse» d'air comprimé, le missile jaillit de l'eau, puis allume son moteur à quelques dizaines de mètres de la surface. Sa propulsion est identique à celle des «boosters» (moteurs auxiliaires) de la fusée civile Ariane 5. Il s'agit d'un carburant solide (perchlorate d'ammonium), qui se présente sous la forme d'une gomme noirâtre. Chaque sous-marin embarque seize missiles stratégiques.
Sous la coiffe de son troisième étage, le nouveau missile stratégique M51 transportera des armes nucléaires, au nombre de une à six. L'essai d'hier «a été effectué, comme toujours, sans arme», a rappelé le ministère de la Défense. Il a également été conduit à partir d'un site de lancement à terre. D'autres tests, sans doute moins de dix, auront lieu, dont certains en mer, au large de Quimper (Finistère).
Secret-défense.
Le programme M51 est d'un coût faramineux : 8,5 milliards d'euros, selon le ministère de la Défense. Au total, entre cinquante et soixante engins devraient être construits. D'où un prix unitaire, développement compris, de plus de 150 millions d'euros. A cela, il faut rajouter le coût des têtes nucléaires... qui relève du secret-défense. Pour alléger la facture, le programme s'est étalé sur dix-huit ans (1992-2010), et les capacités ont été révisées à la baisse en 1996.
Selon l'ingénieur général Christophe Fournier, «la France est, avec les Etats-Unis, le seul pays au monde à maîtriser ces technologies». Les sous-marins britanniques sont ainsi équipés de missiles américains Trident. Même s'ils sont «infiniment plus précis que les nôtres», comme le reconnaît l'ancien chef d'état-major des armées Henri Bentégeat, cela place Londres sous la dépendance stratégique de Washington. Quant aux Russes, ils connaissent de grandes difficultés pour mettre au point leur nouveau missile Boulava.
Réagissant à l'essai d'hier, le réseau Sortir du nucléaire et Greenpeace ont dénoncé «l'irresponsabilité de l'Etat français», estimant que «la France donne de parfaits prétextes aux pays qui veulent se doter de l'arme atomique».
En revanche, mercredi, au cours du débat télévisé, aucun des trois candidats à l'investiture socialiste n'avait évoqué une quelconque réduction de l'effort en matière de dissuasion nucléaire si la gauche revenait au pouvoir.
Libération le 10 Nov 2006
[quote] [b] Premier tir d'essai «réussi» du missile stratégique M51
L'engin de 56 tonnes équipera les sous-marins nucléaires à partir de 2010.[/b]
La France a procédé hier au premier tir d'essai du nouveau missile stratégique M51. «Un succès», s'est réjoui le ministère de la Défense dans un communiqué. A 9 h 52, au milieu des dunes couvertes de pins du Centre d'essais des Landes, un engin de 56 tonnes s'est élevé dans le ciel. Direction l'Atlantique plus précisément un «carreau» au large des côtes américaines qu'il a atteint environ un quart d'heure plus tard, après être rentré dans l'atmosphère à une vitesse de Mach 25.
Ce missile est l'un des principaux programmes d'armement français. L'un des plus discrets, également. Il s'agit de rééquiper, à partir de 2010, les quatre sous-marins nucléaires lance-engins (SNLE) de la Marine nationale avec un missile de portée sensiblement accrue.
[b] Référence. [/b]
Cette portée est l'un des secrets les mieux gardés de la défense nationale. L'ouvrage de référence, Flottes de combat, avance le chiffre de 9 000 kilomètres. Assez, en tout cas, «pour qu'aucun point important de la planète soit hors de portée», selon l'ingénieur général de l'armement Christophe Fournier, responsable du programme Coelacanthe, la composante océanique de la dissuasion. L'Iran, la Corée du Nord ou la Chine pourraient ainsi être touchés à partir d'un sous-marin français qui croiserait, par exemple, entre le Spitzberg et la Norvège. Le missile M45, actuellement en service, avait été conçu durant la guerre froide et permettait surtout d'atteindre des cibles dans l'ex-URSS.
Haut de 12 mètres et large de 2,3 mètres, le M51 a été conçu afin de pouvoir être tiré depuis un sous-marin en plongée. Ejecté par une «chasse» d'air comprimé, le missile jaillit de l'eau, puis allume son moteur à quelques dizaines de mètres de la surface. Sa propulsion est identique à celle des «boosters» (moteurs auxiliaires) de la fusée civile Ariane 5. Il s'agit d'un carburant solide (perchlorate d'ammonium), qui se présente sous la forme d'une gomme noirâtre. Chaque sous-marin embarque seize missiles stratégiques.
Sous la coiffe de son troisième étage, le nouveau missile stratégique M51 transportera des armes nucléaires, au nombre de une à six. L'essai d'hier «a été effectué, comme toujours, sans arme», a rappelé le ministère de la Défense. Il a également été conduit à partir d'un site de lancement à terre. D'autres tests, sans doute moins de dix, auront lieu, dont certains en mer, au large de Quimper (Finistère).
[b] Secret-défense. [/b]
Le programme M51 est d'un coût faramineux : 8,5 milliards d'euros, selon le ministère de la Défense. Au total, entre cinquante et soixante engins devraient être construits. D'où un prix unitaire, développement compris, de plus de 150 millions d'euros. A cela, il faut rajouter le coût des têtes nucléaires... qui relève du secret-défense. Pour alléger la facture, le programme s'est étalé sur dix-huit ans (1992-2010), et les capacités ont été révisées à la baisse en 1996.
Selon l'ingénieur général Christophe Fournier, «la France est, avec les Etats-Unis, le seul pays au monde à maîtriser ces technologies». Les sous-marins britanniques sont ainsi équipés de missiles américains Trident. Même s'ils sont «infiniment plus précis que les nôtres», comme le reconnaît l'ancien chef d'état-major des armées Henri Bentégeat, cela place Londres sous la dépendance stratégique de Washington. Quant aux Russes, ils connaissent de grandes difficultés pour mettre au point leur nouveau missile Boulava.
Réagissant à l'essai d'hier, le réseau Sortir du nucléaire et Greenpeace ont dénoncé «l'irresponsabilité de l'Etat français», estimant que «la France donne de parfaits prétextes aux pays qui veulent se doter de l'arme atomique».
En revanche, mercredi, au cours du débat télévisé, aucun des trois candidats à l'investiture socialiste n'avait évoqué une quelconque réduction de l'effort en matière de dissuasion nucléaire si la gauche revenait au pouvoir.
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Libération le 10 Nov 2006