par GillesH38 » 10 août 2008, 04:51
Pour en revenir aux enjeux géostratégiques, donc, une analyse du monde
Ossétie du Sud : un confetti(*) de l'empire devenu une enclave séparatiste pro-russe en Géorgie
(* NB : 70 000 habitants)
Crise des espions" (septembre 2006), tir d'un missile russe sur le territoire géorgien (août 2007), drones géorgiens abattus par l'aviation russe en Abkhazie (mai 2008) : les incessantes tensions entre la Géorgie et la Russie ont dégénéré en conflit armé sur le territoire de l'Ossétie du Sud, enclave séparatiste soutenue par Moscou. Rural, pauvre, peu propice au passage des gazoducs et des oléoducs en raison de son relief, ce confetti, issu de l'empire soviétique façonné par Staline, n'a qu'une faible importance stratégique.
Et pourtant, c'est bien cette enclave ossète plutôt paisible, où les troupeaux ramenés à l'étable par les bergers encombrent les routes au crépuscule, que la Géorgie et son puissant voisin du nord ont choisi pour régler leurs comptes. Théâtre de combats acharnés entre les forces russes et ossètes d'un côté, l'armée géorgienne de l'autre, Tskhinvali, la capitale de la région, aurait été complètement détruite, affirment des témoins....
Pour les autorités de Tbilissi, il est primordial de faire cesser l'opacité qui règne dans ces "républiques autoproclamées", devenues de véritables havres de contrebande et de trafics. Récemment, les Géorgiens se sont mis à soutenir un ancien représentant du pouvoir ossète qui leur a fait allégeance. Il s'agit de Dmitri Sanakoev, un ancien indépendantiste qui après avoir pris les armes contre Tbilissi en 1990, a rejoint ses ennemis d'hier.
En revanche le "président" ossète actuel, Edouard Kokoïty, n'a pas le même profil. Alors que la guerre faisait rage à la fin des années 1990, il dirigeait à Saint-Pétersbourg le juteux commerce des casinos. "Où sont les séparatistes ?", interrogeait récemment la commentatrice russe Ioulia Latynina sur les ondes de Radio Liberty.
Jugez plutôt : le chef du KGB ossète Anatoli Baranov occupait jadis la même fonction mais en Russie (dans la région autonome de Mordovie). Pareil pour le ministre de l'intérieur, Mikhaïl Mindzaev, en fonction autrefois en Ossétie du Nord (Russie). Quant au ministre ossète de la défense, Vassili Lounev, il a fait ses armes comme commissaire militaire à Perm, dans l'Oural. Et pour finir, Anatoli Barankevitch, le secrétaire du conseil de sécurité local, a fait sa carrière militaire à Krasnodar (Russie).
"L'Ossétie du Sud n'est ni un pays, ni un régime. C'est une société mixte qui s'est constituée entre des généraux russes et des bandits ossètes pour faire de l'argent sur fond du conflit avec la Géorgie", avance Ioulia Latynina. Le pire, selon elle, est que cette association "n'a pas de buts stratégiques".
En prétendant défendre les indépendantistes abkhazes et ossètes - une aberration quand on songe au prix payé par les indépendantistes tchétchènes -, la Russie cherche en fait à regagner son rôle perdu au moment de l'implosion de l'URSS. L'enjeu dépasse de loin le petit territoire ossète. Il s'agit pour Moscou de reconquérir une région importante à trois titres : énergétique, politique, géostratégique.
Ces dernières années, la Géorgie, traversée par plusieurs oléoducs et gazoducs, est devenue le carrefour des hydrocarbures de la Caspienne en route vers l'Europe. Plus largement, toute la région s'est muée en une zone de fracture entre deux axes : l'axe Moscou-Erevan-Téhéran faisant face à l'axe Washington-Ankara-Tbilissi-Bakou. Le moment de l'affrontement a été bien choisi. Moscou mise sur l'immobilisme des Européens et sur le fait que les Américains sont pris dans leurs affaires internes.
Alors que la candidature de la Géorgie à l'OTAN sera rééxaminée en décembre, la guerre risque de compromettre les chances de Tbilissi. En intervenant militairement sur le territoire géorgien, Moscou, opposé à l'adhésion de la Géorgie aux valeurs occidentales, cherche à ruiner les espoirs de Tbilissi. Chacun avance ses pions sans qu'il soit possible de dire quelle sera l'issue du conflit. La partie de go entre la Russie et l'Occident vient à peine de commencer.
Marie Jégo
l'enjeu principal qui se dégage semble donc etre d'entrainer la Géorgie dans un conflit qui lui ferme les portes de l'OTAN. Est-il permis de suspecter que les Russes se fichent des bergers ossètes comme de leur premier samovar ?
Pour en revenir aux enjeux géostratégiques, donc, une analyse du monde
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Ossétie du Sud : un confetti(*) de l'empire devenu une enclave séparatiste pro-russe en Géorgie[/b][/size]
(* NB : 70 000 habitants)
Crise des espions" (septembre 2006), tir d'un missile russe sur le territoire géorgien (août 2007), drones géorgiens abattus par l'aviation russe en Abkhazie (mai 2008) : les incessantes tensions entre la Géorgie et la Russie ont dégénéré en conflit armé sur le territoire de l'Ossétie du Sud, enclave séparatiste soutenue par Moscou. Rural, pauvre, peu propice au passage des gazoducs et des oléoducs en raison de son relief, ce confetti, issu de l'empire soviétique façonné par Staline, n'a qu'une faible importance stratégique.
Et pourtant, c'est bien cette enclave ossète plutôt paisible, où les troupeaux ramenés à l'étable par les bergers encombrent les routes au crépuscule, que la Géorgie et son puissant voisin du nord ont choisi pour régler leurs comptes. Théâtre de combats acharnés entre les forces russes et ossètes d'un côté, l'armée géorgienne de l'autre, Tskhinvali, la capitale de la région, aurait été complètement détruite, affirment des témoins....
Pour les autorités de Tbilissi, il est primordial de faire cesser l'opacité qui règne dans ces "républiques autoproclamées", devenues de véritables havres de contrebande et de trafics. Récemment, les Géorgiens se sont mis à soutenir un ancien représentant du pouvoir ossète qui leur a fait allégeance. Il s'agit de Dmitri Sanakoev, un ancien indépendantiste qui après avoir pris les armes contre Tbilissi en 1990, a rejoint ses ennemis d'hier.
En revanche le "président" ossète actuel, Edouard Kokoïty, n'a pas le même profil. Alors que la guerre faisait rage à la fin des années 1990, il dirigeait à Saint-Pétersbourg le juteux commerce des casinos. "Où sont les séparatistes ?", interrogeait récemment la commentatrice russe Ioulia Latynina sur les ondes de Radio Liberty.
Jugez plutôt : le chef du KGB ossète Anatoli Baranov occupait jadis la même fonction mais en Russie (dans la région autonome de Mordovie). Pareil pour le ministre de l'intérieur, Mikhaïl Mindzaev, en fonction autrefois en Ossétie du Nord (Russie). Quant au ministre ossète de la défense, Vassili Lounev, il a fait ses armes comme commissaire militaire à Perm, dans l'Oural. Et pour finir, Anatoli Barankevitch, le secrétaire du conseil de sécurité local, a fait sa carrière militaire à Krasnodar (Russie).
"[b]L'Ossétie du Sud n'est ni un pays, ni un régime. C'est une société mixte qui s'est constituée entre des généraux russes et des bandits ossètes pour faire de l'argent sur fond du conflit avec la Géorgie", avance Ioulia Latynina. Le pire, selon elle, est que cette association "n'a pas de buts stratégiques".[/b]
En prétendant défendre les indépendantistes abkhazes et ossètes - une aberration quand on songe au prix payé par les indépendantistes tchétchènes -, la Russie cherche en fait à regagner son rôle perdu au moment de l'implosion de l'URSS. L'enjeu dépasse de loin le petit territoire ossète. Il s'agit pour Moscou de reconquérir une région importante à trois titres : énergétique, politique, géostratégique.
Ces dernières années, la Géorgie, traversée par plusieurs oléoducs et gazoducs, est devenue le carrefour des hydrocarbures de la Caspienne en route vers l'Europe. Plus largement, toute la région s'est muée en une zone de fracture entre deux axes : l'axe Moscou-Erevan-Téhéran faisant face à l'axe Washington-Ankara-Tbilissi-Bakou. Le moment de l'affrontement a été bien choisi. Moscou mise sur l'immobilisme des Européens et sur le fait que les Américains sont pris dans leurs affaires internes.
[b]Alors que la candidature de la Géorgie à l'OTAN sera rééxaminée en décembre, la guerre risque de compromettre les chances de Tbilissi. En intervenant militairement sur le territoire géorgien, Moscou, opposé à l'adhésion de la Géorgie aux valeurs occidentales, cherche à ruiner les espoirs de Tbilissi. [/b]Chacun avance ses pions sans qu'il soit possible de dire quelle sera l'issue du conflit. La partie de go entre la Russie et l'Occident vient à peine de commencer.
Marie Jégo
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l'enjeu principal qui se dégage semble donc etre d'entrainer la Géorgie dans un conflit qui lui ferme les portes de l'OTAN. Est-il permis de suspecter que les Russes se fichent des bergers ossètes comme de leur premier samovar ?