par Philippe » 01 mars 2012, 01:25
On sort un peu du sujet. On ne peut pas raisonner sur un unique puits de pétrole ou de gaz. Un puits peut effectivement être perdu du jour au lendemain, pour diverses raisons : éboulements en fond de puits, corrosion, défaut d’entretien du matériel tubulaire (trous dans le tubing, ça arrive), panne de la pompe ne justifiant pas un coûteux remplacement, envahissement par de l’eau ou du gaz en provenance de la couche réservoir, envahissement du site par la mer (cas de la pointe du Cap-Ferret), inondations (j’ai perdu des puits dans le désert yéménite sur inondation !), etc.
Il faut raisonner au moins à l’échelle d’un gisement (un ensemble de puits soutirant dans la même couche géologique). On comprend que le niveau du plateau de production, et partant du taux de déclin ultérieur, dépend des investissements consentis : un long plateau à bas niveau, avec peu d’investissements, ou un plateau à haut niveau, de durée forcément plus courte avec beaucoup de puits. La décision dépend des éléments contractuels tels la durée du permis ou les conditions du contrat de vente ou de transport du produit (volumes disponibles dans les tuyaux existants), mais surtout des calculs économiques. Le choix, volontaire, de taux d’actualisation élevés, surtout dans les pays à risques (Syrie, Yémen, Nigéria, par exemple) mais aussi en offshore profond, conduit à préférer investir massivement pour extraire le plus possible de pétrole le plus rapidement possible. L’optimum économique, dans de tels cas, est généralement une exploitation avec un déclin terminal élevé, pouvant aller jusqu’à 12%, voire 15% par an pour les gisements les plus petits.
Après, ce qui donne la courbe de la production mondiale, c’est la consolidation des profils de production de tous les gisements du monde. Bien sûr, les plus gros ont un impact plus important que les petits. Pour les très gros, le raisonnement économique ne s’applique plus de la même façon. Il aurait été impossible d’investir massivement sur Ghawar ou Burgan, de façon à extraire à l’optimum économique avec des taux d’actualisation élevés : si, par exemple, on considère le gisement koweitien de Burgan, découvert en 1938 et mis en exploitation en 1945, la valeur actualisée à 12,5% par an de la production 2011 du gisement, en dollars de 1945, aurait représenté en 1945 0,056% de sa valeur actuelle ; les 1,5 million de barils par jour actuels n’auraient été comptabilisés que pour 840 barils/jour de 1945, autant dire rien. Pour augmenter le plateau, de façon que la production de 2011 ne représente quasiment plus rien (ce qu'elle fait de toute façon avec un taux d'actualisation élevé), il aurait fallu investir, pendant la deuxième guerre mondiale, quelque chose comme 200 à 250 milliards de dollars de 2011, un investissement hors de portée de quiconque. En outre, l'investissement aurait été perdu, puisque la demande n'aurait pas suivi.
On consolide donc des gisements avec des profils de production très différents. Les très gros, très anciens (Ghawar, Burgan, Kirkuk, Hassi-Messaoud, etc) avec un plateau très long et peu ou pas de déclin, et les petits et moyens et certains gros offshore (Statfjord, Forties, Brent, Cantarell), récents ou non, avec des plateaux plus courts et des déclins plus prononcés. Et enfin, les gisements qui sont en phase de développement, et dont le déclin n’a pas encore commencé. C’est cet exercice de consolidation d’un grand nombre de gisements à différents stades de leur vie qui rend difficile l’extrapolation, surtout quand les données sont manquantes, comme on le déplore dans de nombreux pays.
Cela donne des arguments à ceux qui ne croient pas au peak oil, imminent ou pas, et qui affirment que ce qui manque, ce sont les investissements pour augmenter le niveau du plateau, passant sous silence que cela reviendra nécessairement à augmenter le taux de déclin ultérieur si les investissements ne font qu’accélérer la récupération sans apporter de nouvelles réserves.
On sort un peu du sujet. On ne peut pas raisonner sur un unique puits de pétrole ou de gaz. Un puits peut effectivement être perdu du jour au lendemain, pour diverses raisons : éboulements en fond de puits, corrosion, défaut d’entretien du matériel tubulaire (trous dans le tubing, ça arrive), panne de la pompe ne justifiant pas un coûteux remplacement, envahissement par de l’eau ou du gaz en provenance de la couche réservoir, envahissement du site par la mer (cas de la pointe du Cap-Ferret), inondations (j’ai perdu des puits dans le désert yéménite sur inondation !), etc.
Il faut raisonner au moins à l’échelle d’un gisement (un ensemble de puits soutirant dans la même couche géologique). On comprend que le niveau du plateau de production, et partant du taux de déclin ultérieur, dépend des investissements consentis : un long plateau à bas niveau, avec peu d’investissements, ou un plateau à haut niveau, de durée forcément plus courte avec beaucoup de puits. La décision dépend des éléments contractuels tels la durée du permis ou les conditions du contrat de vente ou de transport du produit (volumes disponibles dans les tuyaux existants), mais surtout des calculs économiques. Le choix, volontaire, de taux d’actualisation élevés, surtout dans les pays à risques (Syrie, Yémen, Nigéria, par exemple) mais aussi en offshore profond, conduit à préférer investir massivement pour extraire le plus possible de pétrole le plus rapidement possible. L’optimum économique, dans de tels cas, est généralement une exploitation avec un déclin terminal élevé, pouvant aller jusqu’à 12%, voire 15% par an pour les gisements les plus petits.
Après, ce qui donne la courbe de la production mondiale, c’est la consolidation des profils de production de tous les gisements du monde. Bien sûr, les plus gros ont un impact plus important que les petits. Pour les très gros, le raisonnement économique ne s’applique plus de la même façon. Il aurait été impossible d’investir massivement sur Ghawar ou Burgan, de façon à extraire à l’optimum économique avec des taux d’actualisation élevés : si, par exemple, on considère le gisement koweitien de Burgan, découvert en 1938 et mis en exploitation en 1945, la valeur actualisée à 12,5% par an de la production 2011 du gisement, en dollars de 1945, aurait représenté en 1945 0,056% de sa valeur actuelle ; les 1,5 million de barils par jour actuels n’auraient été comptabilisés que pour 840 barils/jour de 1945, autant dire rien. Pour augmenter le plateau, de façon que la production de 2011 ne représente quasiment plus rien (ce qu'elle fait de toute façon avec un taux d'actualisation élevé), il aurait fallu investir, pendant la deuxième guerre mondiale, quelque chose comme 200 à 250 milliards de dollars de 2011, un investissement hors de portée de quiconque. En outre, l'investissement aurait été perdu, puisque la demande n'aurait pas suivi.
On consolide donc des gisements avec des profils de production très différents. Les très gros, très anciens (Ghawar, Burgan, Kirkuk, Hassi-Messaoud, etc) avec un plateau très long et peu ou pas de déclin, et les petits et moyens et certains gros offshore (Statfjord, Forties, Brent, Cantarell), récents ou non, avec des plateaux plus courts et des déclins plus prononcés. Et enfin, les gisements qui sont en phase de développement, et dont le déclin n’a pas encore commencé. C’est cet exercice de consolidation d’un grand nombre de gisements à différents stades de leur vie qui rend difficile l’extrapolation, surtout quand les données sont manquantes, comme on le déplore dans de nombreux pays.
Cela donne des arguments à ceux qui ne croient pas au peak oil, imminent ou pas, et qui affirment que ce qui manque, ce sont les investissements pour augmenter le niveau du plateau, passant sous silence que cela reviendra nécessairement à augmenter le taux de déclin ultérieur si les investissements ne font qu’accélérer la récupération sans apporter de nouvelles réserves.