Mix énergétique : les Etats pourront-ils continuer le "chacun pour soi" ?
EurActiv.fr (
http://www.euractiv.fr/mix-energetique- ... er-article) - 6/10/2011
La Commission et les grands opérateurs plaident pour la régulation du marché et la liberté des Etats sur le choix de leurs énergies. Certains acteurs locaux estiment en revanche nécessaire d'aller au-delà de l'offre et la demande. 06/10/2011 énergies renouvelables, mix énergétique, nucléaire
L'histoire de la politique européenne de l'énergie fait penser à la mise en place de l'euro.
En 2001, la monnaie unique était lancée sans coordination des politiques économiques entre les Etats. Dix ans plus tard, cette lacune a explosé à la figure des pays européens.
En 2007, les pays de l’UE ont adopté le traité de Lisbonne et enfoncé le clou : pas question de toucher à leur souveraineté énergétique. Un an plus tard, ils se sont pourtant mis d’accord au forceps sur une série d’objectifs (paquet énergie-climat) énergétiques et climatiques imposant à chacun des engagements pour 2020.
"Touche pas à mon mix"
Et aujourd’hui l’Union européenne réfléchit à sa stratégie pour 2050. Mais la devise commune est bien "touche pas à mon mix énergétique", ironise Sami Andoura, chercheur à Notre Europe. "Les Etats raisonnent toujours en termes d'indépendance énergétique, d'autonomie", explique-t-il à EurActiv.fr.
Si les mêmes causes produisent les mêmes effets, la réflexion individuelle des pays de l'UE sur leur bouquet énergétique à de quoi laisser perplexe.
La politique européenne de l’énergie n’est pas “uniforme”, ont insisté les participants à un débat organisé par le Mouvement européen-France à Rennes, mardi 4 octobre. Et “ce n’est ni souhaité, ni souhaitable”, a martelé la représentante de la Commission européenne, Barbara Sellier.
L'objectif actuel de l'exécutif européen est d'aboutir coûte que coûte à la libéralisation du marché européen de l'énergie en créant un cadre règlementaire unique, des infrastructures communes, des codes de réseaux homogènes. Mais de surtout rester en dehors des décisions nationales sur le choix des énergies.
Le marché et les réseaux
“Il ne faut pas se fixer sur le fait qu’on a des bouquets énergétiques différents”, a déclaré Mme Sellier. "L’important est de réaliser ce grand marché et cette transition énergétique en Europe de manière coordonnée à l’horizon 2050.”
"Il faut être clair : c'est le marché qui peut le mieux articuler et fédérer nos différences", a renchéri Jan Horst Keppler, expert à l'OCDE et professeur à Dauphine.
"Si on admet que la diversité [énergétique] est une richesse, on ne doit pas se lamenter des écarts entre les différents pays mais en tirer partie grâce aux réseaux", a résumé de son côté le président du directoire de RTE Dominique Maillard.
Dans les faits, cette absence de coordination peut déjà poser des problèmes. La décision de l’Allemagne d’arrêter le nucléaire pourrait être délicate si l’hiver se révèlait très froid, car la France importe traditionnellement à ce moment-là de l'énergie auparavant produite par son voisin.
Manque de coordination?
Après l’annonce d’Angela Merkel, le ministre français Eric Besson a écrit une lettre au commissaire européen à l’Energie pour justement demander qu’une concertation ait lieu au sein de l'UE afin d'“essayer d’évoquer les conséquences des décisions nationales” prises par les Etats. Trois mois plus tard, les ministres français et allemand de l’Energie ont d'ailleurs proposé de coordonner les politiques énergétiques nationales des Etats de l’Union.
"Dans le schéma de la Commission européenne, le chaînon manquant est la coopération. Le problème avec ce type de construction est qu'à un moment les pays se replient sur eux-mêmes", estime Sami Andoura. "Sur les nouvelles technologies, notamment les énergies renouvelables, on peut espérer des projets de coopération entre la France et l'Allemagne par exemple.
" Certaines collectivités semblent d'ailleurs avoir bien compris le problème de l'absence de visibilité de la politique européenne de l'énergie du point de vue du mix. "On voit bien que si l'on s'en tient à une politique énergétique de l'offre et de la demande (…) un territoire péninsulaire comme la Bretagne peut se retrouver en situation de fragilité. Il ne faut pas simplement mettre en place au niveau européen une politique de marché, mais de la maîtrise de la consommation, et d'innovation pour développer les énergies renouvelables", a insisté Dominique Ramard, délégué à l'énergie et au climat de la région Bretagne.
Réflexion nationale
Pour la première fois depuis 30 ans, l'énergie pourrait devenir l'un des sujets clés de la campagne électorale qui démarre en France.
"On peut anticiper qu'il y aura une baisse du nucléaire en France. C'est à vous de décider dans les mois qui viennent", a prudemment déclaré la représentante de la Commission européenne à Rennes.
Entre réduction de la présence du nucléaire dans le bouquet énergétique français et abandon en 40 ans, les candidats à la primaire socialiste ne sont pas tous d'accord.
De son côté le gouvernement a mis sur pied un groupe de travail pour réfléchir à toutes les options sur le mix énergétique français dans les décennies à venir. Reste à savoir jusqu'où Paris informera ses partenaires européens de sa réflexion. Clémentine Forissier
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