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PIB, niveau de vie et intensité énergétique

Publié : 15 juil. 2006, 13:00
par GillesH38
Je voudrais lancer un nouveau fil sur un probléme qui commence à m'intriguer : la différence entre PIB et niveau de vie dans les pays occidentaux. Je commence juste à essayer de rassembler des chiffres , et c'est encore préliminaire, donc c'est aussi un appel a ceux qui auraient d'autres sources et/ou deja des éléments de réflexion sur le problème.

On a deja pas mal parlé du PIB et de son corollaire, l'intensité énergétique (conso énergétique /$ de PIB). On critique souvent le PIB comme étant un indicateur ne s'occupant que de la richesse matérielle produite, sans tenir compte d'autres facteurs de qualité de vie, d'ou l'emploi d'autre indicateurs comme l'IDH. C'est pertinent, mais ce n'est pas le sujet de mon post : ce que je me demande, c'est si le PIB est meme bien corrélé, ou plutot bien proportionnel au pouvoir de consommation matériel des individus.

Si on prend les chiffres de la France depuis 1984, on trouve que le PIB est passé de 1984 à 2002 de 914 M$ a 1353 M$ /an, soit une augmentation de + 48 %. La population est passée de 54,95 Mhab à 59,85 Mhab, soit + 9 %. (sources : données internationales de l'EIA, en $ constants 2000)

Le PIB/habitant est donc passé de 16640 $/hab à 22 609 $/hab, soit une croissance de + 36 %.

Dans le même temps, la conso énergétique est passée de 8,214 à 11,085 10^12 BTU, soit par habitant 149 à 185 kBTU/an/hab, soit une progression seulement de + 24 %

Fort logiquement, comme on le dit souvent, l'intensité énergétique (cons. energétique /PIB) a baissé d'environ 10 %. C'est chouette, et c'est souvent utilisé comme argument pour dire que le PO pourrait n'être pas si terrible que cela si on continue à améliorer l'IE assez vite.

Oui mais voila.... il existe un autre indicateur , le niveau de vie moyen, défini par le revenu net annuel apres impots divisés par le nombre d'unité de consommation du ménage (les enfants comptant moins que les adultes).
Malheureusement cette notion est moins etudiée que le PIB apparemment, mais on trouve une statistique ici.

On voit que celui-ci n'a augmenté "que" de 14 616 euros2003 /an en 1984 à 17462 euros 2003/an en 2002 (le mode de calcul a legerement changé en 2003 apparemment), soit seulement de + 19 %


Ca pose (au moins) deux questions :

Premièrement : ou est passé la différence avec le PIB/hab ? dans les impots servant a faire des travaux collectifs non comptabilisés dans les dépenses personnelles? bof, on n'a pas vraiment l'impression que les services publics ont beaucoup augmenté, bien au contraire !

Est-ce que ce ne serait pas plutot l'explosion des revenus financiers et speculatifs qui donneraient une croissance du PIB totalement artificielle, en liaison avec l'augmentation de la masse monétaire soulevée par nos amis AJH et Pura Vida ? Je ne suis vraiment pas assez calé en economie pour y repondre, mais je suspecte une "arnaque" dans la comptabilité du PIB.

Deuxième problème : si on ramène la consommation énergétique au niveau de vie moyen plutot qu'au PIB (ce qui apres tout correspond à des choses plus "réelles" de la vie de tous les jours non?) on n'a pas du tout amélioré les choses, au contraire, elle a PLUS augmenté que le niveau de vie, ce qui voudrait dire qu'on est a PLUS sensible qu'il y a 20 ans a une baisse de la consommation énergétique ?

Et qui pose quelques questions sur la signification de la petite "croissance " résiduelle, dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle n'est pas tres apparente dans la population....

Publié : 15 juil. 2006, 13:07
par matthieu25
Moi je pense que l'argent est passée dans les poches des actionnaires.L'économie est de plus en plus privatisée.Donc plus de revenus pour les actionnaires.Le salaire moyen ne comptabilise pas tous les revenus annexes(actions, loyers, revenus du livret A).Voila d'ou vient la différence.Il y a pas de magie dans tout ça.

Publié : 15 juil. 2006, 14:30
par GillesH38
je crois que le revenu moyen est calculé sur des bases fiscales, ce n'est pas le salaire moyen, il doit intégrer les revenus d'action. Mais il faut que je vérifie. En revanche, des bénéfices de sociétés réinvestis dans d'autres placements contribuent je pense au PIB , mais pas au revenu moyen (?)

Publié : 15 juil. 2006, 14:41
par fabinoo
Il y a des théories selon lesquelles l'intensité énergétique suivrait une courbe de Kuznets (grosso modo U renversé) :
Dans une société primitivé, faible revenu, mais très faible conso d'énergie.
Quand la société s'industrialise, chaque point de PIB supplémentaire coûte très cher en énergie.
Passé le stade indutriel, le point de PIB supplémentaire coûte de moins en moins cher.
Et si la société se désindustrialise, la conso d'énergie par point de PIB peut diminuer aussi.

Exemple :
Soc. primitive, PIB 500 unités, conso 500 unités.
Soc. Industrielle, PIB 5000, conso 500+4500*2 = 9500.
PIB multiplié par 10, conso énergétique par 20...
Soc. avancée; PIB 25000, conso 500 + 4500*2 + 20000*0,5 = 19500.
Le PIB est multiplié par 5, mais la conso énergétique par 2 seulement...

Cela dit, un PIB multiplié par 5 est loin de représenter une amélioration équivalente du niveau de vie...

Re: PIB, niveau de vie et intensité énergétique

Publié : 17 juil. 2006, 07:24
par AJH
@GillesH38
Ta question d'ouverture de ce thread pose des questions multiples .. déja il faut partir des bonnes définitions .. je les poste ci dessous..
Le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d'unités de consommation (uc). Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d'un même ménage.
Les unités de consommation sont généralement calculées selon l'échelle d'équivalence dite de l'OCDE modifiée qui attribue 1 uc au premier adulte du ménage, 0,5 uc aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 uc aux enfants de moins de 14 ans.


Le revenu disponible d'un ménage comprend les revenus d'activité, les revenus du patrimoine, les transferts en provenance d'autres ménages et les prestations sociales (y compris les pensions de retraite et les indemnités de chômage), nets des impôts directs. Quatre impôts directs sont généralement pris en compte : l'impôt sur le revenu, la taxe d'habitation et les contributions sociales généralisées (CSG) et contribution à la réduction de la dette sociale (CRDS).


Produit intérieur brut aux prix du marché / PIB
Agrégat représentant le résultat final de l'activité de production des unités productrices résidentes.
Il peut se définir de trois manières :
- le PIB est égal à la somme des valeurs ajoutées brutes des différents secteurs institutionnels ou des différentes branches d'activité, augmentée des impôts moins les subventions sur les produits (lesquels ne sont pas affectés aux secteurs et aux branches d'activité) ;
- le PIB est égal à la somme des emplois finals intérieurs de biens et de services (consommation finale effective, formation brute de capital fixe, variations de stocks), plus les exportations, moins les importations ;
- le PIB est égal à la somme des emplois des comptes d'exploitation des secteurs institutionnels : rémunération des salariés, impôts sur la production et les importations moins les subventions, excédent brut d'exploitation et revenu mixte.


Secteurs institutionnels
Les différents acteurs de la vie économique sont regroupés dans des ensembles considérés comme pertinents. Les unités, dites institutionnelles, constituent les unités de base de la comptabilité nationale : ce sont des unités susceptibles de posséder elles-mêmes des actifs, de souscrire des engagements, de s'engager dans des activités économiques et de réaliser des opérations avec d'autres unités. Les secteurs institutionnels regroupent les unités institutionnelles ayant des comportements économiques similaires caractérisés par leur fonction principale et la nature de leur activité.
On distingue cinq secteurs institutionnels résidents : les sociétés non financières (SNF - S.11), les sociétés financières (SF - S.12), les administrations publiques (APU - S.13), les ménages (S.14), les institutions sans but lucratif au service des ménages (ISBLSM - S.15). L'ensemble des unités non-résidentes, dans la mesure où elles entretiennent des relations économiques avec des unités résidentes, sont regroupées dans le reste du monde (S.2).




Consommation finale des ménages
Ensemble de la consommation des ménages. C'est la somme de la dépense de consommation des ménages et des consommations individualisables incluses dans la dépense de consommation finale des Administrations.
La dépense de consommation des ménages se limite aux dépenses que les ménages supportent directement. Elle comprend la part des dépenses de santé, d'éducation, de logement, restant à leur charge, après remboursements éventuels. On y inclut aussi les loyers imputés, que les ménages propriétaires de leur résidence principale se versent implicitement à eux-mêmes.
Les consommations individualisables incluses dans la dépense de consommation finale des Administrations sont celles dont les bénéficiaires peuvent être précisément définis. C'est le cas en particulier des dépenses pour l'éducation et pour la santé.

Ensuite concernant le calcul du PIB .. j'avoue que je ne m'y suis pas penché de très près mais voici ce que m'écrivais Pierre Aunac ( "Une économie au sevice de l'homme" , ed l'Harmattan) il y a seulement quelques semaines
Très surprenant, il peut y avoir des variations "incontrôlées" du PIB. J'accuse le calcul du PIB d'être faux, par excès, de l'ordre de 25 %. Ce n'est pas rien. C'est dû au fait que les investissements (la FBCF) et la part des "services non marchands (administration) afférente aux entreprises sont comptabilisés deux fois. Cela paraît fou. Mais, grâce à l'entêtement de la responsable de l'INSEE de Clermont, nous avons fini par avoir une réponse des comptables nationaux de l'INSEE : ils reconnaissent que "la PIB n'est pas le bon critère" (sic) !!!! Une variation non négligeable de l'investissement peut donc provoquer des variations sensibles de la valeur du PIB.
Mais la différence que tu soulèves vient principalement de (me semble t-il) de ce que dans le PIB sont inclus les impôts et taxes

Enfin, un petit détail ... L'investissement "collectif" ... celui des administrations (FBCF : la Formation Brute de Capital Fixe : Écoles, hôpitaux, infrastructures de transport et de communication..., l'acquisition de terrains... ) est de 3,3% du PIB (#1700 Md€ en 2005) soit 56 Md€
.. ceci d'ailleurs représente l'effort collectif pour la construction de la France du "futur" et c'est aussi une justification de l'emprunt (le "déficit" est légèrement inférieur à ce montant) puisque ces sommes empruntées le sont pour les générations qui viennent .. s'il faut les rembourser c'est un peu "normal" que ce soient elles qui le fassent ...
Remarquons qu'une entreprise ou un ménage empruntent pour s'équiper et personne ne leur reproche, or, collectivement, nous ne sommes emprunteurs que de 10% de notre "capital" ... mais bon, je ne veux pas relancer le débat sur les déficit et la "culpabilisation" que le gouvernement essaye de nous faire porter sur ce sujet ;)

Re: PIB, niveau de vie et intensité énergétique

Publié : 17 juil. 2006, 07:39
par AJH
GillesH38 a écrit :
Oui mais voila.... il existe un autre indicateur , le niveau de vie moyen, défini par le revenu net annuel apres impots divisés par le nombre d'unité de consommation du ménage (les enfants comptant moins que les adultes).
....
Attention aussi .. les autres adultes du ménage comptent pour 0,5 après le premier qui compte pour 1

Un ménage avec deux enfants dont 1 moins de 14 ans, ca compte pour 2,3 pour en fait 4 personnes ... :roll:

Publié : 17 juil. 2006, 08:44
par GillesH38
oui, AJ, on peut contester tout cela, mais au moins les règles sont constantes d'une année sur l'autre. Ce qui m'intrigue, c'est juste que PIB et niveau de vie n'ont pas cru dans les memes proportions, autrement dit qu'il y a eu modificiation tendancielle du rapport entre les deux. Si on extrapole dans le futur ce type de croissance, le rapport (niveau de vie/habitants) / (PIB/habitants) tendrait vers zéro, ce qui me laisse un peu perplexe tout de même....

Publié : 17 juil. 2006, 08:58
par AJH
@GillesH38

Pas beaucoup le temps d'analyser en détail, mais le " niveau de vie " est égal au revenu disponible... (donc après impôts)
Si les impôts augmentent, le revenu disponible va diminuer, mais on bénéficiera d'une meilleure répartition sociale et donc "d'avantages en nature" qui ne sont pas comptabilisés dans le niveau de vie...

Mais tu as raison, il faudrait analyser cela .. je prévois de m'en occuper entre 92 et 94 ans ;)

Edit: ce que je veux dire c'est que le PIB peut augmenter et le revenu disponible diminuer tout en laissant plus de confort à la population (je ne dis pas que nous sommes pour autant arrivés à résoudre au mieux cette équation...)

Publié : 17 juil. 2006, 10:26
par Tiennel
Effectivement, le niveau de vie est un meilleur indicateur de développement d'une société que le PIB. Celui-ci est notamment affecté par l'activité financière : dans son calcul entrent toutes les plus-values mobilières et immobilières réalisées sur le sol national. C'est pour cela, par exemple, que le Royaume-Uni affiche l'un des plus forts PIB d'Europe alors que le niveau de vie apparent est tout à fait dans la moyenne européenne.
La bulle immobilière est actuellement l'un des plus gros contributeurs du PIB pour de nombreux pays de l'OCDE : mais ce n'est pas parce que le prix des maisons flambent que le niveau de vie s'améliore... bien au contraire !

Publié : 17 juil. 2006, 11:12
par AJH
Tiennel a écrit :Effectivement, le niveau de vie est un meilleur indicateur de développement d'une société que le PIB.
Je ne suis pas trop d'accord sur cette phrase pour les raisons expliquées dans mon précédent message ;)
Mais de toute façon ni l'un ni l'autre ne me semblent de bons indicateurs "de développement d'une société"

Publié : 28 août 2006, 15:49
par Environnement2100
Retour sur le sujet initial du fil, les déclarations ci-dessous démontrent que le couplage PIB - intensité énergétique est malléable. C'est exactement ce qui nous attend pendant la période "plateau ondulé".
François Loos a écrit : François Loos, ministre délégué à l'Industrie, a présenté la situation énergétique de la France au vu des résultats du bilan et de la facture énergétique de 2005. Le ministre se réjouit des progrès de l'efficacité énergétique et de la stabilité de la consommation d'énergie. L'origine de ce progrès réside dans des modifications de comportement : les économies d'énergie sont encouragées par les nombreuses mesures incitatives, notamment fiscales prises par le Gouvernement et sans doute influencées par la hausse des prix du pétrole. Ces économies constatées nous rapprochent de l'objectif de la loi de programme du 13 juillet 2005, soit une réduction de - 2% de l'intensité énergétique par an d'ici 2015.

Les principales caractéristiques de la situation de 2005 sont les suivantes :

- La consommation totale d'énergie primaire s'élève à 276,5 Mtep, en croissance de seulement +0,3% (contre +1,0% en 2004), donc en net retrait par rapport au PIB (+1,4%). Le « bouquet » énergétique primaire de la France comprend 41% d'électricité nucléaire, un tiers de pétrole, 15% de gaz, 5% de charbon, 5% d'énergies renouvelables thermiques et de déchets (bois, biocarburants, ordures ménagères,...), 2% d'hydraulique et d'éolien. Ce bouquet énergétique n'est d'origine fossile, donc à base de carbone, qu'à hauteur de 53%, alors que cette part avoisine 80% pour la moyenne européenne (voir schéma p.3)

- L'intensité énergétique de la France baisse sensiblement, de -1,6% pour l'énergie finale, (directement achetée par le consommateur) encore mieux qu'en 2004 (-1,4%). []La consommation d'énergie finale baisse dans tous les secteurs d'activité (-0,6% pour l'industrie, -2,7% pour l'agriculture, -0,8% pour les transports), sauf dans le résidentiel tertiaire (+0,6%).
http://www.industrie.gouv.fr/liste_index/index_bil.htm

Publié : 28 août 2006, 18:12
par Environnement2100
Les fonctionnaires français ont décidément beaucoup de ressources : le schéma ci-dessous montre bien que :
- l'intensité énergétique est bien une préoccupation réelle
- elle diminue assez régulièrement depuis un certain nombre d'années
- cette diminution ne coïncide pas vraiment avec les deux chocs pétroliers : il me semble que c'est surtout la délocalisation progressive des industries gourmandes en énergie qui améliore notre résultat
- la courbe ne paraît pas asymptotique pour l'instant, ce qui est de bon augure pour la suite des événements, même si le -2 %/an paraît optimiste.

Image

Publié : 28 août 2006, 20:03
par fabinoo
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Publié : 28 août 2006, 20:21
par Environnement2100
fabinoo a écrit :
il me semble que c'est surtout la délocalisation progressive des industries gourmandes en énergie qui améliore notre résultat
Auquel cas on ne peut pas considérer qu'il y ait une amélioration.
Justement si : comme je le répète assez souvent, le PIB, c'est le PIB. Si tu veux t'intéresser à d'autres indicateurs, pourquoi pas ; mais c'est une autre discussion et un autre fil :).

Publié : 28 août 2006, 21:08
par fabinoo
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