Re: [Véhicule électrique] la question des batteries
Publié : 01 mai 2021, 10:14
https://www.msn.com/fr-fr/finance/other ... d=msedgntpPourquoi la mort du véhicule thermique pourrait arriver plus tôt que prévu, vers 2030
Alain-Gabriel Verdevoye 30 avril 2021
Directeur général du consortium de Saft et Stellantis qui fabriquera des batteries fin 2023 en France, Yann Vincent prédit la fin précoce du véhicule à essence et diesel. Mais l'électrification ne se fera pas, selon lui, au seul bénéfice de l'Asie. Il prévoit que 80% des batteries pour le Vieux continent seront européennes vers 2030.
L’Airbus des batteries ? Une utopie ? L’Europe et notamment la France réussiront-elles à s’extraire de la très dangereuse dépendance vis-à-vis des grands spécialistes asiatiques, qui aujourd’hui tiennent le haut du pavé de la voiture électrique ? "Oui, l’Europe doit y arriver", veut croire Yann Vincent. Cet ancien de Renault et PSA est aujourd’hui le directeur général d’ACC, le consortium de Saft (Total) et Stellantis, qui va commencer à produire des batteries pour véhicules "fin 2023 à côté du site de moteurs Stellantis à Douvrin (Pas-de-Calais) puis à Kaiserslautern (Allemagne) fin 2025". Avec des capacités chacune de 500.000 unités annuelles en 2030. Et, "devant la demande potentielle, on réfléchit à une augmentation des cadences". Premier client : Stellantis. Mais "on discute avec tous les constructeurs européens, dont Renault et les Allemands. On arrivera à conclure avec certains d’entre eux."
Un saut technologique très important
"Nous bénéficions d’une très grande expérience de Saft (Total) dans le produit et d’une très grande expertise de la fabrication de masse à fortes cadences de Stellantis (PSA et Fiat Chrysler)", explique Yann Vincent. "C’est une technologie évolutive. Nous arriverons donc avec les dernières technologies, avec l’avantage très net d’un produit fabriqué en France et en Allemagne, car transporter des batteries coûte très cher avec une empreinte CO2 forte", pointe Yann Vincent. Ces Européens, qui ont tout à créer aujourd’hui, seront-ils au rendez-vous de la prochaine révolution technologique des batteries, avec l’avènement des batteries solides "vers 2025-2030" ? Ces batteries permettront "un saut technologique très important. Le risque sécuritaire disparaîtra, ce qui permettra de simplifier les packs de batteries, les alléger". ACC affirme avoir déjà "commencé à y travailler. On a récupéré les partenariats déjà engagés par Saft, comme avec le CEA. On s’appuie aussi sur le savoir-faire des chimistes européens comme BASF, Solvay… ".
"Fin 2019, l’Europe a compris que la transition énergétique rendait nécessaire de créer une industrie de batteries, qui représentent 40% du coût d’un véhicule électrique". ACC a ainsi obtenu des aides massives, "un peu inférieure à 1,3 milliard d’euros". Le projet ACC fait en effet partie des programmes phares des batteries promus par les Etats, les collectivités locales. L’enjeu est crucial. "Il y a un an, les constructeurs anticipaient une part de marché inférieure à 50% en Europe pour les véhicules électrifiés à horizon 2030. Sous le coup des décisions politiques de proscrire les moteurs thermiques, certains annoncent aujourd’hui plus de 70% de pénétration. Dans les mois qui viennent, on annoncera que les modèles électrifiés représenteront 75-80% du marché européen", souligne Yann Vincent. "La mort du véhicule thermique arrivera plus tôt que prévu, autour des années 2030".
Aspect stratégique des matières premières
Aujourd’hui balbutiant, le marché mondial des batteries va donc exploser. Pour le plus grand profit, dans un premier temps, des chinois CATL et BYD, le japonais Panasonic, les coréens LG-Chem et Samsung SDI, qui monopolisent les trois quarts de l’offre mondiale, selon le Center Automotive Research. Avec des commandes très lucratives au vu de l’explosion de la demande. A l’horizon 2028, ces cinq acteurs demeureraient dans le Top-5, d’après Benchmark Minerals Intelligence. Mais rien n’est inéluctable, estime Yann Vincent. En 2030, "on aura beaucoup de projets européens dans les batteries et, du coup, au moins 80% des besoins de l’industrie automobile seront satisfaits".
Reste l’aspect stratégique des matières premières. Si chaque batterie de smartphone contient de 2 à 3 grammes de lithium, une batterie de véhicule électrique en demande plus de 20 kilogrammes. Les sociétés chinoises Ganfeng et Tianqi contrôlent respectivement 17 % et 12 % de la production mondiale de lithium, grâce en particulier à leurs investissements dans les mines en Australie et en Amérique du Sud, selon l’agence Bloomberg. BMW a d’ailleurs signé fin 2019 un contrat de 540 millions d’euros sur cinq ans avec Ganfeng pour son approvisionnement. Et ce, quelques mois après l’accord sur dix ans passé par Volkswagen. Les firmes chinoises contrôlent par ailleurs la moitié au moins de la production de cobalt de la République populaire du Congo, laquelle génère 70 % de la production mondiale, toujours selon Bloomberg. La Chine dispose aussi de 80 % des capacités mondiales de raffinage de ce minerai, indispensable aux batteries (de 5 à une dizaine de kilogrammes).
Mais Yann Vincent parie beaucoup sur le recyclage pour assurer une certaine indépendance européenne. "On devrait pouvoir recycler 95% des composants". Si le coût des matières premières demeure élevé ou croît, "le recyclage sera alors viable économiquement. Du coup, les matériaux issus du recyclage serviront de matière première". Il n’en reste pas mois que, aujourd’hui, la voiture électrique ou hybride rechargeable européenne dépend fortement de l’étranger et notamment de la Chine !