Lancement de la filiére E85 en France / E10

Ce forum ne traite pas du «grand jeu» mais des réactions plus locales au pic pétrolier, à l'échelle du pays, des régions, ou des villes.

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Message par rico » 27 sept. 2006, 15:05

Je pense finalement que le capitalisme ne peut exister sans pétrole ou à défaut sans une énergie universelle abondante.

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Message par Environnement2100 » 27 sept. 2006, 15:27

Les extra-terrestres sont-ils capitalistes ?
Trop de mépris entraîne des méprises - Phyvette, ca 2007.

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Message par Cassandre » 27 sept. 2006, 15:45

SETI a dit « il faut trouver la voie, c'est pour ça que je dois vous couper la tête… » :-D
regarder Oléocène
« No fate but what we make » (Sarah) « If you're listening to this, you are the resistence. » (John)

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Message par GillesH38 » 27 sept. 2006, 16:06

je dirai même que le capitalisme ne peut pas exister de manière viable sans croissance économique, et que la croissance économique continue réclame des sources croissantes d'énergie. Après le passage du pic , il y aura toujours de l'énergie assez abondante, mais décroissante : la question de la survie du système économico-financier pendant des décennies de décroissance mérite qu'on s'y attarde....
Zan, zendegi, azadi. Il parait que " je propage la haine du Hamas".

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Message par Alter Egaux » 27 sept. 2006, 16:17

rico a écrit :Je pense finalement que le capitalisme ne peut exister sans pétrole ou à défaut sans une énergie universelle abondante.
Probablement dans sa forme actuelle. Et encore, le capitalisme sauvage a aussi existé au départ de la révolution industrielle.
Et puis, cela n'empêche pas non plus les idéologies dévastatrices de civilisation comme l'impérialisme.

Disons juste que le capitalisme est une bulle, lorsqu'il n'est pas maîtrisé. La bulle éclate de temps en temps, comme en 1929.

Mais rico,tu as probablement raison sur une chose : il est possible qu’une société qui développe des esclaves humains ou énergétiques poussent vers des stratégies prédatrices, donc destructrices (civilisation, biosphère, etc…).
Etape n°1 : Les africains nomment le pétrole : la "merde" du diable.
Etape n°2 : Restons cool, le PO arrive...
Etape n°3 : "Mais à cet endroit, en ce moment, l'humanité, c'est nous, que cela nous plaise ou non", Samuel Beckett

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Message par cosoli » 27 sept. 2006, 23:48

pour en revenir au sujet de ce fil il a été annoncé ce jour que le prix à la pompe du bioéthanol serait de 0.80E.
Ce carburant va donc venir concurrencer le gasoil .

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Message par phyvette » 27 sept. 2006, 23:54

cosoli a écrit :pour en revenir au sujet de ce fil il a été annoncé ce jour que le prix à la pompe du bioéthanol serait de 0.80E.
Ce carburant va donc venir concurrencer le gasoil .
Non , comme on consomme 30% de plus 0.80€x30%=1.04€ équivalent mazout.

Quel est le prix du jour Quelqu'un a fait le plein de gasoil aujourdhui.

Phyvette
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Message par Tiennel » 28 sept. 2006, 00:01

Avec dix pompes en moyenne dans chaque département, je suis curieux de savoir combien de voitures Flexfuel vont être vendues en 2007.
Méfiez-vous des biais cognitifs

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Message par Oilive » 28 sept. 2006, 12:10

Tiennel a écrit :Avec dix pompes en moyenne dans chaque département, je suis curieux de savoir combien de voitures Flexfuel vont être vendues en 2007.
:-D Souvenez-vous du GPL...

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Message par nelson62 » 28 sept. 2006, 14:06

Voici un article pour alimenter la réflexion.
Trouvé suryahoo(source:http://fr.news.yahoo.com/26092006/202/l ... ndial.html) et vu au journal de 13h de france 2.
La France accélère sur les biocarburants juste avant le Mondial de l'auto
Par Fabien ZAMORA

PARIS (AFP) - Le gouvernement français mettra en place des pompes à essence vertes fournissant du biocarburant dès 2007, affichant une politique très volontariste à quelques jours du Mondial de l'automobile de Paris.
Le ministre de l'Economie Thierry Breton a reçu mardi des mains d'Alain Prost le rapport "Flexfuel 2010" concernant la généralisation en France de l'usage d'un biocarburant, l'E85. L'E85 est un carburant comprenant 85% d'éthanol et 15% d'essence.

Photo
agrandir la photo

L'ancien champion de Formule 1 puis le ministre ont annoncé qu'ils espéraient voir 500 de ces pompes vertes installées en France en 2007. "Et ce pourrait être plus", a déclaré le ministre. Il y a au total un peu plus de 13.000 pompes en France.
Concernant le prix de l'E85, M. Breton a déclaré à France 2 qu'il "pourrait se situer autour de 0,80 euro au litre", soit au kilomètre, "assez proche du prix du gazole", compte tenu du rendement énergétique moindre de l'éthanol par rapport à l'essence.

"Je souhaite que le gouvernement soutienne sans réserve le lancement de ce nouveau carburant dans l'intérêt du pouvoir d'achat des Français, de notre indépendance énergétique, et de nos filières industrielles", a dit le ministre. L'ensemble des mesures seront regroupées dans une charte.

Il a notamment assuré que le gouvernement n'entraverait pas le développement de l'E85 par la fiscalité. "La volonté du gouvernement sera clairement d'avoir une taxation minimale", a-t-il déclaré. Des mesures fiscales devraient être annoncées dans les prochains jours.

"Les biocarburants permettent de lutter efficacement contre l'effet de serre", a rappelé le ministre de l'Agriculture Dominique Bussereau. "La France était le mauvais élève de l'Europe" en biocarburants, a-t-il ajouté, affirmant que le programme gouvernemental allait la propulser au delà des impératifs européens.

"Dans quelques jours, c'est le salon de l'automobile, tous les constructeurs auront des voitures flex sur leurs stands", selon M. Breton, qui s'est entretenu notamment avec les dirigeants de Renault et de PSA, Carlos Ghosn et Jean-Martin Folz.

"Renault a indiqué que dès 2009, 50% de la production de sa flotte de véhicule serait flex", a déclaré M. Breton.

Alain Prost a précisé que la généralisation du flex était "d'une facilité déconcertante pour les constructeurs". Il a ajouté que Ford, Saab et Volvo étaient aussi parties prenantes.

"La filière agricole va encore faire des progrès, accroître sa compétitivité, les prix de fabrication de l'éthanol vont baisser au fur et à mesure que la production va augmenter", a prédit M. Breton.

"C'est une annonce qui réjouit les agriculteurs", a déclaré à l'AFP Philippe Pinta, président de l'association générale des producteurs de blé (AGPB).

Les industries pétrolières ont assuré ne pas avoir de réserves sur le projet. "Nous n'avons pas de réserves, mais économiquement, cela va être relativement coûteux, soit au niveau de la défiscalisation, soit des coûts associés", selon le délégué général de l'Union française des industries pétrolières (UFIP), Jean-Louis Schilansky.

M. Breton voit aussi dans l'E85 une menace pour la toute puissance de l'Opep, qui contrôle 40% du marché du pétrole, puisque les consommateurs "pourront choisir indifféremment" de mettre de l'E85 ou du carburant classique dans leur voiture.
On voit ici le mythe des biocarburants-qui-sauveront-l'industrie-automobile... :smt005
J'aime bien aussi la façon dont ils annoncent que ça va être assez cher: finalement, c'est peut-être une excuse pour nous faire payer le prix fort des biocarburants.. :evil:
Sans pétrole la fête est plus folle!!

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Message par Schlumpf » 28 sept. 2006, 21:15

le parallèle avec le GPL (un échec assez notoire, somme toute) est peut-être pertinent... Reste à voir comment le pétrole évoluera (son coût a été il faut bien le dire la base de la déconfiture du GPL). Qui vivra verra...

Sinon, en ce qui concerne les poncifs gouvernementaux...
L'Homo sapiens se conjugue à la première personne du présent irresponsable...

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Message par Faucille » 29 sept. 2006, 12:21

On appelle ça l"'Ethanol Breton".....à ne pas confondre avec le chien.... :-D :-D

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Lancement de la filiére E85 en France

Message par Devenson » 29 sept. 2006, 18:41

Le communiqué de presse (1) du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie présente les principales conclusions du rapport "Prost" sur le "flex fuel". Suite à ce rapport, Le ministre T. Breton annonce une politique volontariste pour "soutenir sans réserve le développement de ce nouveau carburant". Or, certaines affirmations de ce rapport peuvent être contestées, ce qui pourrait remettre en question le bien-fondé de cette nouvelle politique.

Contrairement à ce qui est parfois affirmé, le bio-éthanol n'est pas un carburant complètement "propre et respectueux de l'environnement". L'ensemble des processus de fabrication utilise une certaine quantité d'énergie, énergie très majoritairement d'origine fossile. Il importe donc d'évaluer soigneusement le bilan énergétique du bio-éthanol en termes de combustibles fossiles et donc les émissions de gaz à effet de serre qui en découlent.

Puisque le rapport Prost affirme "L’E85 contribue très puissamment à la lutte contre l’effet de serre", j'imagine qu'il reprend les conclusions de l'étude "ADEME/PWC/DIREME 2002 (2). Or ces conclusions sont fortement contestables (par exemple dans la note du Réseau-Action-Climat (3).
Lorsque Price-Waterhouse-Cooper, l'auteur de l'étude Adème, effectue un travail similaire pour un organisme public belge, les résultats sont nettement inférieurs. Il faut noter que le comité de pilotage de l'étude Adème était composé majoritairement de producteurs et industriels du sucre, de la betterave et des biocarburants. Il n'est pas question de mettre en doute leur honnêteté, mais on sait que ce genre de situation conduit fréquemment à des biais inconscients.

En ce qui concerne le bilan énergétique, J.M. Jancovici (4) donne une valeur de 0.8 pour la betterave et de de 0.97 pour le blé (sans valorisation des co-produits). Cela signifie qu'il faut fournir .8 unités d'énergie (essentiellement d'origine fossile) pour obtenir 1 unité d'énergie sour forme d'éthanol.
L'USDA (Département de l'agriculture des Etats-unis) donne 0.91 ou 0.78 pour l'éthanol de maïs selon que l'on valorise ou non les co-produits.
D. Pimentel estime que le bilan est toujours négatif : il faut fournir plus d'énergie lors de la fabrication de l'éthanol que celui-ci n'en contient finalement (5). Cette étude a été critiquée, mais, contrairement à l'Etude Adème, a été publiée dans une revue à comité de lecture.
Lorsque les experts de la commission Européenne établissent un rapport (6) sur le sujet et colligent les différents études sur les biocarburants Européens, l'étude Adème ressort comme systématiquement optimiste. Pour le pourcentage de réduction des l'émissions de gaz à effet de serre dus à l'éthanol par rapport aux combustibles fossiles, ses valeurs sont toujours supérieures à la borne haute des fourchettes de toutes les autres études.
Leur conclusion est à peu près la suivante : "bien que quelques observations soient négatives, il semble clair que le bilan des biocarburants en termes d'émission de gaz à effet de serre est positif. Mais le niveau d'incertitude est tel (30-40 points de pourcentage) qu'on ne peut rien dire de définitif sur le niveau réel de gaz à effet de serre économisés".

Pour leurs scénarios, il utilisent par la suite la valeur de 0.66 : pour chaque unité d'équivalement-pétrole en éthanol, il a fallu fournir 2/3 d'unité d'équivalent-pétrole en énergie d'origine fossile.

Le moins que l'on puisse dire est qu'il y a une grande incertitude pour cette valeur cruciale. J'adopterai par la suite la valeur plutôt optimiste du rapport Européen de 2/3.

D'après l'étude Adème 2002, 20% des combustibles fossiles utilisés dans la fabrication de l'éthanol le sont lors de la culture de la betterave, 80% l'étant lors des procédés industriels de transformation. Les premiers 20% le sont principalement sous forme d'engrais (gaz naturel). Les 80% de la phase industrielle sont principalement de l'énergie dont on suppose qu'elle est également fournie par du gaz naturel. Un peu de pétrole et d'électricité sont également utilisés, mais on peut considérer que l'énergie fossible dans ces procédés se compose le plus souvent de gaz naturel. Or, le gaz naturel est l'énergie fossible qui émet le moins de gaz à effet de serre. Avec les problèmes croissants de prix et de disponibilité du gaz naturel aux Etats-unis, en Europe et en Asie, les producteurs d'éthanol utilisent et utiliseront sans doute de plus en plus l'énergie abondante et bon marché que constitue le charbon. C'est déjà le cas de façon croissante aux Etats-unis (7) et très certainement en Chine. Le charbon émet deux fois plus de gaz à effet de serre que le gaz naturel.

Les affirmations du Rapport Prost.
1. Le rapport confirme que le Flex Fuel est une chance pour notre pays et pour nos concitoyens :
– De nombreux pays vivent déjà à l’heure du Flex Fuel.
Seuls les Etats-Unis (4.5 millions de véhicules) et le Brésil (entre 3 et 4 millions de véhicules) ont une flotte conséquente de véhicules équipés en flex fuel. La Suède en possède quelques dizaines de milliers. Au Brésil, du fait de l'origine de l'éthanol (canne à sucre), les bénéfices en termes d'économie d'énergie d'origine fossile et d'émission de gaz à effet de serre sont réels.
Les Etats-unis possèdent plusieurs millions de véhicule flex fuel (8), ... mais ces véhicules ne roulent pratiquement qu'avec de l'essence : seule une station service sur 300 délivre du E85 aux Etats-unis (aucune station dans tout l'Etat de Floride à fin 2005). Il se trouve que les véhicules flex fuel permettent d'abaisser la consommation moyenne en essence des voitures fabriquées par les constructeurs et de répondre ainsi aux obligations légales (CAFE). En effet, n'entre dans les calculs pour les véhicules pouvant utiliser de l'E85 que la partie essence : 15% ! C'est la raison qui a permis aux constructeurs américains de proposer des SUV très peu économes tout en respectant les normes de consommation.
Affirmer : "De nombreux pays vivent déjà à l’heure du Flex Fuel" semble être pour le moins exagéré.
– C’est une chance pour les automobilistes qui feront le choix d’acquérir des véhicules à carburation modulable « Flex Fuel » : protégés des chocs pétroliers grâce à une souplesse totale d’arbitrage, ils ne peuvent être que gagnants.
Le prix de revient réel de l'éthanol est supérieur à celui des carburants d'origine fossile. Une étude de l'agence américaine de l'énergie évalue le prix de fabrication de l'éthanol d'origine betterave à 120$ le baril (9). En Europe, le prix d'un litre équivalent essence d'éthanol est de 0.75 euros (14). Aux Etats-unis (Nebraska), le prix l'éthanol n'a jamais été inférieur à celui de l'essence au cours des 23 dernières années (10), y compris lors des hausses récentes du prix du baril. Rappelons que, bien que nous payions le baril de pétrole 60$, son prix de revient réel est le plus souvent compris entre 1 et 20$. Puisque les 2/3 de l'énergie d'un baril d'éthanol proviennent du gaz naturel - dont le prix est indexé sur celui du pétrole, il semble illusoire de penser que des prix du pétrole pourraient un jour dépasser significativement celui de l'éthanol. L'automobiliste sera donc "protégé des chocs pétroliers" tant que le gouvernement et sa politique de taxes le décideront et non grâce à une quelconque indépendance de l'éthanol vis à vis des prix de l'énergie fossile. Bien entendu, cet argument deviendra caduque au fur et à mesure que le charbon (bien moins coûteux) prendra la place du gaz naturel.
– C’est une chance pour la facture énergétique et la balance commerciale : l’éthanol produit sur notre territoire se substitue à des hydrocarbures importés.
Les 2/3 de l'énergie (d'origine fossile) contenue dans un baril d'éthanol devront cependant être importés. Actuellement cette énergie est majoritairement composée d'hydrocarbures (gaz et pétrole). A plus long terme doivent également se poser 2 questions :
- si le territoire est couvert de pompes E85, ne faudra-t-il pas importer de l'éthanol (du Brésil puis de nombreux pays en développement qui orientent actuellement leur agriculture en ce sens) pour les remplir ?
- ne risque-t-on pas d'être amené, selon les circonstances, à importer la matière première (céréales ou betterave) pour nourrir les usines d'éthanol ?
– C’est une chance dans le rapport de force global avec les pays producteurs de pétrole.
Certainement, mais c'est une malchance pour nos rapports de force globaux avec les producteurs de gaz naturel (qui d'ailleurs sont souvent les mêmes).
– Les constructeurs automobiles, y compris français, maîtrisent la technologie.
– L’E85 contribue très puissamment à la lutte contre l’effet de serre.
Que veut dire "très puissamment" ? Aux Etats-unis, on estime que la production d'éthanol de céréales permet d'émettre d'environ 12 à 25% de gaz à effet de serre en moins par rapport à l'essence. Le rapport Européen déjà cité ne se permet pas de donner de valeur chiffrée, estimant par contre indispensable de monitorer les émissions réelles des processus de fabrication de l'éthanol. Le chiffre de 75% de réduction du rapport "Adème 2002" semble donc totalement irréaliste. A ce sujet, il est malheureux que les experts qui sont en charge de préparer les politiques du pays semblent accepter ces chiffres sans aucune critique. Dans le rapport Douaud "Recommandations pour un développement durable des Biocarburants en France" (14), on lit "On retiendra qu'une combustion de l'éthanol permet de diviser l'émission de CO2 d'origine fossile par un facteur de 3 à 7".
Dans le meilleur des cas, le bio-éthanol contribue en effet "un peu" ou "modérément" à la lutte contre l'effet de serre. Mais si les 80% de l'énergie fossile utilisée lors des processus industriels proviennent du charbon, utiliser du bio-éthanol émettra plus de gaz à effet de serre que le pétrole lui même. Il est même possible d'utiliser du charbon sans le savoir ! En effet, il semblerait (11) que la production Russe de gaz naturel ne soit pas suffisante pour répondre à la fois à la demande intérieure et à la demande extérieure. L'option choisie dans les années à venir serait de privilégier l'usage du gas-oil et surtout du charbon, aussi bien pour la génération d'électricité que pour les utilisations domestiques. Cette stratégie permettrait à la Russie de maintenir et éventuellement d'augmenter le niveau de ses exportations de gaz naturel.
– Ce nouveau débouché énergétique est une chance pour l’agriculture et l’agro-industrie françaises qui ont les capacités mobilisables pour produire l’éthanol nécessaire à l’essor de cette filière.

C'est certainement une chance pour un certain type d'agriculture et évidemment une aubaine pour l'agro-industrie française. Le terme d'essor est ambigü. L'agro-industrie peut certainement augmenter substantiellement la production d'éthanol dans les années à venir, mais certainement pas au point de justifier des pompes "Breton" dans toutes les stations-services. Les calculs de surfaces agricoles nécessaires faits par J.M. Jancovici (4) en France et R. Rapier (12) aux Etats-unis le montrent nettement.
– C’est une chance pour la croissance et pour l’emploi : le développement de cette filière engendrera des investissements importants et des créations d’emplois dans la production d’éthanol, la distribution de carburant et l’industrie automobile.
C'est également très vraisemblable.

Abandonnons un instant la naïveté de croire que les experts du gouvernement sont moins experts que quelques obscurs citoyens ne disposant que d'un accès internet pour leur information. Tout ce que je viens d'évoquer est certainement parfaitement connu.

Il faut être très clair. L'éthanol est effectivement un carburant de substitution à l'essence efficace et d'un ordre de grandeur non négligeable. Chaque fois que l'on fabrique une unité d'équivalent pétrole sous forme d'éthanol, on économise effectivement au moins une unité d'équivalent pétrole de pétrole brut. Il est illusoire de vouloir remplacer toute l'essence et le diésel par des biocarburants, mais un objectif de 5 à 10% est certainement possible. Si cet effort était réalisé dans le monde entier, cela atténuérait sensiblement les chocs du pic pétrolier (ou de "l'après pétrole selon la terminologie officielle").

Lors d'un débat récent (13) entre un critique de la politique de l'E85 aux Etats-unis et un partisan (V. Khosla, magnat de l'informatique et grand défenseur des biocarburants, secteur dans lequel il investit significativement), la conclusion des 2 parties a été que cette politique ne se justifiait aucunement dans l'état actuel de la technologie. C'est à dire que l'E85 n'offrait pas d'avantage environnemental significatif, n'économisait que peu de combustibles fossiles et ne pourrait jamais remplacer plus de 10% des carburants utilisés aux Etats-unis.
Alors pourquoi alors ne pas utiliser du E3, du E5 ou du E10 que l'on peut aisément distribuer dans les pompes classiques ? Le rapport Douaud déjà cité se prononce d'ailleurs dans ce sens et nettement contre le déploiement du E85 pour plusieurs raisons logiques et techniques. Mais il semble que certains, comme V. Khosla, ont la conviction que les bio-éthanols de 2ème génération pourront remplacer l'éthanol de première génération ou s'y ajouter. Il serait donc nécessaire de "lancer la machine" pour stimuler la recherche, les investissements et créer les infrastructures. C'est un pari audacieux. Bien que les recherches en ce sens (éthanol cellulosique par exemple) soient conduites depuis des dizaines d'années, aucune technique n'a montré pour l'instant sa faisabilité en grandeur réelle. Mais une percée technologique est toujours possible. Et si ce facteur a joué dans sa décision, on ne peut pas reprocher à un ministre de prendre des risques. En 2010, les pompes "Breton" seront-elles ridiculisées ou admirées ?

Il est par ailleurs indéniable que ce plan stimulera l'emploi et aidera le secteur agro-industriel.

On comprend mieux alors pourquoi cette annonce est faite par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et non par le ministère de l'environnement. Ce dernier pourrait et devrait cependant poser quelques questions gênantes.
- Quel est le véritable impact environnemental du bio-éthanol en France ... et à l'étranger ? En ce qui concerne les gaz à effet de serre, l'équilibre des sols, une probable déforestation dans les pays tropicaux ?
- Comment contrôlera-t-on que l'énergie utilisée restera toujours du gaz naturel, énergie fossile la moins nocive ? Envisagera-t-on un jour d'utiliser principalement l'énergie électrique (donc d'origine nucléaire en France) ?
- Etant donné l'inquiétude croissante sur les capacités de production alimentaire au niveau mondial, quelle part des sols peut-on raisonnablement affecter aux biocarburants ?
- Pourquoi favorise-t-on tant le bio-éthanol, alors que les biodiésels semblent d'un plus grand intérêt environnemental ? D'autant plus qu'il y a en Europe un excédent d'essence par rapport au diésel. Et pourquoi négliger les huiles végétales pures fabriquées et utilisées localement par les agriculteurs, qui semblent être un excellent carburant de remplacement du diesel agricole ?

1 Communiqué de presse du ministère http://www.minefi.gouv.fr/presse/commun ... 609261.php
2 Rapport Adème 2002 http://www.ademe.fr/partenaires/agrice/ ... ues_fr.pdf
3 Note RCAAF http://ec.europa.eu/energy/res/legislat ... s/rcaf.pdf
4 J.M Jancovici http://www.manicore.com/documentation/carb_agri.html
5 Article D. Pimentel http://www.ingentaconnect.com/content/k ... .henrietta
6 Rapport Européen http://ec.europa.eu/agriculture/biomass ... 142_en.pdf
7 Flex fuel aux Etas-unis http://www.sptimes.com/2005/10/17/World ... e_an.shtml
8 Charbon pour la fabrication d'éthanol http://www.csmonitor.com/2006/0323/p01s01-sten.html
9 Prix de revient des biocarburants http://www.usda.gov/oce/reports/energy/ ... eport3.pdf
10 Prix de l'éthanol aux Etats-unis (Nebraska) http://www.neo.state.ne.us/statshtml/66.html
11Politique énergétique future de la Russie http://www.kommersant.com/page.asp?id=705782
12 Blog sur les Biocarburants de R. Rapier http://i-r-squared.blogspot.com/ http://i-r-squared.blogspot.com/2006/05 ... heels.html
13 Débat sur l'E85 aux USA http://www.theoildrum.com/story/2006/5/23/23846/0807
14 Rapport Douaud http://www.industrie.gouv.fr/energie/re ... civepe.pdf
Dernière modification par Devenson le 01 oct. 2006, 00:13, modifié 1 fois.

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Message par Schlumpf » 29 sept. 2006, 22:11

oui. Cette histoire du E85 qui tombe un peu comme un cheveu dans la soupe est surprenante. Juste pour completer par ce qui se passe Outre Rhin: tout a été misé sur le biodiesel, qui lui est beaucoup plus facilement utilisable (l'essentiel des diesels actuels l'accepte), permet d'utiliser les jachères plus correctement (le colza enrichit la terre alors que la betterave l'appauvrit) et puis finalement l'Europe est leader des diesels, non ? Pourquoi favoriser un carburant dont on se sait même pas fabriquer les moteurs (les trois modèles E85 disponibles sur le marche Fr sont des modèles étrangers) ?
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Message par Tiennel » 29 sept. 2006, 22:16

Ca sent le Chirac à plein nez, qui chercherait par exemple respecter un accord mystérieux passé avec Lula (pour fourguer des centrales nucléaires ? Des Rafales ?) pour que la France achète de l'éthanol brésilien.
Le fait que les constructeurs français disent que leurs voitures E85 sortiront en... 2007 signifie peut-être qu'ils s'attendent à une contre-mesure d'ici là ;-)

Très bon, ton papier, Devenson.
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