Maroc / énergie - environnement
Publié : 20 janv. 2007, 15:41

Les pertes annuelles seraient de plus de 80.000 ha au lieu de 31.000
La forêt marocaine est en danger. Selon les chiffres officiels, chaque année le pays perd 31 000 ha de forêts. Mais les experts estiment que ces données sont en deçà de la réalité. « La déforestation au Maroc serait de plus de 80 000 ha par an au lieu de 31 000 ha », indique une étude méditerranéenne publiée en 2005 par le cabinet CABI International. A ce rythme, la forêt nationale risque de disparaître dans cinquante ans. Le principal facteur de cette dégradation serait le bois de feu. « La collecte du bois de feu est le grand danger qui guette la forêt nationale.
Sa consommation annuelle est de 18,3 millions de mètres cubes dont 9,67 millions proviennent de la forêt, alors que celle-ci ne peut en donner que 3 millions », ajoute ce rapport. Conséquence de cette dégradation, l’érosion des bassins versants qui se traduit par l’envasement des barrages et l’avancement de la désertification. Pour sauver ce qui reste, l’Etat a élaboré une politique de reboisement, « mais son impact reste insuffisant pour maintenir un équilibre environnemental », expliquent les experts.
Devant ce déficit des ressources naturelles, certains responsables proposent de reboiser davantage. D’autres répondent que cela ne remplacera jamais la forêt perdue et restent attachés à l’idée de préserver celle-ci autant que possible. Car de nos jours, le constat est alarmant. Il suffit de faire un tour dans le Moyen Atlas, le Rif et d’autres régions encore, pour se rendre compte que les dégâts sont irréversibles. Par exemple, la disparition de la Maâmora entraînerait directement l’ensablement de Rabat et de Salé. Sans parler de la mort lente de l’arganier et du cèdre de l’Atlas, deux espèces endémiques au Maroc.
L’heure est grave et des mesures d’urgence sont à entreprendre. « Un pays sans forêt est un pays qui meurt. Il faut se mobiliser pour arrêter la destruction de nos ressources naturelles. Il y a des pays qui réussissent, il n’y a pas de raison que nous ne réussissions pas », lance Mohamed Ellatifi, président de Sylva-Monde, une association composée de professionnels de la forêt qui souhaitent eux aussi participer au débat sur la protection de la nature. Selon cette association, les populations qui vivent dans la forêt sont pauvres et tirent leurs principales ressources de la forêt.
« Pour atténuer la pression des villageois sur le couvert forestier, il faut développer des entreprises génératrices de revenus en zones rurales et réduire la demande de feu par l’utilisation des énergies renouvelables comme la promotion des fours solaires », ajoute cet ancien expert de l’Organisation mondiale de l’alimentation (FAO).
Voici donc pour les ruraux, qu’en est-il du côté des citadins ? Désormais, il faut faire un effort pour transformer la perception de la nature chez les Marocains. « Certains pensent encore que la forêt pousse toute seule et que cela ne sert à rien de la protéger. Il faut changer le comportement de nos citoyens », rappelle M. Ellatifi. Pour discuter plus en détail de ce sujet et dans le cadre de la célébration de la Journée mondiale de la forêt, Sylva-Monde prévoit d’organiser les 19, 20 et 21 mars prochain un séminaire international à la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales, route d’El Jadida, sur le thème « Forêt, société et développement durable ».
30% de l’énergie nationale
La forêt marocaine remplit un rôle économique important. Elle couvre les besoins du pays en bois d’œuvre et d’industrie à hauteur de 30 % (600.000 m3/an), contribue pour 30 % au bilan énergétique national (10.000.000 m3/an de bois de feu ou près de 4 millions de tonnes-équivalent pétrole). Par ailleurs, elle répond à 17 % des besoins alimentaires du cheptel national en fourrage, l’équivalent de près de 3 milliards de dirhams par an.
Quant à la planification nationale de ce secteur, signalons l’adoption 1970 par le gouvernement d’un Plan national de reboisement dont l’objectif à l’horizon 2000 était de reboiser 662.000 ha. Quelque 355.000 ha de reboisement pour la production, 150.000 ha réservés à la production et à la protection, 185.000 ha pour la protection et 7.000 ha à la récréation.