Lutte contre le réchauffement : un petit calcul

Discussions concernant les conséquences sur l'environnement de la course aux ressources.

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Devenson
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Lutte contre le réchauffement : un petit calcul

Message par Devenson » 04 mai 2005, 15:07

Il est très difficile d’assimiler ce que signifierait réellement d’agir efficacement contre le réchauffement climatique.

J’ai fait un rapide (corrigez-moi si j’ai fait une grossière erreur) petit calcul de coin de table pour montrer les ordres de grandeur en jeu.

J’utilise les chiffres cités sur le site de JM Jancovici http://www.manicore.com ainsi que ceux de l’Ademe : http://www.ademe.fr

Imaginons que l’on veuille lutter contre le réchauffement climatique en conservant un minimum de mobilité automobile.
Pour ne pas augmenter les gaz à effet de serre dans l’atmosphère (mais cela ne les diminuera pas), il faudrait que chaque terrien n’émette pas plus de 500kg d’équivalent CO2 par an.
L’alimentation semble indispensable à la survie (ce que semblent oublier parfois les enthousiastes des biocarburants). JM Jancovici estime que chaque membre de sa famille émet 200kg d’EqCO2 pour sa nourriture. Cette famille semble faire attention à consommer en émettant le moins possible d'EqCO2, mais divisons par 2 cette valeur, car nous verrons que notre sujet sera très peu actif. Il lui reste une allocation de 400kg d’EqCO2.

L’Ademe vient de publier son palmarès 2005 des voitures les plus propres. Prenons le grand gagnant, une Smart, dont les performances sont :
- puissance 30kw
- consommation moyenne 3.4l
- émission d’EqCO2 : 90 g par km (la moyenne des voitures française est de 150 g/km).

Avant d’acheter sa voiture, notre sujet devra pendant 3 ans ne plus émettre d’EqCO2. En effet, 500kg d’EqCO2 représentent le tiers de la fabrication d’une petite voiture (puisque la Smart est vraiment toute petite, je suppose qu’elle ne nécessite que 1200kg d’EqCO2).
S’il vit en France où une grande partie de l’énergie est d’origine nucléaire, il pourra peut-être mener une vie extrèmement frugale (un peu de chauffage, un peu de télévision, en supposant que les appareils sont dèjà amortis en EqCO2).
Dans la plupart des autres pays, il ne travaillera pas, ne se chauffera pas, n’achètera rien, ne consommera rien et ne se déplacera pas autrement qu’à pied ou en vélo (conservé de sa vie antérieure).

Une fois en possession de sa voiture, il pourra rouler 4500km (400/0.09) chaque année, tout en conservant bien sur le même mode de vie monacal (ou plus vraisemblablement purement végétatif).

On voit qu’il ne semble pas possible de résoudre le problème du réchauffement climatique sans modifier du tout au tout notre mode de vie et repenser complètement notre économie.

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Message par Jeuf » 04 mai 2005, 17:50

Bon, bien sûr il y a des erreurs. Il ne faut d'abord pas séparer l'agriculture de tout le reste.
à ce que j'ai compté, la famille Jancovici consomme beaucoup de viande (par rapport à ce qu'il est nécessaire pour conservevr une

bonne santé), et en changeant bien d'autres paramètre de l'agriculture, on fait bien moins que 100keC par personne.

Ne pas oublier que la voiture peut être partagé par plusieurs personnes (il y en a 30M en france aujourd'hui), donc les émissoin de

CO2 aussi...et qu'on peut reorganiser le territoire, en quelques décennies, pour avoir besoin de beaucoup moins de voitures.

"On voit qu’il ne semble pas possible de résoudre le problème du réchauffement climatique sans modifier du tout au tout notre

mode de vie et repenser complètement notre économie."
Exactement. Mais c'est possible. De faire consommer moins pour assurer l'essentiel. Sans devenir un monastère...

On peut aussi faire le calcul : quel mode de vie auront nous sans pétrole, juste avec les biocarburants...on peut faire au mieux

15Mtep de colza par an en france, alors qu'on brule actellement 90Mtep/an de pétrole.
j'ai essayé d'étudier ça, j'ai pas la solution (mais presque).
Dernière modification par Jeuf le 05 mai 2005, 20:51, modifié 1 fois.

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Message par Devenson » 05 mai 2005, 11:43

Le slogan de la lutte contre le réchauffement climatique est "Faisons vite, çà chauffe !".

Ce que je voulais montrer dans ce petit calcul absurbe, c'est qu'il n'est pas possible d'agir efficacement et vite. Soit, on lutte efficacement et maintenant contre le réchauffement climatique, soit on conserve certaine mobilité automobile individuelle, mais pas les deux.
Laissez croire que l'application de mesures indolores et peu coûteuses peut régler le problème est malhonnête.

Rejeter la faute sur les seuls Américains, alors que nous serions (Européens) vertueux, est hypocrite : nous émettons entre 4 et 7 fois plus de CO2 que nous ne devrions, les pauvres mesures que nous prenons permettent seulement d'augmenter ces émissions un peu moins vite, et parallèlement, nous nous bousculons pour encourager les chinois à polluer en leur vendant avions, voitures et centrales thermiques. De plus, et on relève rarement ce point, mais lorsque nous délocalisons notre production dans les pays émergents, nous délocalisons aussi la pollution, y compris les émissions de gaz à effet de serre. Et il faudrait parler aussi longuement du transport aérien (voir les files passionnantes sur l'aéronautique), un des plus gros émetteur.

Le seul intérêt du protocole de Kyoto est qu'il permet la sensibilisation du grand public au problème. Le diagnostic est impeccable, les conséquences envisagées sont possibles ou même probables, mais j'ai peur que le message sur les actions à prendre ne soit pas le bon.

De nombreuses mesures permettraient effectivement d'agir sur les émissions : isoler les habitations, utiliser des ampoules basse consommation, ne pas laisser les appareils en veille, conduire moins vite et plus en souplesse, pratiquer le covoiturage, plus utiliser les transports en communs, améliorer encore les performances des avions et des voitures, moins utiliser la climatisation, acheter plus de produits locaux, diminuer encore les émissions de l'industrie, etc...

J'entends souvent dire, "Ce ne sera peut-être pas suffisant, mais ce sera un pas dans la bonne direction". Je ne crois pas. Imaginons que nous prenions ces mesures relativement indolores. Dans 20 ou 30 ans, les gaz à effet de serre auront encore augmenté de façon très importante (démographie, croissance), d'autant plus qu'une partie du reste de l'humanité nous aura rattrapé. Le vrai problème surviendra alors : comment diviser encore par 2 ou par 3 nos émissions, ce qui signifiera persuader Chinois, Indiens et - on peut rêver - Africains d'abandonner ce qu'ils viennent juste d'acquérir ?

Mon opinion est donc que nous n'agiront jamais efficacement contre le réchauffement climatique, tout au moins volontairement. De plus, dès que le peakoil surviendra, le charbon redeviendra le roi et la cause sera entendue, sauf si la technologie peut miraculeusement venir à notre secours. J'aimerais bien avoir un avis scientifique sur la possibilité réelle de séquestration efficace de CO2 (2ème documentaire d'Arte). Je ne peux pas m'empêcher de penser que le problème serait simplement repoussé : lorsque l'on s'est aperçu que ce n'était pas très sain de garder le CO2 dans un espace confiné, on l'a rejeté dans l'atmosphère. Maintenant que cela semble poser problème, on veut le rejeter dans le sol ou dans les océans.

Ce pessimisme, c'est aussi le message en filigrane du premier documentaire d'Arte, qui s'intitulait "Climat, agir sans attendre". A ma surprise, l'action envisagée n'est absolument pas d'agir sur les causes, mais seulement de prévenir le plus efficacement possible les conséquences. J'essaierai de faire une petite critique de ces émissions, par ailleurs instructives.

Un petit mot sur les biocarburants. C'est un sujet de débat, mais je pense que dans le contexte de déplétion de pétrole et de gaz que envisageons ici, la priorité dans l'usage des terres devra être donnée à l'alimentation de la population mondiale. Les quelques analyses prospectives que j'ai pu lire font froid dans le dos : une agriculture "soutenable" ne pourrait plus nourrir les 6 milliards d'habitants. Les biocarburants (basés sur une agriculture "soutenable" ?) n'auront, à mon avis, qu'un intérêt transitoire ou de niche.

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Message par mahiahi » 05 mai 2005, 14:35

Il serait très intéressant d'arriver à calculer l'évolution de ces deux problèmes que sont le réchauffement et le pic pétrolier : à partir du moment où les combustibles carbonés deviendront rares et chers (après le pic, donc), les gens deviendront plus sobres... de force!
Personnellement, je doute que les populations arrivent à baisser leur pollution de leur plein gré!

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Message par nopasaran » 05 mai 2005, 19:12

mahiahi a écrit :Il serait très intéressant d'arriver à calculer l'évolution de ces deux problèmes que sont le réchauffement et le pic pétrolier : à partir du moment où les combustibles carbonés deviendront rares et chers (après le pic, donc), les gens deviendront plus sobres... de force!
Personnellement, je doute que les populations arrivent à baisser leur pollution de leur plein gré!
Il y a encore beaucoup de charbon à bruler après le pic pétrolier (le pic du charbon est beaucoup plus lointain). La Chine et les Etats Unis ont de grosses réserves et comptent bien les utiliser. Le pic pétrolier ne pourra que les inciter à le faire... Il ne reste qu'à espérer que les techniques pour piéger le CO2 produit par les centrales thermiques soient rapidement au point :roll:

Jancovici a étudié la question : http://www.manicore.com/documentation/s ... ssile.html

La conclusion est :

"En bref, si nous attendons la raréfaction des hydrocarbures pour faire baisser les émissions de CO2, nous risquons fort de cumuler les inconvénients de la pénurie dans un premier temps avec des dégâts climatiques majeurs ultérieusement (le paroxysme du changement est bien postérieur à la baisse des émissions), et d'une certaine manière nous sommes pile dans la mauvaise situation :

il reste assez d'hydrocarbures et de charbon pour nous permettre émettre de plus en plus de CO2 pendant tout le siècle à venir,

plus il en reste et plus nous risquons de fortes concentrations de CO2 dans l'atmosphère et donc un dérèglement majeur du climat,

mais il n'en reste pas assez pour être sûr que nous aurons à notre disposition l'énergie nécessaire pour parer aux éventuelles catastrophes dans quelques dizaines d'années (par exemple reconstruire de quoi nourrir et loger quelques milliard d'hommes si il faut migrer de manière massive) : avec un tel taux de croissance de 3% par an, il ne reste plus une goutte de pétrole, plus un litre de gaz et plus une cuiller à café de charbon en 2100."

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Message par mahiahi » 05 mai 2005, 19:41

nopasaran a écrit :
mahiahi a écrit :Il serait très intéressant d'arriver à calculer l'évolution de ces deux problèmes que sont le réchauffement et le pic pétrolier : à partir du moment où les combustibles carbonés deviendront rares et chers (après le pic, donc), les gens deviendront plus sobres... de force!
Personnellement, je doute que les populations arrivent à baisser leur pollution de leur plein gré!
Il y a encore beaucoup de charbon à bruler après le pic pétrolier (le pic du charbon est beaucoup plus lointain). La Chine et les Etats Unis ont de grosses réserves et comptent bien les utiliser. Le pic pétrolier ne pourra que les inciter à le faire... Il ne reste qu'à espérer que les techniques pour piéger le CO2 produit par les centrales thermiques soient rapidement au point :roll:

Jancovici a étudié la question : http://www.manicore.com/documentation/s ... ssile.html

La conclusion est :

"En bref, si nous attendons la raréfaction des hydrocarbures pour faire baisser les émissions de CO2, nous risquons fort de cumuler les inconvénients de la pénurie dans un premier temps avec des dégâts climatiques majeurs ultérieusement (le paroxysme du changement est bien postérieur à la baisse des émissions), et d'une certaine manière nous sommes pile dans la mauvaise situation :

il reste assez d'hydrocarbures et de charbon pour nous permettre émettre de plus en plus de CO2 pendant tout le siècle à venir,

plus il en reste et plus nous risquons de fortes concentrations de CO2 dans l'atmosphère et donc un dérèglement majeur du climat,

mais il n'en reste pas assez pour être sûr que nous aurons à notre disposition l'énergie nécessaire pour parer aux éventuelles catastrophes dans quelques dizaines d'années (par exemple reconstruire de quoi nourrir et loger quelques milliard d'hommes si il faut migrer de manière massive) : avec un tel taux de croissance de 3% par an, il ne reste plus une goutte de pétrole, plus un litre de gaz et plus une cuiller à café de charbon en 2100."
C'est pourquoi je parlais du moment où les combustibles carbonés (soit pétrole, gaz naturel, bitumes et autres hydrocarbures + charbon) seront rares et chers :-)

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Message par Devenson » 11 mai 2005, 10:44

Finalement, j'avais sans doute tort de douter de la volonté de l'humanité de s'attaquer sérieusement au problème du réchauffement climatique.

Alors que je me complaisais dans un pessimisme stérile, d'autres se retroussaient les manches et réfléchissaient utilement.

L'espoir renait donc et la solution est à portée de main (de pied ?) :

http://www.worldjumpday.org

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Message par Devenson » 10 juin 2005, 19:02

Honte à moi !
Il y avait effectivement une grossière erreur dans mon calcul ! Les émissions calculées par l'Ademe étaient en grammes de CO2 et non en équivalents-carbone. La smart permet alors de parcourir près de 15000 km (mais il faut toujours plusieurs années d'équivalents-carbone pour la construire).

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