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par SToNeD » 27 avr. 2006, 17:09
Reuters le 27/04/2006 15h44
Le marché des crédits carbone en chute libre
par Gérard Wynn
LONDRES/PARIS, 27 avril (Reuters) - La chute vertigineuse des prix des crédits d'émission de dioxyde de carbone (CER) européens se poursuit jeudi, menaçant la viabilité de ce nouveau marché, pièce maitresse des accords de Kyoto, disent les intervenants.
Les prix des crédits carbone en Europe ont perdu jusqu'à 50% de leur valeur à la suite de la publication par plusieurs pays - Pays-Bas, France, Espagne, Estonie et République Tchèque - de volumes d'émissions de CO2 nettement inférieurs aux attentes.
L'ampleur de cette surprise reflète en partie l'immaturité de ce marché, lancé en janvier 2005 et encore en gestation,
Aujourd'hui, il faudrait que les principaux pays qui n'ont pas encore publié leurs volumes d'émissions -- Royaume-Uni, Allemagne, Italie, Pologne et Portugal -- annoncent d'ici au 15 mai un besoin de crédits carbone de 36 millions de tonnes pour éviter un effondrement total des prix, estiment des traders.
"L'équilibre est précaire", commente Louis Redshaw, responsable des marchés environnementaux chez Barclays Capital. "L'ambiance est très tendue sur ce marché", ajoute-t-il.
"A moins de voir disparaître 40 millions de tonnes assez rapidement, ces certificats pourraient perdre toute valeur", renchérit un autre intervenant.
Les prix des crédits carbone, pour livraison en décembre, ont enfoncé le seuil de 14 euros jeudi matin sur le European Climate Exchange de Londres contre 31 euros la semaine dernière, après avoir vu leur valeur plus que tripler l'an dernier.
Sur le marché parisien Powernext, le prix des certificats de CO2 chute de 35% à 15,70 euros jeudi vers 15h30, alors qu'ils s'échangeaient à 24,30 euros la veille et à 28,80 lundi.
"C'est une très mauvaise nouvelle pour ce marché", commente James Emanuel, chef du Carbone Trading chez le broker CO2e.com.
"S'il existe un excédent (net de crédits carbone) il n'y a aucune incitation à réduire les émissions et les prix vont s'effondrer. Ils n'iront pas jusqu'à zéro, mais ils peuvent être ramenés au coût administratif de la participation au plan... ils peuvent tomber jusqu'à un euro, vous savez!", ajoute-t-il.
LES PRODUCTEURS D'ELECTRICITE EN PATISSENT
L'Union européen a fixé un plafond global pour les émissions de dioxyde de carbone de ses industries polluantes, tels que les producteurs d'énergie, et demande à chaque société de détenir un certificat pour chaque tonne d'émission.
Si les émissions sont inférieures au plafond, les sociétés peuvent vendre leur surplus de crédits carbone.
Sur les bourses européennes, le secteur des services collectifs est particulièrement exposé à la chute des prix des certificats de CO2, à la fois en raison de la baisse des prix de l'énergie qu'elle entraîne et au fait que certaines sociétés ont des millions de tonnes de crédits carbone dans leur bilan.
Selon Morgan Stanley, les valeurs les plus sensibles à ce marché sont les producteurs d'électricité nucléaire tels qu'EDF et British Energy qui n'ont aucune exposition au carbone mais une forte exposition aux prix de l'énergie.
Vers 15h00, EDF perd 4,3%, British Energy 2,93%, RWE <RWE> 2,67% et EON 2,24%. Certains intervenants soulignent également que ces valeurs subissent des prises de profits avec le recul du marché, après avoir fortement progressé depuis le début 2006, EDF affichant un gain de 52% par exemple.
Dans une deuxième phase, les pays signataires des accords de Kyoto devaient accorder à leurs industries un peu moins de permis de polluer, ou crédits carbone, que les volumes d'émissions attendus, afin de les inciter à produire de façon plus propre.
Devant ce fort décalage entre les attentes et la réalité des émissions 2005, les traders sur le marché du CO2 accusent les pays et les sociétés d'avoir gonflé leurs chiffres dans un premier temps pour minimiser l'impact financier de ce plan de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Les Etats signataires sont aujourd'hui sous pression pour resserrer de façon significative leurs allocations de crédits carbone pour la deuxième phase du plan, de 2008 à 2012, qu'ils doivent soumettre à la Commission européenne d'ici au 30 juin.
"Les données (2005) serviront de base aux plafonds d'allocations de la deuxième phase", a déclaré jeudi Barbara Helfferich, porte-parole du commissaire européen à l'Environnement Stavros Dimas.
"Cela renforce potentiellement la main-mise de la Commission européenne dans le cadre de la deuxième phase du Plan National d'Affectation" estime Anthony Hobly, l'un des responsables du fonds,Climate Change Capital, qui détient plus de 100 millions de dollars investis sur les marchés du carbone./JIR