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Ne sauvons pas la planète !

Publié : 14 mars 2007, 16:54
par Environnement2100
On entend encore fréquemment ces mots, prononcés soit par des Ecolos Chevelus avec ferveur : "Il faut sauver la planète !", soit au contraire par des réactionnaires quelconques et multiples, prononcés cette fois avec mépris :"Ah oui, vous voulez sauver la planète..." Que signifient-ils ?

Dans les années 1960, alors que la biodiversité terrestre n'était déjà plus qu'un souvenir dans la plupart des pays de l'OCDE, l'afflux massif d'intrants dans l'agriculture finit par poser quelques problèmes ; presque simultanément, l'extinction spectaculaire de certaines espèces de cétacés commença à faire réfléchir sur notre exploitation-pillage de la mer : on commença à se rendre compte que le fonctionnement quasi-miraculeux de la nature trouvait ses limites face à l'ingérence de l'homme.

Mais notre ignorance de notre propre planète en tant qu'organisme évolutif était encore grande, la tectonique des plaques commençait tout juste à être enseignée, et la notion de système complexe n'existait pas encore.

En cinquante ans, des pas de géants ont été accomplis : la notion de biotope est maîtrisée par l'homme de la rue, les paléos parlent couramment des cinq extinctions massives, la télévision propose des programmes montrant le calcul de la température de la planète avec et sans atmosphère. Le doute n'est plus permis, si la planète ne peut être considérée comme un organisme vivant, notion trop facilement anthropocentriste, elle est certainement un système avec ses règles et son évolution.

Et aujourd'hui, cette évolution consiste à élever sa température très rapidement, conduisant ainsi à une nouvelle modification des conditions de fonctionnement, comme elle en a connu des milliers dans son histoire.

Notre planète n'est pas en péril : elle va passer d'un état stable à un autre état stable ; cet autre état stable va générer ses propres espèces, mieux adaptées aux nouvelles conditions de température et de pression, comme disent les chimistes. Il n'est pas certain que l'homme y ait sa place, et la planète s'en moque complètement : elle a déjà nettoyé l'ardoise cinq fois, pourquoi pas une sixième.

Il est donc hors de question de sauver la planète. D'abord, parce qu'elle n'est pas en péril : elle se débrouille très bien toute seule, merci. Ensuite parce que, avec toute la bonne volonté du monde, nous n'en avons pas les moyens matériels : malgré tous nos laboratoires de recherche, nous sommes encore aujourd'hui incapables de créer la moindre espèce de toutes pièces, encore moins à recréer un biotope, qui de toutes façons, se modèle sur plusieurs millénaires.

Mais surtout, parce que c'est bien nous qui sommes en question : à la fin de ce siècle, nous et nos descendants serons confrontés à une telle quantité de petites misères que nous aurons fort à faire pour nous y adapter. Il n'est écrit nulle part que l'homme a gagné le loto de la Création, avec une certitude de survie : au contraire, notre Mère Nourricière a déjà fait la preuve de son cynisme, en éradiquant cinq fois ses créations : si l'on s'en tient aux simples probabilités, les bookmakers nous regardent plutôt avec pitié.

Les adaptations que nous aurons à réaliser seront multiples et variées : s'adapter à la sécheresse ici, aux pluies torrentielles là ; au réchauffement estival ici, au refroidissemnt là ; à la disparition de nombreuses espèces utiles dans la chaîne de l'agriculture ; à peu près aucune région de la planète n'échappera à ces petites misères qui individuellement seront tout-à-fait gérables, mais mises bout à bout mobiliseront l'essentiel de nos ressources.

Ces difficultés commenceront à survenir au moment même où nous toucherons vraisemblablement un point haut de notre démographie, ainsi qu'une déplétion de nos ressources en général, et de l'énergie facile en particulier.

La concomitance de ces facteurs en fait un délice pour gestionnaire de crises, mais pas pour le décisionnaire, qui voit arriver une multitude de soucis comme autant d'agressions directes.

Le pire pour les idées d'aujourd'hui, c'est bien les idées d'hier. Alors ne sauvons pas la planète, sauvons-nous !

Re: Ne sauvons pas la planète !

Publié : 14 mars 2007, 17:04
par echazare
J :smt041

Sauvons nous, oui mais ou ? ;)

Re: Ne sauvons pas la planète !

Publié : 14 mars 2007, 17:18
par ktche
Environnement2100 a écrit :malgré tous nos laboratoires de recherche, nous sommes encore aujourd'hui incapables de créer la moindre espèce de toutes pièces
Ce n'est pas l'avis d'un certain nombre de tarés qui ont l'air de penser qu'on peut relancer la "wheel of fortune" encore et encore et encore...

http://www.syntheticgenomics.com/about.htm

De toutes les catégories de catastophes qui s'annoncent sur notre trajectoire, ce sont bien celles qui viendront de ce genre de soubressauts qui me foutent le plus les jetons.

A mort la planète-machine !

Publié : 14 mars 2007, 17:41
par phylippe
A part une question sémantique, quelle différence? Les deux sont intrinsèquement liés. Il est clair que quand on dit "sauver la planète" on sous entend la garder dans l'état qui nous permette d'y vivre. Et elle l'est de moins en moins.

Publié : 14 mars 2007, 18:56
par Environnement2100
phylippe a écrit :A part une question sémantique, quelle différence? Les deux sont intrinsèquement liés. Il est clair que quand on dit "sauver la planète" on sous entend la garder dans l'état qui nous permette d'y vivre. Et elle l'est de moins en moins.
C'est exactement l'objet de mon post : garder la planète en l'état est impossible. Or, la phrase "sauvons la planète" laisse entendre que cela pourrait être possible à condition de faire des efforts : il faut tordre le cou à cette idée.

Publié : 14 mars 2007, 19:07
par Blackdress
Tout le problème est dans la définition du "nous".

Pour sauver l'humanité, il faudrait une stratégie globale, or c'est loin d'être le cas.

A défaut, ce sera ni plus ni moins que la loi du plus fort. Ce qui ne laisse rien présager de bon.

Je ne suis pas très optimiste à la perspective d'une planète couverte d'une dizaine de milliards d'individus humains, privés de biodiversité et d'énergie bon marché, crevant de chaud sous un climat altéré.

C'est pourtant le scénario le plus réaliste pour 2050, c'est-à-dire après-demain.

Publié : 15 mars 2007, 10:07
par phylippe
Alea jacta est. Un Beretta et deux balles pour les maladroits.

Publié : 15 mars 2007, 10:12
par kraveunn
Un post qui pose enfin la bonne question ;) !


Oui, la terre s’en remettra, elle s’est déjà remise maintes fois de catastrophes autrement pires que celle qui nous attend. La Terre (en tant qu’écosystème – disons Gaïa pour faire plaisir à Lovelock) a encore pour environ un milliard d’existence potentielle, avant que le gonflement du soleil ne rende toute vie impossible.

Tu pose là, je pense, environnement une question essentielle : la planète est-elle réellement en danger, ou n’est-ce pas plutôt l’idée que nous nous faisons de la vie sur terre présente qui est en danger ? Bref, n’est-ce pas plutôt l’écosystème contemporain et à travers lui, l’humanité qui est menacé de disparition ? Indubitablement oui ; des espèces vont disparaîtrent et l’homme risque bien d’en faire partie. Le véritable enjeu est de préserver notre environnement actuel, celui qui est le plus propice à notre survie. On dirait que l’homme s’exclu de lui-même de l’écosystème, pourtant, il en est parti intégrante ; croire qu’il puisse subsister hors de la nature est une pure croyance scientiste. La croyance dans une vie possible au sein d’un monde totalement artificiel, genre le vaisseau d’alien (le nostromo), est une tendance lourde du monde moderne ; toutefois, c’est de la SF et la réalité aura tôt fait de nous rappeler à l’ordre…espérons seulement que ça ne sera pas trop tard.

Publié : 15 mars 2007, 11:07
par Alter Egaux
Environnement2100 a écrit :Alors ne sauvons pas la planète, sauvons-nous !
Effectivement, c'est un abus de langage. La planète se débrouillera avec le climat qu'elle aura, avec la nuance prêt qu'elle sera peut être hostile à bien des vies sur Terre (extinction de masse).
La question est donc de sauver notre environnement dans lequel nous vivons actuellement, ou du moins de le préserver et d'atténuer notre impact sur cet environnement.
kraveunn a écrit :la planète est-elle réellement en danger ?
Non, mais c'est les vies qui le sont (en danger), animales, végétales et humaines.
kraveunn a écrit : On dirait que l’homme s’exclu de lui-même de l’écosystème
Il ne s'exclut pas, il est égocentriste et est persuader que l'impact individuel est ridicule pour son écosystème. Non seulement l'impact n'est pas ridicule mais s'il est multiplié par plus de 6 milliards d'humain, son comportement devient une menace pour toute vie sur Terre, y compris pour sa propre survie.
kraveunn a écrit :La croyance dans une vie possible au sein d’un monde totalement artificiel, genre le vaisseau d’alien (le nostromo), est une tendance lourde du monde moderne ;
Sauf que le vaisseau part avec un ravitaillement d'un point pour aller à un autre ravitaillement vers un autre point. Notre cas est donc bien différent : nous n'avons pour l'instant nul par où aller, et la Terre nous offre ses ressources non renouvelables qu'une seule fois. Il faut sortir de cette folie de la croissance exponentielle de la consommation non renouvelable. Au contraire, les ressources renouvelables sont des biens précieux, à consommer avec une extrême modération. De même avec les ressources renouvelables, mais avec une gestion perspicace de son renouvellement (ex : forêt).

Publié : 15 mars 2007, 11:23
par Lo
kraveunn a écrit :Un post qui pose enfin la bonne question ;) !
Un titre qui n'est pas une question mais une affirmation, plutôt stupide au demeurant.

Re: Ne sauvons pas la planète !

Publié : 15 mars 2007, 17:32
par Cassandre
Environnement2100 a écrit :Notre planète n'est pas en péril : elle va passer d'un état stable à un autre état stable ;(…) ne sauvons pas la planète, sauvons-nous !
C'est tout à fait ce que je pense, merci pour ce rappel ! :D

Publié : 15 mars 2007, 18:01
par kraveunn
Lo a écrit :
kraveunn a écrit :Un post qui pose enfin la bonne question ;) !
Un titre qui n'est pas une question mais une affirmation, plutôt stupide au demeurant.
salut,

jene parlais pas du titre, mais de la problématique générale soulevée par le post : le fait que la terre survivra à ce que nous lui faisons et que ce qui risque le plus de disparaitre (hormis malheureusement une bonne partie de l'écosystème), c'est l'homme.

Publié : 15 mars 2007, 18:06
par kraveunn
Alter Egaux a écrit :
Environnement2100 a écrit :
kraveunn a écrit : On dirait que l’homme s’exclu de lui-même de l’écosystème
Il ne s'exclut pas, il est égocentriste et est persuader que l'impact individuel est ridicule pour son écosystème. Non seulement l'impact n'est pas ridicule mais s'il est multiplié par plus de 6 milliards d'humain, son comportement devient une menace pour toute vie sur Terre, y compris pour sa propre survie.
Si je persiste, je crois que l'homme a une tendance lourde à s'exclure de l'écosystème ; en partie du moins. Il suffit de voir de quelle façon l'homme cherche à domestiquer la nature et combien la part qu'il lui est réservée dans les villes est faible pour le constater. Sinon, je suis d'accord avec ta phrase ;)

kraveunn a écrit :La croyance dans une vie possible au sein d’un monde totalement artificiel, genre le vaisseau d’alien (le nostromo), est une tendance lourde du monde moderne ;
Sauf que le vaisseau part avec un ravitaillement d'un point pour aller à un autre ravitaillement vers un autre point. Notre cas est donc bien différent : nous n'avons pour l'instant nul par où aller, et la Terre nous offre ses ressources non renouvelables qu'une seule fois. Il faut sortir de cette folie de la croissance exponentielle de la consommation non renouvelable. Au contraire, les ressources renouvelables sont des biens précieux, à consommer avec une extrême modération. De même avec les ressources renouvelables, mais avec une gestion perspicace de son renouvellement (ex : forêt)
.

C'était une image, mais je suis d'accord avec le reste de ton analyse ;)

Publié : 16 mars 2007, 17:08
par GillesH38
je suis totalement d'accord avec E2100 que la planète se fiche comme une guigne de ce que nous lui faisons, elle en a vu d'autres.

Mais en fait, pour le moment, ce n'est même pas non plus l'espèce humaine qui est en danger ! 6 milliards d'individus, voire 9 , c'est énormément plus que n'importe quelle espèce de mammifère. Aucune espèce n'est plus éloignée de l'extinction que l'espèce humaine : même la disparition de 90 % de l'espèce humaine la raménerait à 600 millions d'habitants , ce qui est encore beaucoup plus que tous les autres mammifères, et serait probablement parfaitement viable.
Il faut bien voir que les problèmes viennent justement que nous avons rempli à peu près tout notre espace disponible, justement parce que nous sommes une espèce en expansion. Tout ce qui nous fait peur, ce sont en fait les limites que la Nature pose à notre expansion. Et pourtant c'est un phénomène absolument normal et prévisible, il ne pouvait en être autrement.

Mais arrêter l'expansion et disparaitre sont deux choses très différentes. L'homme n'a pas de concurrent naturel à sa hauteur, et il s'adapte bien mieux que toutes les espèces à des climats allant des zones arctiques au désert du Sahara en passant par la forêt amazonienne. Jusqu'à la prochaine chute d'un gros astéroïde, ou peut etre l'explosion d'un supervolcan, il est extrêmement improbable qui disparaisse.

Ce qui est réellement menacé, ce n'est pas l'homme , c'est la civilisation industrielle. Elle en revanche, je ne donne vraiment pas cher de sa peau...

Publié : 17 mars 2007, 00:08
par Schlumpf
bon. Alors arrêtons de sauver la planète. Mais l'homme n'apparait même pas être en danger dans l'évolution qui se fait jour. Alors qui allons nous sauver ? Personne ?