Dans les questions au Gouvernement du 5 avril 2011, en réponse à la question sur le "prix de l'énergie" :
Source :M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. François Brottes. Monsieur le Premier ministre, la vie de tous les jours est devenue un enfer pour une majorité de Français qui rencontre des difficultés pour se chauffer et se déplacer. Aujourd'hui vous nous dites : « le prix du gaz ne bougera pas » En réalité, depuis des mois, et même des années, et ce en dépit de nos propositions pour mettre un coup d'arrêt à cette spirale infernale, c'est le Gouvernement qui ne bouge pas ! Avouez qu’il faut tout de même un certain culot pour évoquer une taxation des compagnies pétrolières alors que, chaque fois que nous vous avons proposé une telle mesure depuis 2007, vous vous êtes indignés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Il faut quand même un certain culot pour annoncer une nouvelle augmentation de l'électricité de 3 %, après les 10 % en 2010, puis un moratoire jusqu'aux élections présidentielles, alors que vous n'avez toujours rien décidé sur le prix de vente du nucléaire par EDF à ses concurrents. Il faut tout de même un certain culot pour annoncer encore une révision de la formule de calcul du prix du gaz, après plus de 55 % d'augmentation en cinq ans ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) À l’incompétence, vous ajoutez l'indécence : vous gèleriez les tarifs du gaz le 1er juillet, donc au moment où l’on n'a plus besoin de se chauffer, et quelques jours après avoir accordé une hausse de plus de 5 % !
À l'heure où GDF Suez, comme les banques, réalise des profits considérables, votre gouvernement panique, vous cherchez une sortie, vous sentez bien que les Français n'en peuvent plus ! En matière de tarifs de l'énergie, vous vouliez vous exonérer : le marché libéral devait tout régler ! Le marché s'est bien servi, il s'est même bien gavé ! Les consommateurs ont payé et ils risquent de vous le faire payer ! On ne peut pas impunément briser les fondamentaux du service public, monsieur le Premier ministre, sans se retrouver KO au fond du ring lorsque, à force de taper toujours sur les mêmes, commencent à apparaître des ecchymoses dans le budget des ménages ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Il y a une urgence sociale, une urgence vitale ! C'est dès maintenant qu'il faut reconsidérer la taxation de l'énergie.
Monsieur le Premier ministre, ne cherchez plus à gagner du temps ou à trouver un peu de répit d'ici aux prochaines élections. Arrêtez les gadgets, les Français attendent des actes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le député Brottes, nous arrivons, effectivement, au moment où nous allons pouvoir comparer les programmes des uns et des autres. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Cela va être l’heure de vérité ! La première chose que vous devriez expliquer aux Français, si vous dites la vérité, c’est que nous sommes en face de tendances lourdes d’augmentation des coûts de l’énergie !
M. Christian Eckert. Pas du gaz !
M. François Fillon, Premier ministre. Nous avons, en 2009, atteint le pic de production en matière de pétrole. La production ne peut maintenant que décroître, alors même que la croissance de l’économie mondiale a retrouvé un train de 4,5 %. La catastrophe de Fukushima aura forcément des conséquences sur les investissements dans le monde en matière nucléaire.
M. Patrick Lemasle. Cela ne va pas jouer sur le prix du gaz !
M. François Fillon, Premier ministre. Enfin, nous savons tous que les énergies renouvelables ont un coût très élevé. Nous sommes donc confrontés, de manière tendancielle, à une augmentation des coûts de l’énergie. Face à cette situation, on peut faire de la démagogie ou on peut répondre de manière sincère et pragmatique…
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Vous, vous n’avez rien fait !
M. François Fillon, Premier ministre. …aux difficultés que rencontrent les Français. Nous sommes dans une phase de redémarrage de l’économie française. Celle-ci s’appuie, pour l’essentiel, sur la consommation. C’est la raison pour laquelle nous avons pris des décisions visant à freiner l’augmentation du coût de l’énergie pour ne pas handicaper les capacités des consommateurs français. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Oui, l’électricité, qui aurait normalement dû croître de 5 % au mois de juillet, n’augmentera que de 2,9 %, 1,7 % correspondant à l’inflation et aux investissements nécessaires sur le réseau de distribution et 1,2 % correspondant aux décisions que vous avez votées et soutenues (Protestations sur les bancs du groupe SRC) et dont vous considérez d’ailleurs souvent qu’elles ne sont pas suffisantes pour financer les tarifs sociaux et le surcoût de la vente de l’électricité provenant des énergies renouvelables à EDF.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Non !
M. Alain Néri. C’est honteux !
M. Henri Emmanuelli. Quel culot !
M. François Fillon, Premier ministre. Quant au gaz, nous avons décidé de mettre un coup d’arrêt à une augmentation qui aurait dû être de 7,5 % au mois de juillet prochain. Il n’y aura pas de hausse du gaz pendant un an (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et nous allons renégocier le contrat de service public qui lie l’État à Gaz de France Suez, notamment pour revoir la formule de calcul.
Enfin, s’agissant de la taxation sur les entreprises pétrolières, vous avez juste oublié, monsieur Brottes, que nous l’avons déjà pratiquée à plusieurs reprises pour financer la prime à la cuve. Nous prendrons de nouveau cette décision cette année, mais, cette fois-ci, pour venir en aide à tous les professionnels qui roulent beaucoup et qui, du fait de l’augmentation du prix de l’essence, sont handicapés dans leur activité.
Mesdames, messieurs les députés, au moment où le parti socialiste nous annonce qu’il est converti à la sortie du nucléaire, les propos de M. Brottes sonnent comme des propos électoralistes…
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C’est ridicule !
M. François Fillon, Premier ministre. …qui n’ont aucun fondement en économie ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
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