Walf : Depuis quelques années, on assiste à des signatures de contrats de recherche pétrolière. Mais les résultats ne suivent pas. Qu’est-ce qui ne va pas ?
Djibril THIONGANE - Les recherches en pétrole coûtent très cher et demandent beaucoup de temps. Dans cette zone que nous partageons avec la Guinée-Bissau et qui avait fait l’objet de litige, il y a des indices très sérieux pour qu’on y trouve du pétrole brut. Pour l’instant, les recherches se poursuivent, mais les indices sont très sérieux. Souhaitons qu’on va trouver un jour du pétrole brut. Mais le Sénégal a, depuis 1962, trouvé un gisement en Casamance qui fait à peu près plus de 100 millions de tonnes. Et comme j’ai eu à le dire, ce pétrole brut, malheureusement, est trop lourd, trop sulfureux. Ses méthodes d’exploitation coûteraient donc trop cher. Ce qui fait que le niveau actuel du pétrole ne nous permet pas d’exploiter ce gisement. Ce n’est pas encore intéressant.
Walf : Pourquoi depuis plus de quarante ans qu’on parle de ce gisement, on ne l’a jamais exploité ?
Djibril THIONGANE - Parce qu’à l’époque, le baril était beaucoup plus bas encore. Ce pétrole brut, c’est sa méthode d’exploitation qui est onéreuse parce qu’il est très lourd et trop profond. Et même quand vous le sortez, sa qualité est telle que cela va être du brut très bon marché. Parce qu’un pétrole plus il est lourd, plus il est sulfureux, moins il est cher. La prospection pétrolière coûte tellement cher que souvent, même les grandes sociétés sont obligées d’aller ensemble en coalition pour se partager les frais de prospection et en cas de découverte, se partager les fruits de l’exploitation. Parce que le risque est tellement gros que souvent, une société, à elle seule, ne le prend pas. Il y a des formes d’association pour ensemble prendre le risque. Mais une seule société accepterait difficilement de s’engager même si les indices sont très sérieux. Parce que vous investissez beaucoup et ne rien trouvez. Indice ne rime jamais avec certitude. C’est cela le problème et comme les coûts sont élevés, ils sont ensemble.

Je retire deux enseignements de cet extrait : D'une part il existe encore aujourd'hui des gisements connus non exploités, ce qui irait plutôt dans le sens que le peak oil n'est pas pour tout de suite. D'autre part, si une quantité significative des fameuses réserves prouvées mondiales sont dans ce cas de figure, avec une exploitation tellement difficile et un pétrole de si mauvaise qualité que l'exploitation n'est pas encore rentable avec un baril à 60 ou 70$, alors la crise pétrolière pourrait largement précéder le peak oil à cause de coûts de production faramineux.