Mercredi 19 avril 2006
PARIS (Reuters) - La flambée des prix du pétrole aura un impact sur la croissance et l'inflation mondiales et le temps est venu de faire des économies massives d'énergie, a déclaré sur Radio France Internationale le directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
La hausse des prix du pétrole, qui ont dépassé ces derniers jours les 70 dollars le baril, "risque de durer si on ne prend pas les mesures pour y mettre fin", a déclaré Claude Mandil.
Pour lui, deux catégories de mesures sont susceptibles d'enrayer cette hausse à court terme.
Les premières consisteraient à "calmer le jeu politique" partout où des tensions risque de perturber la production et les exportations pétrolières (au Moyen-Orient, au Nigeria, au Tchad, au Venezuela, en Russie ...).
Les secondes consisteraient à "suivre les signaux du marché" et à réduire la consommation d'énergie dans le monde.
"C'est vraiment le moment de faire massivement des économies sur ses consommations de pétrole et sur ses consommations de carburants", a dit Claude Mandil. "Il faut impérativement modérer nos consommations d'énergie."
Pour lui, l'augmentation des prix pétroliers "a certainement des conséquences sur la croissance".
"Nous avons fait une petite étude avec le Fonds monétaire international. On a chiffré à 0,4 point de croissance par dix dollars de hausse" l'impact négatif de la flambée des cours du pétrole sur la croissance mondiale, a-t-il précisé.
La hausse des cours du pétrole ne peut pas ne pas avoir à terme, également, un impact sur les prix en général, estime le directeur exécutif de l'AIE.
"Il y a certainement un effet sur l'inflation", a-t-il dit. "Tous les secteurs gros consommateurs d'énergie vont avoir leurs coûts qui augmentent (...). Le prix du pétrole influe sur le reste des énergies, sur le gaz sur l'électricité, etc. Donc le ciment l'aluminium, l'acier, etc. tout ça risque d'augmenter."
Les conséquences en sont "absolument dramatiques" pour les consommateurs les plus pauvres et en particulier pour les pays sous-développés non producteurs de pétrole.
PAS DE PENURIE MAIS DES CAPACITES INSUFFISANTES
"Il y a des pays pour lesquels l'augmentation de la facture pétrolière est très très supérieure à la réduction de dette qui leur a été consentie l'année dernière par le G8", a souligné Claude Mandil.
Pour autant, la flambée actuelle des cours du brut est surtout due à des capacités de production insuffisantes.
"Aujourd'hui, nous ne manquons pas du tout de pétrole. Il n'y a aucune pénurie", a-t-il déclaré. "En revanche (...) les capacités inemployées sont extrêmement faibles, plus faibles qu'elles ne l'ont jamais été, aussi bien en production de pétrole qu'en raffinage."
Le monde consomme à peu près aujourd'hui 85 millions de barils de pétrole par jour (bpj) et les capacités de production de brut inemployées sont seulement d'environ deux millions de bpj, soit à peine plus de 2% de cette consommation.
"C'est très très peu", a souligné Claude Mandil. Quant aux raffineries, elles "tournent à plein".
Du coup, "le marché se dit, si jamais il y a un accident de nature politique ou de nature technique qui coupe une partie importante de la production (...), il n'y aura pas de marge de manoeuvre pour pouvoir réagir. Et c'est ça qui envoie les prix vers le haut", a-t-il poursuivi.
"Des risques d'interruption il y en a malheureusement à foison. Il y en a en Irak, il y en a en Iran, il y en a au Venezuela , il y en a au Nigeria, il y en a au Tchad."
L'un des risques les plus graves est liés au différend international sur le programme nucléaire iranien et à ses éventuels développements politiques et militaires.
Claude Mandil a cependant assuré que les stocks stratégiques des pays membres de l'AIE étaient suffisants pour faire face à une éventuelle interruption des exportations de l'Iran.
L'Iran exporte environ 2,7 millions de bpj. Toutefois, l'AIE dispose d'environ quatre milliards de baril dans ses stocks stratégiques, a précisé Claude Mandil.
En cas d'interruption des exportations de brut iranien, "ça nous permettrait de tenir près de quatre ans", a-t-il assuré. "On pourrait faire face."



J'ai du relire deux fois et me pincer. Ces mots (le titre) qu'on croirait sortis droit d'un discours d'Yves Cochet émanent bien de l'AIE!
Oh, bien sûr, il y a les termes rassurants : Il n'y a pas de pénurie, il y a encore plein de pétrole (sous terre et dans les stocks) mais l'appel ne peut cacher la vérité, le mur est devant nous, il n'y a plus de marge de production, plus qu'une solution, freiner la consommation! C'est énorme cette déclaration, énorme!!!