La baisse du pétrole est-elle bien répercutée sur le prix de l'essence ?
Par Benoist Fechner, publié le 08/12/2014 l' EXPRESS
Tandis que le prix du baril de brut est tombé sous les 70 dollars contre plus de 110 en juin dernier, l'Elysée a voulu s'assurer que cette baisse profitait normalement aux consommateurs. Verdict: oui, mais les marges remontent
Depuis le mois de juin, le cours du baril de pétrole brut n'en finit plus de dégringoler. Ce lundi, il cotait même sous les 70 dollars. Mais cette baisse des coûts de fabrication de l'essence est-elle correctement répercutée à la pompe? Dans le cas contraire, les groupe pétroliers ou les distributeurs en profiteraient-ils pour gonfler leurs marges et détourner ainsi une partie des économies promises aux automobilistes?
C'est pour tenter répondre à ces questions que la présidence de la République avait convoqué, ce lundi matin, une rencontre avec des professionnels du secteur
Pour l'Elysée, les professionnels jouent le jeu
"Cette réunion a permis de partager le constat que la baisse des cours du pétrole brut, qui ont atteint ces dernières semaines un point bas depuis 2010, est répercutée correctement dans les prix des carburants à la pompe", a indiqué l'Elysée dans un communiqué. "Ceci représente une baisse de 8 centimes par litre pour le gazole et de 11 centimes par litre pour l'essence en 5 mois, au bénéfice des consommateurs et des entreprises", a-t-il ajouté, soulignant que le gain s'élevait à environ 6 euros en novembre pour un automobiliste moyen parcourant 35 kilomètres par jour.
"Nous avons pu constater que le marché français fonctionne. (...) La baisse du prix du brut a été intégralement répercutée au consommateur", a abondé le directeur général de Total, Patrick Pouyanné, à l'issue de cette rencontre réunissant les producteurs et distributeurs de produits pétroliers, ainsi que des associations de consommateurs et le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron. Le gazole, qui représente plus de 80% des volumes vendus, a perdu 12,5 centimes depuis le début de l'année, atteignant le 28 novembre son niveau le plus bas depuis début décembre 2010. Le constat vaut aussi pour l'essence sans plomb.
Le cours du brut ne pèse qu'un tiers du prix à la pompe
Si la baisse n'est pas plus spectaculaire, c'est d'abord parce que dans la structuration du prix des carburants à la pompe, le cours du baril ne pèse que pour un tiers environ (33% pour l'essence sans plomb, 38% pour le gazole qui bénéficie encore d'une fiscalité plus avantageuse). Le reste du prix est impacté par les taxes et plus marginalement par les coûts de raffinage et de distribution du carburant, comme le montre la figure suivante.
Certaines marges ont tendance à s'envoler
Si les associations de consommateurs partagent globalement le constat élyséen, elles tiennent en revanche à apporter un bémol et placent "sous surveillance" le niveau des marges pratiquées par les professionnels du secteur pour les activités raffinage (la transformation du brut en carburant) et distribution (l'acheminement su carburant jusqu'aux pompes).
Contacté par l'Express, Nicolas Mouchnino, chargé de mission pour l'énergie auprès de l'UFC que choisir considère ainsi que la baisse des prix est correctement répercutée, "c'est vrai à quelques détails près". Dans son viseur, notamment les marges de raffinage qui étaient "extrêmement faibles en début d'année", mais qui ont eu tendance à "remonter à mesure que le cours du baril chutait". On parle ici de trois centimes de rattrapage sur le prix d'un litre d'essence sans plomb. Mais l'expert juge "normal" le niveau de marge actuel tout en appelant à la vigilance quant à la suite de cette évolution.
De son côté, l'association de défense des consommateurs CLCV a toutefois appelé dans un communiqué "les professionnels à faire preuve de modération" sur leurs marges, confirmant toutefois que celle-ci n'ont pas encore atteint "des niveaux déraisonnables".
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