Article du Monde sur le developpement des projets gaziers.
En Australie, les compagnies occidentales et asiatiques misent sur le gaz
Le Monde, 30/03/2010
Le pays, sûr politiquement et proche des marchés japonais, coréen et chinois, veut devenir un grand exportateur de gaz naturel liquéfié
Depuis plusieurs mois, les accords se multiplient dans le secteur du gaz australien, avec à la clé des contrats d'achat de gaz naturel liquéfié (GNL) atteignant des dizaines de milliards de dollars australiens. Et le gaz dit non conventionnel attire aussi les appétits étrangers.
La compagnie australienne Arrow Energy, qui projette de produire du GNL à partir de gaz de houille, vient d'approuver une offre d'achat des géants Petrochina et Shell pour 2,35 milliards d'euros. China National Offshore Oil Corporation (CNOOC) a signé un contrat de plusieurs dizaines de milliards de dollars australiens avec BG Group pour l'achat de GNL issu d'un projet détenu par le groupe britannique dans le Queensland.
Le pays dispose de minerais mais aussi de ressources gazières importantes. Selon l'Abare, le bureau économique des ressources et de l'agriculture, il possède 1,7 % des réserves mondiales de gaz. Plus que ce qui est nécessaire pour couvrir la demande domestique. Alors que les investissements se multiplient, la production devait croître de 8 % en 2009-2010 pour atteindre 47,6 milliards de mètres cubes, et 52,2 milliards en 2010-2011. Avec son image d'énergie plus propre que le pétrole et le charbon, le gaz est en expansion. Selon l'Agence internationale de l'énergie, la demande devrait augmenter de 1,5 % par an d'ici à 2030. Les possibilités de croissance du secteur australien sont telles que le pays a été surnommé, de façon excessive, le " Moyen-Orient du gaz ".
Il offre plusieurs atouts. La majorité de ses projets de GNL sont situés au nord-ouest du pays, proches du marché asiatique. " Le pays est stable, il offre une sécurité d'approvisionnement. De nombreuses compagnies sont en outre déjà implantées en Australie ", explique Alan Copeland, spécialiste du secteur pour l'Abare. " L'Australie a développé relativement tôt les technologies du GNL, d'où sa capacité à livrer le produit avant d'autres pays. En outre, sa population est petite, la demande domestique reste faible ", commente Nick Burke, spécialiste du gaz pour le CSIRO, la principale agence publique de recherche.
Projets gigantesques
L'Australie, 6e exportateur au monde de GNL, a deux opérations en cours : North West Shelf venture, en Australie-Occidentale - partenariat entre 6 compagnies -, et Darwin LNG. Selon l'Abare, plusieurs nouveaux projets devraient amplifier la production, avec 28 millions de tonnes d'exportation prévues en 2014-2015 (contre 17,4 millions en 2009-2010). Une hausse due en particulier au début des opérations, fin 2010, du projet Pluto, mené par Woodside Petroleum.
Le projet Gorgon, aussi en Australie de l'Ouest (15 millions de tonnes par an) pourrait débuter en 2015. Dans le Territoire du Nord, Total s'est associé au japonais Inpex pour développer Ichthys afin de produire 8 millions de tonnes par an. Depuis 2010, GDF-Suez s'est associé à l'australien Santos pour développer un projet terminal GNL flottant dans le bassin de Bonaparte - la production annuelle est prévue à 2 millions de tonnes.
De plus, le gaz dit non conventionnel attire aussi les investisseurs. Et, c'est à l'est, dans l'Etat du Queensland, que les compagnies ont multiplié les projets. " Le gaz de houille a démarré ici ces dix dernières années. Au début, c'était considéré comme une façon de répondre à la demande domestique. Mais maintenant, on considère de plus en plus son potentiel d'exportation sous forme de GNL ", observe M. Burke.
La signature de l'accord entre CNOOC et BG a été saluée par le ministre australien des ressources. " Cet accord fait de l'Australie un leader dans l'industrie du GNL issu du gaz de houille. Nous sommes prêts à avoir une nouvelle province pour le GNL, cette fois sur la côte Est ", s'est réjoui Martin Ferguson.
Bilan : l'Australie s'impose comme l'un des poids lourds mondiaux du gaz, encore dominé par la Russie ou le Qatar. " Si tous les projets sont réalisés, ce qui n'est pas certain, alors une production annuelle de 90 millions de tonnes de GNL pourrait devenir possible ", commente M. Copeland. Les projets gigantesques représentent un apport considérable pour l'économie. Avec son gaz et ses minérais, l'Australie sort donc de la crise financière plutôt bien armée.