Par Antoine Guinard | Aujourd'hui
l'Inde.com | 29/04/2010 |
http://www.rue89.com/planete89/2010/04/29/linde-re
alise-quelle-peut-devenir-la-poubelle-du-monde-149413
(De Delhi) Une des sept personnes récemment hospitalisées après avoir été
exposées à des déchets radioactifs découverts sur un chantier de recyclage
de métaux de New Delhi est décédée. Un incident qui fait la lumière sur
cette inquiétante pratique, grande pourvoyeuse d'emplois en Inde.
Voici deux semaines, sept personnes qui travaillaient sur la décharge de
Mayapuri, située à l'ouest de la capitale fédérale, ont été admises à
l'hôpital pour des symptômes d'exposition radioactive. Quelques jours plus
tard, du cobalt 60, un élément chimique utilisé en médecine pour la
radiothérapie et dans l'industrie où ses rayons servent à stériliser le
matériel médical ou alimentaire, avait été retrouvé sur le site.
« La victime de 35 ans est décédée lundi d'une insuffisance généralisée,
plusieurs organes ne fonctionnant plus. Elle travaillait dans une échoppe
recyclant les métaux où nous avons trouvé du cobalt 60 », a déclaré à l'AFP
un haut responsable de la police sous couvert d'anonymat. Selon la police,
les six autres personnes sont toujours hospitalisées.
Une équipe de scientifiques du Centre de recherche atomique Bhabha (BARC),
le plus grand centre indien en la matière, avait sécurisé le périmètre. Deux
experts ont été chargés de vérifier si les revendeurs de métaux n'avaient
pas caché ou enterré des matériaux toxiques. « Nous avons trouvé des
revendeurs qui ont gardé des échantillons de cobalt 60 dans leurs
portefeuilles pour les montrer autour d'eux », a déclaré S.K. Malhora, le
responsable du BARC, ajoutant : « De telles pratiques dangereuses doivent
cesser. » Les experts tentaient de faire prendre conscience aux employés et
aux propriétaires des échoppes de la nécessité de sécuriser la manipulation
de déchets.
L'Inde recueille les métaux usagers du monde entier
L'agence américaine de protection environnementale prévient sur son site que
le cobalt 60 peut se retrouver dans des dépôts d'ordures et des chantiers de
ferraille car il est souvent présent dans les conteneurs en métal.
Selon les experts, cet incident souligne que les lois sur l'élimination des
déchets radioactifs sont peu appliquées en Inde. La semaine dernière, le
ministère indien de la Marine a demandé aux autorités de douze ports
d'installer des détecteurs de matériaux radioactifs, craignant
l'introduction dans le pays de nouveaux produits toxiques.
Selon le New York Times, le manque à la fois de contrôle dans les ports
indiens, et de normes internationales, facilite l'introduction de matériaux
dangereux - et parfois radioactifs. Malgré le discours officiel du
gouvernement, cette situation alarmante, exposée par le décès de lundi,
n'est peut-être pas prête de se résoudre. L'Inde comble en effet une bonne
partie de ses besoins en acier en recueillant les détritus métallique du
monde entier.
Un secteur qui emploie plusieurs milliers de personnes
Le gouvernement indien, qui reconnaît que les contrôles ne sont pas
adéquats, est cependant soupçonné de laisser faire et de n'intervenir que
dans les cas extrêmes, comme celui de Mayapuri. Car en plus de combler les
besoins en métaux du pays, l'importation de métaux usagers, ou « ferraille »
emploie des milliers de personnes, rien qu'à New Delhi, qui après avoir
acheté des conteneurs, revendent ensuite les métaux aux fonderies. Il y a
quatre ans, dix ouvriers d'une fonderie de Ghaziabad, une ville à 20 km de
New Delhi, ont été tués par l'explosion d'obus militaires iraniens, qui se
trouvaient dans un conteneur de ferraille, arrivé via Dubai.
Selon un responsable de l'Agence internationale pour l'énergie atomique
(AIEA) interrogé par le New York Times, l'incident de Mayapuri est le cas
d'exposition à des matériaux radioactifs le pus grave depuis 2006.