La Chine n’a pas autorisé la mise en chantier d’une seule centrale nucléaire depuis la fin de 2016. Les experts évoquent de plus en plus ouvertement le gel définitif du programme nucléaire chinois. Pourquoi cette soudaine désaffection pour l’atome? Il existe un effet Fukushima non négligeable. La croissance plus lente de la demande énergétique joue aussi. Mais le principal obstacle demeure que le nucléaire coûte aujourd’hui 20 % plus cher que le solaire et l’éolien et que l’écart s’accroît.
La Chine a longtemps été l’un des principaux partisans de l’énergie nucléaire. Officiellement, elle l’est toujours. Mais le pays n’a plus que 20 GW de projets en construction et n’en approuve plus de nouveaux depuis plus de deux ans. Avant Fukushima, le pays parlait d’installer plus de 400 GW de capacité d’ici le milieu du siècle. Ces plans ont été complètement abandonnés et la politique actuelle, qui misait sur 58 nouveaux GW d’ici 2020, ne sera sans doute pas achevée avant 2022. Et après? Rien n’est prévu.
Le pays fait toujours de la recherche. Il construit actuellement quelques réacteurs de type Hualong-1 (aussi connu sous le nom de HPR-1000) à eau pressurisée, d’une conception classique, mais dotés de plusieurs caractéristiques de sécurité additionnelles. Les chercheurs jonglent aussi avec de nouveaux concepts refroidis au gaz ou au sodium, mais les progrès sont lents. Un réacteur au sodium mis en service près de Beijing en 2011 a connu divers ennuis de refroidissement. Les essais de refroidissement au gaz, pour leur part, se sont avérés si coûteux que le programme initial de 20 réacteurs a été abandonné après la construction de deux unités seulement, à Shidao.
Les problèmes de sécurité et d’acceptabilité sociales pourraient sans doute être résolus en y mettant le temps et l’effort. Seulement voilà, les coûts du nucléaire explosent et les renouvelables apparaissent désormais comme une solution à la fois moins coûteuse et plus facile à déployer. Le réacteur de type AP1000 (de conception américaine) mis en service en juin dernier a coûté 7,6 milliards de dollars, le double du prix normalement payé pour une capacité comparable en Chine. Ces coûts élevés augmentent les risques financiers liés aux nouveaux projets.
Qui plus est, les réacteurs nucléaires chinois ont dû réduire leur production en raison de la compétition de l’énergie renouvelable très bon marché sur les marchés. Le facteur de charge moyen des centrales est passé de près de 91 % en 2012 à 81 % en 2017. Les coûts de construction à la hausse sont donc assortis de revenus à la baisse.
https://energieetenvironnement.com/2019 ... e-chinois/Comment l’avenir se présente-t-il? Les centrales en place vont durer encore quelques décennies. Mais les mises en chantier seront désormais très rares, voire inexistantes. De plus, le modèle très centralisé de l’énergie nucléaire ne correspond plus aux attentes de production plus flexible et mieux distribuée sur le territoire. La faible croissance de la demande énergétique signifie aussi que les renouvelables pourront facilement combler les besoins.
En dépit de toute l’attention que reçoit le programme nucléaire chinois, il ne représentait en 2016 que 5 % seulement de la production électrique en Chine. Bloomberg New Enery Finance estimait en 2017 que sa part ne serait plus que de 3 % en 2040.