Le plus ancien centre de stockage de déchets nucléaires de France, le CSM de la Manche, fait face à des affaissements de terrain qui sont en cours de réparation mais que certains experts jugent alarmants, d'autant que le site fermé depuis quinze ans contient du plutonium hautement radioactif.
"Le sol s'est affaissé d'un coup de 30 cm en 1999 puis de 20 cm en dix ans sur une surface équivalente à une cage de football, à comparer à la surface du centre, soit 12 terrains de foot", résume Jean-Pierre Vervialle, directeur du CSM, à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA).
Il a fallu attendre que le sol "se stabilise" avant d'entamer début octobre des travaux qui ont consisté à combler avec des gravillons les cavités souterraines à l'origine du tassement, selon le directeur du centre.
L'Andra s'attend à d'autres "tassements" du même type et prévoit d'y remédier par des travaux similaires.
Cette stratégie fait bondir Christian Kernaonet, l'ancien ingénieur sécurité arrivé dans les années 70 au centre. "C'est mettre un emplâtre sur une jambe de bois", estime le retraité qui prédit des effondrements "de 1 à 2 mètres de haut sur 80 à 100 mètres de long".
Pour cet ancien du commissariat à l'énergie atomique (CEA), la couverture ne tiendra pas dans ces conditions et la nappe phréatique sera contaminée pour des millénaires à la première pluie. Selon lui, "il faudrait alors interdire au public une zone de 500 à 1.000 ha".
D'après lui, la solution est de ressortir tous les déchets de la tranche 1 et de les reconditionner. Ce qui, pour l'Andra, n'est pas envisageable en raison du mauvais état des fûts.
L'Association pour le contrôle de la radioactivité de l'Ouest (ACRO), qui siège au Haut comité pour la transparence sur la sécurité nucléaire (HCTISC) va plus loin: selon elle, le centre fuit déjà.
David Boilley, le président de l'ACRO, a relevé dans une rivière proche des quantités de tritium (hydrogène actif) qu'il juge "anormales" - contrairement à l'Andra- même si l'eau reste potable.
Pour ce professeur de physique nucléaire à l'université de Caen, la présence de cette matière très mobile annonce l'arrivée d'éléments plus lents mais plus dangereux, comme il le dit dans une étude commandée par Greenpeace.