sacado a écrit :
100 m² ? Ça me semble peu, c'est à peu près la surface qu'occupe un gros arbre fruitier genre noyer non ? Après, effectivement, 100m² de framboisiers / groseilliers / rhubarbes, ça fait pas mal.
100 m², c'est peu, mais :
1) il faut bien voir qu'il y a au moins 3 strates. C'est donc plus productif, pour la même surface, qu'une culture classique.
2) il faut savoir si on veut un jardin qui va contribuer à l'alimentation familiale, et qui va nécessiter seulement 1 ou 2 heures d'attention par semaine en moyenne, ce qui est compatible avec un boulot à l'extérieur, une vie de famille, et des loisirs... ou si on veut quelque chose qui produit toute la nourriture d'une famille et même au-delà, et qui va demander beaucoup de temps, notamment pour cueillir, préparer et conserver toute sa production. Ce qui est moins compatible avec un travail à temps plein à l'extérieur... et qui peut tourner à l'auto-esclavage si on n'est pas compétent et organisé. Dans le premier cas, 100 m² de jardin forestier peut suffir, dans le second, c'est plutôt 1000 m² minimum (0,1 ha, quoi). Si on a la place, on peut toujours commencer sur 100 m², puis étendre progressivement au fur et à mesure qu'on acquière de l'expérience et de l'assurance. Si on débute et qu'on attaque d'emblée 1000 m²... grosse surface, grosses erreurs !
D'ailleurs, pour quelqu'un qui a seulement une cour ou une terrasse, on peut avoir un mini-jardin forestier dans un baquet de moins de 1 m² ! Voir aussi le livre
Permaculture in a nutshell.
3) Sur 100 m², on met des arbres de faible extension. Dans le cas d'un pommier, on ne va pas mettre un haute tige greffé sur franc, par exemple, mais un arbre plus petit, qui pourra néanmoins être très productif s'il est bien soigné. On n'y mettra surtout pas de noyer ! Sur ce sujet, il me faut détailler un concept de permaculture :
Si j'ai bonne mémoire, en permaculture, on distingue 5 zones dans un établissement humain (genre ferme visant l'auto-substistance sur une dizaine d'ha) :
- l'habitation
- juste à côté de l'habitation
- cultures proches
- cultures lointaines
- zone de réserve
Plus on est proche de l'habitation, plus on va implanter des choses où on va souvent (dont on a souvent besoin ou bien qui ont souvent besoin de nous).
Exemples de juste à côté : les allées, le jardin ou les plate-bandes face à l'entrée (avec les plantes utilisées pour la cuisine et la phytothérapie), le puits, l'atelier, l'étable, etc.
Exemples de cultures proches et relativement intensives : jardin potager, parc des bêtes, etc.
Exemples de cultures lointaines : prés extensifs, cultures demandant peu d'intervention (céréales par exemple), forêt exploitée
Zone de réserve : zone de refuge de la vie sauvage : on n'y exploite rien et on n'y fait aucune opération. Ce qui ne veut pas dire faire un parc national de 50 000 ha ! Suivant la place disponible cette zone peut être un simple taillis, un bout de haie, quelques m² de ronces ou un simple tas de branches qu'on laisse vieillir. Même si cette zone fait moins d'1 m², prendre la décision de ne jamais y toucher, c'est augmenter ses chances d'avoir des bêtes sauvages qui peuvent se réveler des auxilliaires utiles, tels que hérisson, grenouille...
La permaculture n'invente rien : si on visite une ferme traditionnelle, on va constater ce type de zonage,
de facto. Conceptualiser ce zonage permet seulement de prendre les bonnes décisions lorsqu'on fait une nouvelle implantation, ou lorsqu'on modifie une implantation existante.
Un jardin forestier en zone "proche" doit être relativement petit mais bien entretenu, avec des arbres assez petits mais productifs. A mon avis, les plus grands arbres sont pommiers, poiriers, prunier, éventuellement un cerisier.
En revanche, des arbres tels que noyers ou chataîgniers seront plutôt dans la zone "cultures lointaines". Ils nécessitent peu d'attention, mais par contre, ils ont une très grande extension, et ils empêchent presque toute croissance végétale sous leur couvert (surtout le noyer, qui a une ombre très épaisse et qui émet des substances nocives aux autres plantes). A mon avis, ils ne sont pas très adaptés au jardin forestier. Si on veut avoir une co-exploitation du sol, on y mettra plutôt de l'herbe (foin ou pacage de bêtes telles que des vaches ou des moutons). Par exemple, les pommiers de grand vent qu'on voit dans les prés, notamment en Ardèche, c'est une forme de co-exploitation extensive typiquement permaculturiste. Mais quand on voit l'état de ces arbres, leur extension, et leur production relativement faible, on comprend bien qu'on ne veut pas placer un tel arbre dans un jardin forestier "intensif".
Si ces mêmes grands arbres sont serrés, et qu'ils ont tellement poussé qu'il n'y a plus d'herbe, on peut y mettre de temps en temps de la basse-cour ou des chèvres ou des porcs (en faisant quand même attention aux ravages qu'ils peuvent causer : il faut en mettre peu et/ou ne pas les laisser trop longtemps).
Même si on n'a pas une ferme, mais seulement un grand jardin, on peut néanmoins s'inspirer de ces principes. Ainsi,
- la partie du jardin proche de la maison accueillera les plantes utiles à la cuisine : aromatiques etc, et celles dont raffolent les enfants : fraises des bois, etc.
- la zone moyenne contiendra le jardin potager et le jardin forestier "intensif".
- le fond du jardin accueillera, s'il y assez de place, une partie plus extensive du jardin forestier, avec un pommier de franc pied, un cerisier ou un noyer. On ne cherchera pas trop à rendre cette zone productive sur plusieurs strates.
- enfin, le fin-fond du jardin accueillera la mini zone de réserve : un tas de branche, ou un tas de pierre, plus une cuvette ou un seau enterré dans le sol pour servir d'abreuvoir et de mini-zone humide, ou encore un petit bout de haie sauvage.