Développement durable vs décroissance soutenable

laffreuxthomas · Message par **laffreuxthomas** » 05 mai 2006, 15:47

Un peu de philo...

moi-même a écrit :* Développement durable vs décroissance soutenable *

Développement durable ou décroissance soutenable, il faudrait, parait-il, choisir. Mais qu'est-ce que le développement ? Le développement est l'ensemble des processus d'organisation des êtres humains. Le mot est le bon : développement personnel, développement d'une communauté locale, développement d'une communauté nationale, développement de la communauté mondiale... ces processus vont ensembles. S'organiser à une échelle communautaire va de paire avec s'organiser dans sa propre tête. Le développement, c'est la création des sociétés humaines. C'est surtout, la réalisation au mieux de chacun dans la société. Voilà pour le développement.

Croissance maintenant. Qu'est-ce que la croissance ? Au sens usuel du terme, on pense surtout à la croissance du PIB. C'est à dire à l'augmentation, en valeur, des échanges matériels entre les êtres humains. A quoi nous sert cet indicateur ? Sûrement pas à évaluer le bien-être des individus qui produisent ce PIB. Exemple : on peut préférer travailler moins et prendre le temps de se faire la cuisine, ou bien travailler plus et s'acheter des plats cuisinés. Seul le deuxième choix fait croître le PIB. Pourtant, au sens du développement des sociétés humaines, les deux choix sont les bons. En effet, selon ses valeurs subjectives, chaque individu cherchera à se réaliser au mieux dans l'une ou l'autre des manières de vivre. Mais on retiendra que la croissance au sens usuel du terme est celle du PIB seulement, pas celle du développement.

Décroissance... L'envers de la croissance. Donc au sens usuel du terme, il s'agit là-encore de PIB.

On en vient à la problématique. Développement durable. Développement et durable. Organisation des êtres humains et vision à long terme. Décroissance soutenable : décroissance et soutenable. Réduction des échanges matériels entre êtres humains et... Soutenable ? Pourquoi soutenable ? Pour éviter le chaos ? Pour éviter que la société ne se disloque ? Donc en clair, pour conserver les liens sociaux entre les individus ? C'est à dire, au fond, pour préserver l'organisation des êtres humains ? Et au fait, pourquoi décroître maintenant ? N'est-ce pas pour anticiper le choc brutal d'une possible et redoutée décroissance insoutenable ? N'est-ce pas pour faire perdurer les sociétés humaines ?

Pourquoi les écologistes espèrent-ils une décroissance soutenable ? Pour continuer durablement à développer.

J'ai publié ce texte ici aussi.

toto · Message par **toto** » 05 mai 2006, 16:04

Des coups de pied dans l'cul qui se perdent.
Pourquoi décroissance, parce que les matières premières qui font notre richesse aujourd'hui, quel que soit le moyen de calcul PIB ou autre baliverne, ces matières premières s'épuisent et la production globale de richesse va décroître.
Dans le terme développement, il y a augmentation, un processus qui se développe, grandit. Or si la matière première décroît, que veux-tu faire grandir?
La plupart des écolos, Vouanet (l'orthographe des noms ce n'est pas mon truc) en tête, parlent du développement durable parce qu'ils n'arrivent pas à prononcer le terme décroissance. Ca leur fait mal. Faudra pourtant bien qu'ils s'y fassent.
Toute la production matérielle et intellectuelle liée au pétrole n'a que peu de chance de survie aprés PO. Comment peut-on appeler ça?

laffreuxthomas · Message par **laffreuxthomas** » 05 mai 2006, 16:12

toto a écrit :Des coups de pied dans l'cul qui se perdent.

Bah tu vois, on est d'accord

metamec · Message par **metamec** » 05 mai 2006, 17:20

je crois que tu as fait un petite faute.

Exemple : on peut préférer travailler moins et prendre le temps de se faire la cuisine, ou bien travailler plus et s'acheter des plats cuisinés. Seul le premier choix fait croître le PIB.

C'est le deuxième choix qui fait croitre le PIB non?

aujourd'hui avec l'exemple que tu donnes le deuxième choix (celui qui fait croitre le PIB) c'est celui qui a le plus d'impact sur les matières premières, et c'est celui qui n'est pas durable dans les conditions actuelles.
Plats cuisinés = plus d'emballage=plus d'énergie (chaine du froid par ex)= plus de transport etc...

Geispe · Message par **Geispe** » 05 mai 2006, 17:33

Exemple : on peut préférer travailler moins et prendre le temps de se faire la cuisine, ou bien travailler plus et s'acheter des plats cuisinés.

ou aussi travailler moins et manger au resto
y en a pas mal qui font çà

laffreuxthomas · Message par **laffreuxthomas** » 05 mai 2006, 17:34

Oups ! Merci ! Je corrige !

Pour le caractère non-durable du deuxième choix ça se discute. Un individu qui n'aime pas cuisiner pourrait parfaitement amener son assiette pour la faire remplir par son traiteur.

[EDIT] Geispe m'a devancé !

GillesH38 · Message par **GillesH38** » 05 mai 2006, 19:15

je pense que ceux qui pronent la "décroissance soutenable" n'entendent ce mot que par rapport à la définition économique de la croissance, celle du PIB. Ils sont les premiers à dire qu'on peut se développer humainement autrement que par une consommation toujours plus grande!

laffreuxthomas · Message par **laffreuxthomas** » 05 mai 2006, 23:25

J'avais remarqué. Simplement, assez peu de personnes se préoccupent du sens du mot "développement". Il est intuitivement associé à la croissance économique, ce qui est inexact. Et même d'après moi un contre-sens dans le cas des décroissants.

Ceci-dit, la définition du développement comme processus d'organisation des êtres humains, c'est de mon cru. Mais aujourd'hui je suis convaincu d'avoir bon. Ca peut paraitre bête d'ailleurs, mais ça m'a pris des années pour comprendre cette notion toute simple. Des années à comprendre, 30 secondes à expliquer.... enfin pour moi au moins aujourd'hui le sens de ce mot est fort !

irinet · Message par **irinet** » 06 mai 2006, 01:27

J'avais eu un cours au Lycée qui nous a donné une définition du "développement". Je me souviens très bien d'avoir eu à opposer la vision purement économique du terme, celle qui associe "pays développé" à "pays industrialisé", à celle qui prend en compte seulement la qualité de vie des gens.

Pour ma part, je pense qu'on considère à tort que le développement économique d'une région doit se passer avant son développement tout court au sens basique de mesure de la qualité de vie. De plus, le développement économique est peut-être lui aussi défini lacunairement.

On peut vivre sans avoir recours à une industrie gigantesque et être lettré, soigné et cultivé, je pense.

(maintenant détrompez-moi, je vis peut-être dans des illusions)

toto · Message par **toto** » 06 mai 2006, 07:15

L’enseignement, pourtant prodigué à tous les enfants, était organisé suivant des modalités qui donnent à réfléchir. Les instituteurs proposaient leurs services sur le marché ! « C’est même une chose curieuse, disait un préfet en l’an X avec émerveillement, de voir, dans les foires d’automnes, ces instituteurs couverts d’habits grossiers, se promener dans la foule, au milieu des bestiaux, ayant sur leur chapeau une plume d’oie, qui indique, leur état, et leur volonté de se louer pour l’hiver moyennant un prix à convenir ». Une plume d’oie indique l’aptitude à enseigner la lecture et l’écriture, deux plumes l’arithmétique et les sciences naturelles, trois plumes le latin en plus.

Chaque municipalité nommait ses instituteurs après examen ou concours fin septembre ou début octobre. Ainsi l’article 17 d’un règlement de Briançon de 1624 disait : « Nul ne sera reçu en cette ville pour maître d’école, qu’il n’ait été examiné par deux avocats et un bourgeois commis par le conseil ; comme aussi seront ses gages résolus en conseil ». Souvent, la notoriété dispensait de comparaître, mais il suffisait quun seul parent conteste pour que l’examen soit exigé. La compétence se payait. Les rémunérations pouvaient aller du simple au quintuple.

Chaque famille était tenue de payer « l’écolage ». Toutes mettaient un point d’honneur à l’acquitter, si modestes fussent-elles. Celles qui ne pouvaient vraiment pas en étaient discrètement dispensées. Au chef-lieu, la classe avait lieu dans la salle servant aux réunions du conseil. Dans les villages, elle se faisait….dans une étable, à l’abri de la froidure.

L’instruction du peuple atteignait dans ces vallées libres un niveau sans pareil pour l’époque. 35% des femmes et 90% des hommes savaient lire. D’autres facteurs contribuaient à une éducation de grande qualité.

1. La lecture s’achevait sur le décryptage des archives de notaires ou d’avocats, ce qui inculquait aux élèves des notions de droit.
2. Beaucoup d’hommes valides émigraient pendant la mauvaise saison pour aller faire toutes sortes de métiers dans les « bons pays », et ils y créaient des réseaux commerciaux. Il leur fallait donc savoir lire, écrire et compter.
3. Pendant les pérégrinations hivernales des pères, les mères et les grands parents restés aux foyer employaient les soirées à faire faire leurs devoirs aux enfants et à compléter l’enseignement du maître.
4. A la belle saison, les instituteurs complétaient volontiers leurs revenus en travaillant dans les fermes, ce qui leur donnait une ouverture incomparable sur le monde réel.

Leur réputation était grande, et ils se louaient très loin, jusqu’en Alsace ou à l’étranger, pendant ce qu’on appelait une « campagne d’école ». On les appelait « les marchands de participes ».

En 1713, sous Louis XIV, des envoyés de la cour, qui pensaient avoir à faire à des paysans illétrés signant d’une croix, furent ébahis de recueillir de belles signatures accompagnées de commentaires.

Ca se passe dans la république des Escartons, des villages de montagnes aux conditions difficiles.
Je vois trés bien, dans un avenir proche, les gamins aller à l'école en galoche, disserter sur la mécanique quantique quand les parents, qui maitriseront ces notions depuis longtemps, préféreront jouer à la marelle.
Si c'est ça le développement, j'adhère.

Mike.be · Message par **Mike.be** » 06 mai 2006, 20:43

Bonjour,

Voilà ma position en matière de développement.
Nous sommes aujourd'hui dans un développement industriel qui bute contre les limites de la planète.
Pour grandir il consomme de manière exponentielle des ressources planétaires non renouvelables et comme elles ne sont pas extensibles à l'infini, ce type de développement est condamné.
Ce développement est basé sur l'usine, hopital usine, école usine, bureau usine, vacances usine, maison de retraite usine, funérarium usine.(on peut en ajouter)
Toute notre civilisation est basée sur l'usine, et c'est la disparition progressive de celle-ci qui provoque la crise que nous connaissons à l'heure actuelle.
Je sais, on me rétorquera que le monde n'à jamais été aussi industrialisé qu'aujourd'hui, c'est vrai, mais ses valeurs changent sans arrêts.
Ce qui est rassurant c'est que les gens en parle deplus en plus (en dehors d'Oléocène).
La décroissance dont on parle est celle du monde industriel bien entnedu.
Nous devons faire croître un mode de vie (une civilisation) qui permettera d'améliorer le bien-être de six milliards d'individus en diminuant de plus en plus la consommation d'énergie non renouvelables et de matière premières.
C'est en puisant dans l'imagination et les connaissances qu'on y arrivera.
Il nous reste à peu près la moitié du pétrole pour y arriver; le compte à rebours à commencer sans rejeter la technologie bien entendu.
Quel sera ce mode de développement, c'est à nous d'en décider.

n.g · Message par **n.g** » 07 mai 2006, 09:43

Tableau comparatif entre décroissance et développement durable, par l'ami Jeuf.

Jeuf · Message par **Jeuf** » 07 mai 2006, 11:27

hum...sous sa version incomplète.
ici : http://jeuf.free.fr/tableau , on a des couleur, et une quatrième colonne "décroissance dure" (assimilable à l'effondrement...convivial? apocalyptique? fatal? je n'ai pas trouvé de qualificatif.)

laffreuxthomas · Message par **laffreuxthomas** » 24 mai 2006, 10:33

J'avais oublié ce fil de discussion, pour cause de maladie puis de stage.

Ce comparatif ne s'oppose pas à mon propos en fait : dans les colonnes "développement durable" on retrouve les solutions couramment admises comme étant durables du point de vue du développement. Et ce qui est couramment admis, actuellement, ce sont des solutions de croissance durable.

La colonne de la "décroissance dure" n'est pas du développement durable en revanche. Ce n'est pas du développement humain, et il y a probablement une idéologie autoritaire sous-jacente.