Pourquoi le pétrole ne sera pas remplacé

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Jeuf
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Pourquoi le pétrole ne sera pas remplacé

Message par Jeuf » 27 févr. 2006, 16:56

Je souhaitai réfuter l'idée, émise souvent par Tiennel notament, que le charbon reviendra en force à partir du pic pétrolier.

Considérons la consommation mondiale d'énergie. Il faut bien maîtriser les unité : je parlerai en ordre de grandeur, en Gtep par an pour le monde, ou en Gb/an

Vers 2000, la consommation de pétrole était de 3,6Gtep/an. Et suivant la répartition donné sur
http://www.oleocene.org/wiki/index.php? ... et_Energie
la consommation de charbon est de l'ordre de 2,6Gtep/an.

J'avais déjà fait des petits calculs, il y a longtemps. Une baisse de 2,5% par an de l'approvisionnement en pétrole, c'est 90Mtep en moins. Si on considère qu'il faut une croissance de 1,5% de la consommation de pétrole, c'est 150Mtep de pétrole qu'il faut remplacer dès la première année par du charbon . En donnant un rendement de conversion assez bon à l'opération, il faudra 250Mtep de charbon pour faire ça, soit 10% du charbon. Avec la croissance de la consommation de charbon de 2%, c'est une croissance annuelle d'au moins 10% de l'extraction de charbon, sur laquelle il faut compter pour compenser le déclin du pétrole.

Mais en fait, il y a beaucoup mieux que ça. Entendu de Jancovici, qui l'avait lui même demandé à un ami...il faut environ 10 ans pour mettre en place une fillière de liquéfaction de charbon . Ou, au petit déjeuner de l'énergie : il y a un délai incompressible de 7ans pour mettre en place ce genre de filière : le temps de construire les mines de charbon, les usines de liquéfaction, les moyen de transport...
Ben oui, on n'inclue pas des Mtep de charbon liquéfié dans le bilan énergétique mondiale, comme ça en claquant des doigts.

Donc, considérons ce délai. Considérons qu'on anticipe un peu le peakoil (ce qui semble ne pas être le cas), qu'on commence les investissment pour une telle opération en voulant compenser la déplétion du Light Crude Oil , ce qui permet d'avoir à grande échelle de la liquéfaction 5 ans après le pic, et manipulons la courbe de l'ASPO. ça donne ceci :

Image

Toute la partie grise correspont à de charbon liquéfié, qui permet de maintenir la Croissance de la Consommation d'énergie. on suppose que le monde tient le choc dans la période intermédiaire de 5 ans.
La consommation de pétrole+charbon liquéfié est représanté par la courbe rose.

Pour anticiper le peak oil, il faut (si on se rend coompte 2 ans avant qu'il arrive) effecteur les investissements pour extraire, liquéfier, raffiner, transporter 3Gbep de charbon liquifié, soit 420Mtep d'énergie finale, ou 650Mtep de charbon (en prenant une hypothèse très optimiste de 1,5 tep de charbon pour faire 1 tep de pétrole)

Et en plus, préparer les investissement, tous les ans, pour PO+8, PO+9, etc...qui seront tout aussi énormes, pour combler le fossé.

Ainsi, si le pic est en 2007 et que l'on souhaite que "tout continue normalement" après 2012, sinon l'économie tombe, alors il faudrait investir dès cette année (et pas mal les suivantes) de quoi extraire et transformer 650Mtep/an de charbon, et avoir une augmentation de 25% de la consommation mondiale de charbon vers 2012. Cela donne aussi des sommes faramineuses (à évaluer...en se basant sur les centrale nucléaires qui demandent investissment de l'ordre de 2G$/ Mtep/ an, on obtient des sommes supérieurs à 1000 milliard de $ à investir tous les ans pour préprer l'après-pic selon cette façon de faire : combler le fossé.) Ce qui me semble invraisemblable, irréalisable. L'économie mondiale devrait consacrer à peu près toute son "énergie" à sauver la croissance de la consommaton d'énergie, tout ça pour rien d'autre...
Le pétrole Léger est réellement une ressource très facile d'utilisation, "merveilleuses molécules" come disait Cochet, dont le déclin de 2 ou 3% par an ne pourra pas être compensé par des ressources beaucoup plus sales.


Et les schistes bitumineux, la belle boue du canada dont les quantités émerveillent les économistes? qui leur croire que les ressources énergétriques sont vraiment abondantes , oubliant l'énergie qu'il faut pour l'extraire et le raffiner...
En fait, je ne sais plus si c'est sur oléocène que j'ai lu, ou lors d'un d'un peit déjeuner de l'énergie que j'ai entendu d'un spécialiste, que c'est à peu près aussi difficile de faire du pétrole à partir de ça que depuis le charbon. donc, le problème revient au même. De toute façon, cette ressource est déjà prise en compte dans le scénario de l'ASPO

Tiennel parlait aussi de nucléaire. La situation est encore plus difficile, il faudrait tenir des chiffres énorme, comme doubler le nombre de réacteurs dans le monde, pour avoir quelque chose de sgnificatif face au déclin du pétrole léger.
Globalement, je suis assez confiant dans la diminution des émission de GES, et de la consommation d'énergie (de là, diminution de toute pollution) à partir du pic pétrolier.
Dernière modification par Jeuf le 23 mars 2006, 15:47, modifié 1 fois.

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Message par Tiennel » 27 févr. 2006, 17:30

Je pense qu'on va remplacer le pétrole par le charbon, mais aussi (et d'abord !) par le gaz naturel !
En me basant moi aussi sur le dernier scénario de l'ASPO, j'avais calculé ici que la décroissance hydrocarburesque à gérer était de -0,7%, à partir de 2011 (données Campbell de janvier 2006).

Cette décroissance suppose la conversion partielle au gaz des filières industrielles fondée sur le pétrole. Sauf pour les avions, c'est largement réalisable sans investissement somptuaire.

Si maintenant on ne veut pas accepter cette décroissance de -0,7%, il faudra alors faire appel au charbon et au nucléaire. Et là je pense que, malheureusement, ce redéveloppement de la filière charbon sera supportable pour la plupart des économies. En reprenant tes chiffres, une décroissance de -0,7% pétrole+gaz représente 0,007 * 6 Gtep = 40 Mtep, soit un peu plus de 1% de croissance supplémentaire pour la production de charbon. Un ordre de grandeur qui me paraît (hélas) supportable.

Par contre, en 2045, c'est la catastrophe : la production de pétrole+gaz décroitra brutalement de près de 4% par an, et le charbon sera alors probablement proche de son pic. Sans parler des GES qui auront continué à emplir l'atmosphère :cry:
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Message par Jeuf » 27 févr. 2006, 17:35

Là encore, on ne peut pas remplacer le pétrole par le gaz. Les voiture à gaz sont beaucoup moins efficace(sans parler des camion et bateau qui restent inventer), et transformer le gaz en liquide a aussi un rendement d'1,5 ou 2 tep par tep de carburant liquide.
Je me baser sur le charbon, dont les limites de réserves sont loins d'être atteintes...

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Message par metamec » 27 févr. 2006, 17:49

Devenson a écrit :J'aime bien utiliser entre autres les arguments suivants pour expliquer le peu d'intérêt des "40 ans" :
- imaginez que nous ayons non pas 40 ans, mais 1000 ans de réserves, mais que pour des raisons techniques, on ne puisse plus jamais dépasser le niveau de production actuelle. Dès l'année prochaine, nous serons en situation de pénurie (demande > offre) et la demande sera contrainte !

Je place cette citation de Devenson, car elle s'applique très bien au charbon.
je lis ici ou la que les quantités de charbon sont énormes 100, 200 ans etc... et l'idée cachée derière est que nous ne manquerons pas d'énergie.
Mais la encore le vrai problème est un problème de débit et non de réserves.
Je pense comme Jeuf, que la production de charbon liquifié ne comblera pas le manque de pétrole.
Le charbon a une densité énergétique inférieure au pétrole, son mode d'extraction est plus contraignant (solide=! liquide), et comme l'explique Jeuf les infrastructures à mettre en place sont énormes, même si je pense que les calculs avec hypothèse "si on remplace le manque de pétrole par du charbon alors..." ne sont pas forcément pertinants, car il y aurra bien un mixte énergétique, et surtout des économies
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Message par Tiennel » 27 févr. 2006, 17:51

Là encore, on ne peut pas remplacer le pétrole par le gaz. Les voiture à gaz sont beaucoup moins efficace(sans parler des camion et bateau qui restent inventer)
Ce n'est pas l'avis... de GDF
A Paris, il y a plein de bus qui marchent au gaz... Je suppose que la même technologie pourrait aller sur des camions. Des bateaux qui marchent au gaz, il y en a déjà plein (turbine à gaz). Et même le train, le premier projet de TGV marchait au gaz.
Encore une fois, seul l'avion (de ligne) ne peut pas voler au gaz.
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Message par Mathieu G. » 27 févr. 2006, 17:54

Merci pour ces chiffres Jeuf. Ce qui me parait le plus intéressant dans ce que tu dis, c'est le délai incompressible de 7 ans pour mettre en oeuvre une filière de liquéfaction du charbon. Le pic est proche mais on sera certain de sa date qu'après qu'il ait eu lieu, ce qui me fait dire que personne n'osera engager de l'argent dans ces filières avant le pic et qu'il y aura donc une décroissance pendant au moins 7 ans de la production de pétrole+charbon liquéfié.

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Message par energy_isere » 27 févr. 2006, 21:21

Tiennel a écrit :
Là encore, on ne peut pas remplacer le pétrole par le gaz. Les voiture à gaz sont beaucoup moins efficace(sans parler des camion et bateau qui restent inventer)
Ce n'est pas l'avis... de GDF
A Paris, il y a plein de bus qui marchent au gaz... Je suppose que la même technologie pourrait aller sur des camions. Des bateaux qui marchent au gaz, il y en a déjà plein (turbine à gaz). Et même le train, le premier projet de TGV marchait au gaz.
Encore une fois, seul l'avion (de ligne) ne peut pas voler au gaz.
A Grenoble il y a aussi pas mal de bus qui roulent au Gaz naturel.

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Message par Schlumpf » 27 févr. 2006, 21:39

Mathieu G. a écrit :Ce qui me parait le plus intéressant dans ce que tu dis, c'est le délai incompressible de 7 ans pour mettre en oeuvre une filière de liquéfaction du charbon.
Les références que j'ai pu donner dans le Wiki (pub) parlent de six ans pour batir une centrale selon le mode "Fischer Tropsch" de liquéfaction du charbon. Le probleme le plus gênant pour l'instant étant que ceux qui possedent encore la technique pour le faire partent en retraite les uns apres les autres... (lien VDI 'Verband Deutscher Ingenieure' L'association des ingenieurs allemands). Y a urgence...
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Message par Cassandre » 27 févr. 2006, 22:04

Toulouse : ville de France qui a le plus gros parc de bus au gaz pour le nombre d'habitants ! :D :D :D

(non, parce que si tout le monde y va de son petit « chez moi aussi », pourquoi pas moi ?)
regarder Oléocène
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Message par Tiennel » 27 févr. 2006, 22:06

Selon le wikiqui relaie des statistiques officielles, seulement la moitié des besoins français en pétrole adresse les transports.
Le reste (résidentiel-tertiaire, utilisation comme matière première, production d'électricité, agriculture) ne nécessite que des investissements industriels de faible ampleur pour basculer vers le gaz voire le charbon - sans devoir passer par le CTL.
On notera au passage que la consommation française en pétrole a baissé de 1% entre 2004 et 2005.
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Message par Schlumpf » 27 févr. 2006, 22:14

Tiennel a écrit :On notera au passage que la consommation française en pétrole a baissé de 1% entre 2004 et 2005.
En ce jour de lundi des roses (c'est comme ca que s'appelle le lundi de carnaval en Allemagne) cette nouvelle est à fêter ! Tati tataaaa !
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Message par Tiennel » 27 févr. 2006, 22:36

Bon, tout ça pour dire que je suis d'accord avec Jeuf : en France, on ne reviendra pas de sitôt au charbon. Avant tout, parce qu'on n'en a plus. J'ai actualisé Monde et Energie pour indiquer les principales réserves : USA, Russie et Chine. Voilà ceux qui ont de bonnes raisons de passer au CTL (surtout la Chine qui a ni gisements de gaz ni gazoducs) ; l'Allemagne n'a pas d'énormes réserves mais sera sans doute tenté par son procédé national. La France va se chauffer au gaz et à l'atome, et fera marcher ses diesels avec du biocarburant... et un peu de pétrole quand même : on fait partie des nantis de la planète qui pourront se payer les dernières gouttes ;)
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Message par sceptique » 27 févr. 2006, 23:31

quelques remarques. Le raisonnement de Jeuf se tient globalement. Mais :
Les USA peuvent (et vont malheureusement pour les GES) très vite remplacer le gaz et le pétrole de leurs centrales électriques par du charbon. Nul besoin de CTL alors. Du coup des megatonnes de pétrole ou gaz sont libérés pour les transports. :cry:
Et russes, chinois et d'autres peuvent faire de meme. :cry: :cry:
Le pire : revenir au chauffage urbain au charbon à la place du fuel et du gaz :evil: :evil:
@Schlumpf
Il me semble que sont les Sud-Aficains qui sont le plus en pointe pour le CTL (ils ont repris la technique allemande pendant l'embargo de l'apartheid). Je crois meme qu'ils en font bénéficier les chinois. La technique est donc bien maitrisée.

Philippe
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Message par Philippe » 28 févr. 2006, 00:40

Le gaz ne remplacera pas durablement le pétrole. Sur le continent nord-américain, ils sont au bord de la pénurie de gaz naturel, qu’ils ne peuvent importer que du Mexique (pays qui est maintenant importateur) et du Canada, qui commence à fatiguer (et à renâcler). Les importations de gaz naturel par méthaniers sont encore marginales sur le continent américain.

En Europe, nous sommes un peu moins mal lotis, mais pas tant que cela. Les Pays-Bas sont en déclin, la Norvège aussi. Nous dépendrons de plus en plus de la Russie (demandez aux Ukrainiens et autres pays sur le passage du gazoduc de Gasprom ce que ça fait de dépendre des Russes) et de l’Algérie.

Augmenter la part du gaz pour remplacer le pétrole, c’est serrer un peu plus le nœud coulant.

Cela ne signifie pas que je préconise un retour au charbon ou un recours massif au nucléaire. C’est juste pour dire que « the party is over ». Il va falloir décroître, nolens volens.

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Message par Tiennel » 28 févr. 2006, 08:27

Les grands esprits se rencontrent... La version française du National Geographic (mars 2006) consacre deux articles au charbon. Je vous livre le chapeau :
The National Geographic a écrit :Le prix du charbon bon marché

Le charbon a reconquis ses galons. Si les ressources en pétrole sont en baisse et le prix du gaz naturel en hausse, ce bon vieux combustible peut illuminer nos maisons et alimenter nos usines pendant encore des siècles. Toutefois, cette abondance énergétique risque de nous coûter cher, comme l'explique les 2 articles suivants. Le paradoxe du charbon enquête sur la menace que feraient peser des hordes de nouvelles centrales à charbon sur le climat de la planète. Ci-gît une montagne décrit une autre blessure, contre laquelle il n'existe pas de remède : des paysages et des communautés ravagés par notre soif d'énergie bon marché.
Les photos - comme d'habitude dans ce magazine - sont assez lourdes de sens.
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