reportage avec photos iciDu Kenya à l’assiette, le parcours pas si vert des haricots
Le Monde.fr | 20.02.2015 Par Audrey Garric (Nairobi et Thika (Kenya), envoyée spéciale)
Il est 10 heures ce jour-là et le soleil tape déjà fort sur les hauts plateaux kényans. Dans les champs fraîchement labourés de la ferme Hippo, située à Thika, au nord de Nairobi, des femmes pliées en deux sèment des graines. Plus loin, d’autres récoltent méthodiquement les légumes arrivés à maturité. Dans leurs cagettes : des brocolis, des courges, des piments, du maïs doux, des oignons, des pois et, surtout, des haricots verts, la principale production du groupe AAA Growers, qui se retrouveront trois jours plus tard dans les assiettes des consommateurs anglais ou néerlandais. Avec des récoltes tout au long de l’année et une main-d’œuvre très bon marché, le Kenya est le deuxième exportateur de french beans, comme on les appelle là-bas, à destination de l’Europe, surtout à contre-saison. Un secteur critiqué qui cherche à se verdir.
« Le Kenya a commencé à exporter des haricots verts dans les années 1970. Vingt ans plus tard, c’était l’explosion des ventes, raconte Bernard Tinega, le directeur commercial d’AAA Growers, qui a lancé sa première ferme en 2000. Ici, le climat chaud mais sans canicule est propice aux cultures. Et la main-d’œuvre est très qualifiée. C’est le seul secteur où l’on est vraiment compétitifs. » Au total, les 150 000 fermes kényanes ont exporté en 2014 pas moins de 200 000 tonnes de légumes frais et transformés, dont 32 000 tonnes de haricots verts en vrac, mais aussi en barquettes et sachets, à destination de la Grande-Bretagne, des Pays-Bas, de la France et de l’Espagne. Un marché évalué à 300 millions d’euros par an, dont 20 millions pour les haricots.
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....Ces barquettes, ainsi que les sacs de légumes frais, quittent tous les jours l’entrepôt pour l’aéroport de Nairobi, d’où ils s’envolent chaque nuit vers l’Europe, à 7 000 kilomètres de là.
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.....D’autant qu’avec 250 shillings kényans (2,4 euros) par jour, les 700 ouvriers de la ferme Hippo sont très peu payés, à peine plus que le salaire minimal en vigueur dans le comté (2,1 euros).
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Utilisation de pesticides
Mais ce qui a surtout jeté l’opprobre sur les haricots kényans, c’est qu’ils ne sont pas si verts : nombre de producteurs, en particulier les plus petits, ont pendant des années usé et abusé des pesticides. En 2012, la filière kényane a été profondément ébranlée après la mise en évidence de teneurs résiduelles de produits chimiques, supérieures aux limites autorisées par la réglementation communautaire. Particulièrement visé : le diméthoate, une molécule utilisée dans une vingtaine d’insecticides au Kenya et classée cancérogène possible chez l’humain.
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http://www.lemonde.fr/planete/article/2 ... _3244.html