Croissance économique et agriculture.

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GillesH38
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Croissance économique et agriculture.

Message par GillesH38 » 14 mars 2009, 09:04

Ce post vient d'une tentative de débat sur futurasciences (http://forums.futura-sciences.com/debat ... sants.html, http://forums.futura-sciences.com/debat ... ivite.html) sur l'origine de la croissance, tentatives assez rapidement avortées parce qu'il parait qu'on ne peut pas parler d"économie sur un forum scientifique. Bon ici, on peut, et même si le forum ne comprend pas que des scientifiques, il y en a quand même, et après tout tout le monde peut réfléchir à ça ;-)/

En fait, en débattant sur futura, ça m'a fait repenser à certaines choses, et à force d'y penser, j'ai abouti à une conclusion assez surprenante à première vue, mais qui me semble assez inattaquable.

Voila, je vous livre la conclusion, avant d'argumenter comment j'en suis arrivé là :

le seul vrai moteur de la croissance économique ne serait-il pas finalement l'amélioration de la productivité agricole (j'entends productivité par heure de travail, pas par ha) ?

ça peut paraitre surprenant et à contre courant de penser que seule l'agriculture compte , et pas les inventions techniques et scientifiques, mais néanmoins ça me semble une conséquence assez naturelle de la façon dont on mesure la croissance.

Actuellement, on mesure la croissance par le PIB. Je précise que je ne relance pas du tout le débat sur la pertinence de cet indicateur, je me borne à constater que c'est celui employé, et je m'interroge sur ce qui le fait réellement augmenter.

Le PIB est comptabilisé avec les échanges monétaires. C'est à dire qu'en gros on compte tout l'argent échangé pour différentes choses.
Le problème principal est de compter la "valeur" de cet argent, et on sait très bien qu'il y a quelque chose qui fait augmenter la quantité d'argent échangée, sans rien changer à sa valeur, c'est l'inflation. Donc, pour parler de croissance "réelle", il faut soustraire l'inflation, et raisonner en "monnaie constante".

Jusque là, ça parait normal et ça ne pose pas de problème. Mais creusons un peu ce problème de l'inflation....

Comment l'inflation est-elle évaluée? par le prix d'un "panier" de choses, une moyenne. Or corriger d'un indice calculé sur un "panier" de choses signifie une chose importante : c'est que la valeur en monnaie constante de ce panier reste PAR DEFINITION constante. En effet le facteur d'inflation est par construction exactement le prix du panier, donc en raisonnant en monnaie constante, le prix du panier reste par définition constant.

Ca signifie une chose importante : la croissance globale correspond à l'augmentation du nombre de "panier de base" produits par an, c'est à dire que le "panier" qui calcule l'inflation sert d'étalon de mesure, comme le mètre étalon, dont la valeur est par définition constante.

Il y a quand meme une difficulté de principe : c'est que ce panier n'est en fait en lui meme pas constant, il évolue avec le mode de vie. C'est donc comme si le mètre étalon était élastique et changeait au cours du temps. Du coup on a l'impression que le calcul de l'inflation est un peu arbitraire, et le résultat de la croissance aussi donc. cependant, il y a quand meme des choses physiques invariantes dans l'humanité, a commencer par nos besoins de bases, la nourriture. Interrogeons nous donc si quelque chose comme "la ration calorique de base" quotidienne (genre , 1kg de pain...), peut vraiment avoir une valeur très variable avec le temps. Ce qui revient à se demander si son prix par rapport au "panier" peut énormément varier ?

en réflechissant un peu, on se dit que non. Il n'y a aucune raison que l'alimentation de base change de manière très différente de l'inflation moyenne, ni que 1kg de pain ait une "valeur" humaine très différente au Moyen Age et maintenant, aux Etats Unis ou au Zimababwe. Et c'est en fait le meme probleme que la définition de la "parité du pouvoir d'achat", qui est en fait le meme probleme que l'inflation, sauf que ça consiste à comparer des niveaux de vie séparés (géographiquement) dans l'espace et non (historiquement) dans le temps, en se donnant des "étalons de valeur" sur lesquels on définit un "taux de change réel" , ce qui a exactement le meme effet : on suppose que ces étalons de valeur ont par définition la meme valeur intrinsèque dans ces différents pays , puisqu'on calcule le taux de change effectif par leur prix, ils sont par définition le meme coût quand il est calculé avec ce taux de change.

Ainsi donc on aboutit à une conclusion , un peu surprenante mais pas tant que ça au fond : dans tous les pays du monde, à toutes les époques, une ration calorique quotidienne a à peu près la meme valeur absolue, et les différences de richesse , aussi bien géographiques, que historique (donc toute la croissance économique) peut etre résumée par le fait qu'on gagne une quantité différente de rations caloriques de base par jour et par personne.

En fait, ça peut etre facilement vérifié sur des chiffres, par exemple vous avez le prix du pain (fixé en France jusqu'en 1978)ici, et le calcul du facteur d'inflation peut etre fait ici. Vous pourrez vérifier que le prix du pain en francs courant, divisé par l'inflation, reste à peu près constante !

En poursuivant la logique , nous aboutissons à la conclusion tout aussi logique : c'est que le PIB/habitant en monnaie constante est exactement inversement proportionnelle à la part du PIB consacrée à l'alimentation : la croissance/habitant n'est due QUE à l'augmentation du nombre de rations de base qu'un habitant peut s'acheter; et son inverse est donc exactement la part de l'alimentation de base dans le PIB.

Toujours en continuant la logique, si on suppose que les agriculteurs n'ont aucune raison d'avoir un pouvoir d'achat très différent de la moyenne (OK ils peuvent etre un peu plus pauvre, mais pas ENORMEMENT plus pauvres - sinon ils arretent de travailler aux champs et vont chercher un meilleur boulot !), on aboutit ensuite au fait que l'augmentation du PIB est exactement l'inverse de la proportion de personne (= celle du PIB) employée à l'alimentation, et donc que la source de croissance n'est QUE la diminution du nombre d'agriculteurs employé à nourrir la planète.

personne ne nie que le progrès diminue le nombre d'agriculteurs, mais ca parait extremement surprenant que ce ne soit QUE ce facteur qui permette la croissance, et pas les inventions techniques !

mais en fait, ça ne l'est pas tant que ça. Parce que les inventions techniques donnent des nouveautés, mais pas forcement plus d'rgent pour les acheter ! si on peut acheter des téléphones portables et des ordinateurs, rien ne dit qu'on n'est pas obliger de renoncer à autre chose, si on ne gagne pas plus d'argent. Et donc les nouveautés techniques, contrairement à ce qu'on nous serine, ne sont pas OBLIGATOIREMENT facteur de richesse et de croissance : elles ne le seraient que si elles permettent effectivement une augmentation de la productivité... agricole. Ce qui a bien sur été le cas du machinisme et des engrais, mais ce qui est très loin d'etre assuré dans l'avenir, bien évidemment.

Bon, cette idée parait quand meme toujours bizarre... mais j'en ai trouvé une bonne confirmation ! sur l'excellent site gapminder deja cité ici, vous pouvez porter la proportion du PIB consacrée à l'agriculture , en fonction du revenu par habitant. Vous pouvez tracer l'histoire de ces quantités pour tous les pays du monde, de 1960 à maintenant, en coordonnées logarithmiques

http://graphs.gapminder.org/world/#$maj ... 39_t002005,,,,

LA corrélation avec une pente - 1 est excellente, elle me semble meme une des meilleures que j'ai vues, meilleure qu'avec la consommation énergétique qui est elle assz variable, les efficacités énergétiques etant assez différentes d'un pays à l'autre !!!

je n'ai pas encore réfléchi aux conséquences profondes de tout ça, mais ça me semble une piste très intéressante . Si on peut tout résumer la croissance au temps de travail nécessaire pour produire une ration calorique, l'impact du PO sur l'économie est évident quand on regarde son impact sur l'agriculture.....
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par Phili2pe » 14 mars 2009, 09:44

Si j'ai bien suivi ton raisonnement et en le tirant un peu, tu nous dis qu'il faut pouvoir "manger" pour "croitre"... même dans notre siociété du 21ième...

par le passé, il est donné un coup d'arrêt à "une croissance" lors la fin de l'optimum climatique au début du 14ième, certains lieuxd'habitation et de culture sont abandonnés etc...

si les rendements sont bons en gros on est pas esclave de la terre et une partie de la population n'est pas nécessaire au sillon et disponible pour autre chose... c'est aussi le passage du chasseur-cueuilleur à l'agriculture
Et donc les nouveautés techniques, contrairement à ce qu'on nous serine, ne sont pas OBLIGATOIREMENT facteur de richesse et de croissance : elles ne le seraient que si elles permettent effectivement une augmentation de la productivité... agricole.
en réfléchissant aux conséquences du PO je me demandais si l'énergie ne serait pas en priorité destinée à l'agriculture... car ce que tu dis là finalement les conditions d'une croissance c'est une population nombreuse et bien nourrie non?
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par GillesH38 » 14 mars 2009, 09:48

Phili2pe a écrit : en réfléchissant aux conséquences du PO je me demandais si l'énergie ne serait pas en priorité destinée à l'agriculture... car ce que tu dis là finalement les conditions d'une croissance c'est une population nombreuse et bien nourrie non?
si tu prends la croissance du PIB totale, oui, elle est proportionnelle à la population. Si tu prends celle du PIB/habitant, alors elle ne dépend pas directement du nombre d'habitants, et c'est elle qui détermine le "niveau de vie" (bien sur le Luxembourg a un PIB bien inférieur à celui de la Chine... mais il est bien plus "riche" ;-) ). Mon raisonnement porte sur la richesse par habitant, donc "bien nourri" suffit ;-). La population n'intervient pas directement au départ, mais elle intervient par le fait qu'une croissance démographique finit par saturer les capacités agricoles, et donc diminue le rendement : ça aboutit donc inéluctablement à un appauvrissement par habitant.
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par kercoz » 14 mars 2009, 10:18

GillesH38 a écrit : le seul vrai moteur de la croissance économique ne serait-il pas finalement l'amélioration de la productivité agricole (j'entends productivité par heure de travail, pas par ha) ?
Il faudrait ajouter /KM (distance d'appro).
Un des thèsards de Lemieux (sur les BRF) fait un chapitre sur le fait que les civilisations s'écroulent PAR l'apauvrissement du sol local et la nécessité de chercher des resources agricoles de plu en plu éloignées .
L'agriculture a permis de multiplier la population sur une surface auparavent occupée par des chasseurs/ceuilleurs (peu cultivants).
Cette augmentation s'est effectuée en parrallele avec un lent épuisement de l'humus local.La charrue déversante , malgrés la jachère triennale (10e s , je crois) a , malgres un rendement accru trompeur , augmentée l'entropie du système .
Je suis 100% d'accord avec ta thèse . Mais j'ajouterais a la nourriture , l'autre besoin "primaire" : toit et chaleur.
Perso , j'ai toujours visualisé ça :
le quota actuel est d'env 2/100 (2 nourrisseurs pour 100 nourris).
Sur ce "gain de productivité" se greffe pleins de dérivations economiques (certains pertinents , dautres inutiles)qui ne font que squatter ce "gain"..........puisqu'ils spolient le vrais bénéficiaire : celui qui produit.(c'est un autre débat).
Passer de 2/100 à 30/100 est ds les probas a moyen terme. Et de ce fait tes unités de mesures ramenés a ce quota deviennent évidents.
La "modernité", meme sans energie a bas prix peut nous aider a changer de paradigme et sortir de la fatalité de l'"épuisement des sols .
Cette technologie et ces savoirs (TCS, SD , BRF et compostages, elec residuel....), sans modifier ces quotas , peuvent aider au virage .
De plus 30/ 100 ce n'est pas forcément 30 qui nourrissent 100 ; Ca peut etre 30% d'autonomie ou un combiné des deux modèles.
Les pistes de ta réflexion touchent aussi d'autres concepts : les procédures changeantes, l'eloignement de la production de la consommation actuelle .... ponctionnent et surtout vont pnctionner fortement le système . La ruralité de pourra perdurer .
Cette nouvelle vision devrait aussi modifier des equipements tels que les choix de LGV . les distances courtes seraient plus pertinentes a conjecturer.

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Re: Croissance économique et agriculture

Message par Tovi » 14 mars 2009, 21:53

Et pour amener où ?

Ca ne dit rien non plus sur la nature des besoins. De quoi parles t'on ? De calories ? Des calories d'huile de palme ne sont pas des calories de viande, ni de poisson, ni de pommes, ni de blé etc.
Derrière on a affaire à des schémas économiques totalement différents.

Ensuite, celà laisserait penser que les sociétés obèses, avec des rations énormes par habitant, sont les plus avancées et les plus riches. Or l'obésité touche également les pays pauvres, du fait de la médiocre qualité de ces calories justement, et d'un environnement culturel pauvre.
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par Tovi » 15 mars 2009, 00:51

On est bien d'accord. Mais je ne vois pas le lien avec le post d'origine. C'est à dire en quoi ce genre d'indicateur indique quoi que ce soit d'exploitable.
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par GillesH38 » 15 mars 2009, 09:05

Tovi a écrit :Et pour amener où ?

Ca ne dit rien non plus sur la nature des besoins. De quoi parles t'on ? De calories ? Des calories d'huile de palme ne sont pas des calories de viande, ni de poisson, ni de pommes, ni de blé etc.
Derrière on a affaire à des schémas économiques totalement différents.

Ensuite, celà laisserait penser que les sociétés obèses, avec des rations énormes par habitant, sont les plus avancées et les plus riches. Or l'obésité touche également les pays pauvres, du fait de la médiocre qualité de ces calories justement, et d'un environnement culturel pauvre.
ça n'a rien à voir avec ce que je dis, je ne parle pas de l'obésité et je ne parle meme pas de la ration calorique par habitant (qui sont corrélées à la richesse probablement, mais pas obligatoirement) : je dis juste que le PIB est pratiquement proportionnel à l'inverse du temps travaillé par ration calorique de base, c'est à dire que la croissance économique n'est en réalité QUE déterminée par l'augmentation de productivité agricole. Une fois qu'on est suffisamment nourri, on peut effectivement choisir de manger encore plus ou de faire autre chose de son argent, mais ça ne change pas ce que je dis.
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par GillesH38 » 15 mars 2009, 09:07

Tovi a écrit :On est bien d'accord. Mais je ne vois pas le lien avec le post d'origine. C'est à dire en quoi ce genre d'indicateur indique quoi que ce soit d'exploitable.
en pratique, ça veut dire que tout progrès technique qui ne change pas la productivité agricole n'a pas de chance de provoquer une vraie croissance (par exemple si les nanotechnologies ne changent pas le rendement agricole, elles n'augmenteront pas significativement le PIB non plus : elles créeront de nouveaux gagdgets mais qu'on devra se payer en sacrifiant autre chose, à PIB constant) : ça me parait quand meme assez différent de ce qu'on entend ici ou là !
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par Yves » 15 mars 2009, 11:16

Ca parrait assez intéressant comme idée, ça mérite de bien réfléchir pour valider. Je met de coté le temps de bien assimiler le raisonnement.

Sincèrement, si ça peut se vérifier, c'est une bombe ce truc.
Trop tard, trop peu, trop cher, il n'y aura pas de miracle !!
Notre futur sera d'être la banlieue ouest de la Russie alors que celle-ci aura le regard tourné vers la Chine...

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Re: Croissance économique et agriculture

Message par jml34 » 15 mars 2009, 17:12

Autre hypothese : il y a une bonne correlation entre les gains de productivite dans le domaine agricole et dans la societe en general, parce que les concepts ou technologies applicables en agriculture ont aussi de nombreuses autres applications, et reciproquement.
Si cela est vrai, alors ca ne marcherait pas forcement de chercher une croissance forte en deployant beaucoup d'efforts pour l'amelioration de l'agriculture : il se pourrait bien, pour le coup, qu'on debouche surtout sur des ameliorations specialisees, a l'impact global plus faible.

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Re: Croissance économique et agriculture

Message par Alter Egaux » 15 mars 2009, 20:13

GillesH38 a écrit :Voila, je vous livre la conclusion, avant d'argumenter comment j'en suis arrivé là :

le seul vrai moteur de la croissance économique ne serait-il pas finalement l'amélioration de la productivité agricole (j'entends productivité par heure de travail, pas par ha) ?

ça peut paraitre surprenant et à contre courant de penser que seule l'agriculture compte, et pas les inventions techniques et scientifiques, mais néanmoins ça me semble une conséquence assez naturelle de la façon dont on mesure la croissance.
Elle ne se suffit pas à elle même mais cela m'a toujours paru évident que la "croissance", au sens capitalisme du terme et moteur de la révolution industrielle, était issue de la "révolution verte".
Elle a "libéré" des champs des millions de travailleurs qui sont devenus ouvriers, employés, cadres, et surtout citadins, donnant une force de travail immense pour nourrir la "croissance" capitaliste.
Les rendements ont aussi des conséquences sur l'évolution démographique (disparition des disettes).
Mais tout ceci a déjà été amplement discuté...

La nouveauté, c'est que Gilles vient de réaliser l'importance de la révolution agricole dans le cycle industriel... :-D
Etape n°1 : Les africains nomment le pétrole : la "merde" du diable.
Etape n°2 : Restons cool, le PO arrive...
Etape n°3 : "Mais à cet endroit, en ce moment, l'humanité, c'est nous, que cela nous plaise ou non", Samuel Beckett

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Re: Croissance économique et agriculture

Message par Tovi » 15 mars 2009, 20:14

On ne peut pas reléguer tout le travail "hors-agricole" en une seule et même catégorie "gadget". Déjà, travailler à la chaine dans une manufacture de textiles du XIXème siècle, ce n'est pas exactement pareil que de faire de la conception sur ordinateur avec des automates qui font le sale boulot à la place. L'ouvrier et l'ingénieur sont tout autant déconnectés du monde agricole et des contraintes alimentaires, pour autant leurs conditions de travail et leurs qualités de vie n'ont rien à voir.
Un procédé industriel qui permet de fabriquer 10 fois plus de vêtements qu'un procédé artisanal, mettra au bout du compte sur le marché plus de vêtements et moins chers. Les véritables facteurs limitatifs sont : l'énergie utilisée dans les process industriels, la disponibilité des matières premières et l'impact environnemental (même si ce dernier est souvent négligé car visible seulement à long terme).
A productivité agricole équivalente, on peut avoir deux environnements économiques totalement différents, de l'artisanal au high tech.
Il se trouve que l'agriculture bénéficie également des avancées techniques, mais ce serait inverser la valeur de la logique que de considérer que ce sont les progrès techniques agricoles qui font avancer le reste.
Du reste, celà fait bien longtemps que l'on plus besoin de dégager du temps de travail, il suffit de compter le nombre de chômeurs.
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par kercoz » 15 mars 2009, 21:29

Tovi a écrit :Un procédé industriel qui permet de fabriquer 10 fois plus de vêtements qu'un procédé artisanal, mettra au bout du compte sur le marché plus de vêtements et moins chers.
Tu retombes ds les memes erreurs que celles qui nous ont fait dériver vers cette débacle.
Ton système désenchante l'acte de fabriquer , celui de l'échange /commerce , et renforce l'aliénation (faire le meme geste 8h/j). De plus ça ne marche pas puisque tu acheteras 5ou 8 vetements là ou tu en aurais acheté1. Ce qui fait que ton "post" habillement" doit etre identique.Là ou tu jette un vetement troué , tu le gardais parce que "cher" et de qualité . tu le répares parce que tu t'y attaches et que tu connais l'artisan qui l'a fait.
Tovi a écrit :limitatifs sont : l'énergie utilisée dans les process industriels, la disponibilité des matières premières et l'impact environnemental (même si ce dernier est souvent négligé car visible seulement à long terme)
Compares ces deux modèles et ajoute trajet et circuit.
L'habillement n'est pas "gadget" et comme toiture et chauffage , eau courante et tout a l'égout , il me semble doivent etre compris ds les "besoins essentiels" basiques .
Rien que ces postes colatéraux , font qu'on ne peut dépasser (a la louche) 50% pour le modèle nourrisseur /nourrit .
Tu peux concevoir que ton artisan soit a 40% autosuffisant du point de vue alimentaire ; plus difficilement l'ouvrier textile.

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Re: Croissance économique et agriculture

Message par GillesH38 » 15 mars 2009, 21:37

Tovi a écrit : Un procédé industriel qui permet de fabriquer 10 fois plus de vêtements qu'un procédé artisanal, mettra au bout du compte sur le marché plus de vêtements et moins chers. Les véritables facteurs limitatifs sont : l'énergie utilisée dans les process industriels, la disponibilité des matières premières et l'impact environnemental (même si ce dernier est souvent négligé car visible seulement à long terme).
A productivité agricole équivalente, on peut avoir deux environnements économiques totalement différents, de l'artisanal au high tech.
Il se trouve que l'agriculture bénéficie également des avancées techniques, mais ce serait inverser la valeur de la logique que de considérer que ce sont les progrès techniques agricoles qui font avancer le reste. .
ce que tu dis est à la fois vrai , et faux .

Il est parfaitement vrai que sans changer la productivité agricole, l'amélioration des techniques industrielles permet de fabriquer plus et mieux.

Cependant, il faut bien voir que ça conduit aussi, comme tu dis toi meme, à baisser le prix des objets fabriqués, alors que la richesse de la population augmente, donc aussi le salaire des ouvriers. Sans etre très sur de mes connaissances économiques, je pense que c'est lié à ce que Marx avait identifié comme la "baisse tendancielle du taux de profit. "

Et donc ça n'a donc pas un impact direct sur le PIB, meme si ça augmente la qualité des biens produits (on touche là au délicat probleme que comme tout le monde sait, le PIB ne mesure pas réellement la richesse produite).

Ce que je dis n'est donc relatif qu'à la mesure "comptable" de la croissance en tant que croissance du PIB. Ca n'empeche pas d'améliorer le "contenu" du PIB. Je dis juste que , du moment qu'il y a des "étalons de valeur" relativement constants (et la ration alimentaire de base est difficilement améliorable dans le contenu, bon y a du pain plus ou moins bon, mais c'est limité comme marge de manoeuvre ;-) ), alors la "richesse" mesurée revient en réalité à mesure l'équivalent de nombre d'étalons de base produit, ce qui, sous l'hypothèse de niveaux de vie relativement homogènes, revient à mesurer la proportion d'hommes occupés à travailler pour cet étalon de base, c'est à dire, en pratique , l'agriculture : moins il y en a, plus on est riche.

cependant, je reste moi-même peplexe comme Yves devant ce raisonnement, sans pouvoir trouver d'erreur de base. Y a quand meme des conséquences très curieuses; Par exemple si on passe de 10 % de la population agricole à 5 %, on n'augmente la population qui fait autre chose que de l'agriculture que de 5 % (en passant de 90 à 95 %)... et pourtant suivant mon raisonnement le PIB doit doubler !

simplement parce que le prix "de base" des produits agricoles diminuent par deux, et que si l'inflation est plus ou moins indexée dessus, la valeur des autres biens produits semble avoir doublé ! ça parait bizarre et pourtant je n'arrive pas à trouver de défaut fondamental dans le raisonnement... :-k . En fait je pense que "l'excédent de PIB" est simplement incorporé dans les services, qui coutent eux de plus en plus chers, sans correspondre à rien de très matériel (d'ou l'impression fallacieuse qu'on s'est "débarrassé" de l'influence de l'énergie ).
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Re: Croissance économique et agriculture

Message par Tovi » 15 mars 2009, 22:48

Désolé d'avoir une pensée économique othodoxe mais tout gain de productivité augmente fatalement soit les revenus des actionnaires, soit les revenus des salariés, soit fait baisser les prix et donc augmenter le pouvoir d'achat (localement ou pas). Aucun de ces facteurs n'est garanti individuellement mais il y aura au moins un poste qui en bénéficiera, c'est une question de choix.
Les gains de productivité ne se font pas forcemment sur les salaires. Ce qui pose problème dans le modèle économique actuel c'est l'arrivée d'acteurs comme l'Inde ou la Chine qui engloutissent tous les gains par une masse salariale quasi infinie et docile. Jusqu'ici, les salaires dans les pays émergents avaient plutôt tendance à monter : Taiwan, Corée du Sud etc., ainsi que leur niveau de vie.

En outre, si je reprend mon exemple des vêtements, il ne s'agit pas obligatoirement de porter 10 vêtements, mais par exemple de vêtir 10 personnes. Tout est une question de répartition des gains de productivité encore une fois. Baisse du temps de travail, aide sociale et création de nouvelles activités y contribuent.
Malgré tous ses défauts, ce système basé sur la croissance des richesses produites est très cohérent et efficace. Seulement, il ne prend pas en compte la finitude de certaines ressources, c'est son talon d'Achilles.

L'indicateur de productivité a du sens, mais je ne vois vraiment pas pourquoi il faudrait le cantonner à l'agriculture. Sauf à penser que la capacité à se nourrir est le seul facteur fiable de développement. Ce que je ne pense pas. Car ça ne dit rien sur l'état de santé, sur la pollution, la culture, la sécurité, la liberté, l'accès à l'information et à l'éducation etc.
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