Photovoltaïque : recettes pour une filière industrielle
Le 16 juin 2010 Usine Nouvelle
Le huitième Salon des énergies renouvelables se tient à Paris du 16 au 18 juin. Quatre industriels de la fabrication de modules et systèmes solaires détaillent leur vision du secteur, ainsi que leur actualité.
L’intégré au bâti, un pari gagnant pour Saint-Gobain
Rompu à la fabrication de tuiles photolvoltaïques élégantes, le verrier estime que l’intégré au bâti est une valeur ajoutée importante. Cette technique architecturale plebiscitée par le gouvernement donne à un seul et même panneau photovoltaïque le rôle de producteur d'énergie et de toiture isolante. Soutenu par un tarif de rachat garanti avantageux, l'intégré au bâti met en effet le spécialiste de l'habitat qu'est Saint-Gobain à son avantage.
Ce dernier mise sur la technologie des couches minces CIS, pour lesquelles il atteint un rendement de 12% sur ses lignes de production industrielles. Un rendement qu’il souhaite rapidement porter à 15%. « Nous avons matière à rattraper les plus gros acteurs mondiaux, tel First Solar qui produit 1,2 GW par an », se réjouit Benoît Richard, le directeur général de Saint-Gobain Solar.
Projet d’usine au placard. Néanmoins, la baisse du soutien financier aux centrales sur toiture de grande puissance (plus de 250 kW), dans le cadre des nouveaux tarifs de rachat officialisés par le ministère de l’Energie, a bloqué pour l’instant son projet d’ouverture d’usine en France. L’industriel comptait y déployer une technologie d’intégré au bâti dont il dispose au Luxembourg, via une entreprise produisant 30 MW par an qu’il a rachetée à Torgau. Le site français devait à terme avoir une capacité de production de 100 MW par an, mais le groupe a dû laisser le projet sous la pile, regrette Benoît Richard.
Photowatt mise sur l’innovation avec PV alliance
Avec le CEA et EDF, Photowatt croit au polycristallin au sein de PV Alliance, super labo français destiné à remporter la bataille du rendement. « Certains disent que c’est cuit, que nous avons raté le coche du photovoltaïque et de l’éolien en France. Je m’inscris en faux », souligne René Desserrières, directeur activités systèmes chez Photowatt. « Nous sommes positionnés sur le silicium cristallin, et nous le resterons », indique ce dernier, qui compte sur les baisses de coût à venir.
Des possibilités d’économies existent en amont : la société AEP, dans laquelle le pétrolier Total vient d’investir, a par exemple mis au point un procédé de lit fluidisé pour produire du polysilicium solaire sous forme de granulés à très bas coût. Photowatt pourrait se fournir auprès d’elle. Lors de la fabrication même du panneau, de nouveaux procédés liés aux nanotechnologies devraient permettre au cristallin de devenir très compétitif et de tenir la dragée haute aux couches minces.
Tenesol croit au cristallin
Filiale d’EDF et de Total bassée à Lyon, Tenesol a quant à elle augmenté sa production de modules, à 170 MW par an. Une massification qui lui permet d’être plus compétitif, se réjouit son PDG Benoît Rolland. A Toulouse, l’entreprise développe un plan d’automatisation de sa ligne de production, mais bute encore sur une opération de séchage qui dure 12 longues heures. Alors que le secteur "surchauffe" et que" les prix remontent en ce moment", le fabricant met un point d’honneur à tenir ses engagements sur les prix et les délais, s’enorgueillit son dirigeant.
« Je vois émerger des capacités en France sur les modules cristallins : 500 MW sont en cours de réalisation », s’enthousiasme ainsi Benoît Rolland. « L’assemblage de modules se structure, l’amont pêche toujours un peu », liste ce dernier. Dans le cadre du consortium PV20, l’entrepreneur pense voir se développer une nouvelle filière française silicium, poussée par l’innovation de l’INES. Par ailleurs, 40% de son chiffre d’affaires se fait à l’extérieur des frontières françaises : « il faut penser à l’export », rappelle le patron.
First Solar met les bouchées doubles en zone euro
Enfin, l'américain First Solar, leader mondial du marché photovoltaïque en volume grâce à ses panneaux solaires à couches minces, croit au marché français. L’industriel né dans l'Arizona est victime de son succès : il a beau compter sur une capacité de production de 1,2 GW, ses usines ne satisferont pas la totalité de la demande en 2010. Ses carnets de commandes sont pleins pour deux ans.
Dès lors, l'industriel s'emploie à accroître son volume de production. Alors qu’il a annoncé l’ouverture pour 2012 d’une usine de 110 MW en Gironde, qui créera 400 emplois sur l'écoparc de Blanquefort, l’américain va doubler la capacité de production de son usine de Francfort-sur-l'Oder, dans l'est de l'Allemagne. Cette dernière passera de 223 MW à 446 MW au quatrième trimestre 2011, et plusieurs centaines d’emplois seront créés. Une expansion qui lui permettra aussi d’améliorer sa couverture contre le risque de change : l’entreprise, qui comptait au départ tous ses moyens de production en zone dollar, devrait pouvoir répondre à la demande européenne dans sa propre devise.