La Société générale tente d'apurer le passé
LE MONDE | 14.01.10
Le poids du passé continue de peser sur les espoirs d'avenir de la Société générale. La banque française a annoncé, mercredi 13 janvier, qu'elle doit déprécier ses actifs de quelque 1,4 milliard d'euros sur le dernier trimestre de l'année 2009. Du coup, son bénéfice sur la période ne sera que "légèrement bénéficiaire", a averti la banque, alors que les analystes tablaient jusque-là sur un profit de près de 1 milliard d'euros.
Les marchés ont choisi, mercredi, de se concentrer sur le verre à moitié vide, faisant chuter l'action de la Société générale de près de 3 % dans un marché en légère hausse. Mais l'avertissement sur résultat peut aussi signifier que la banque française commence à entrevoir la fin d'un long tunnel assombri par les actifs toxiques hérités de la crise des "subprime" américains.
Le gros des pertes annoncées - 1,2 milliard d'euros - est en effet lié aux portefeuilles titrisés adossés à des prêts immobiliers résidentiels américains. La banque a décidé d'évaluer de manière plus sévère ces actifs (les "CDOs de RMBS", selon le jargon financier) en raison de ce qu'elle appelle avec euphémisme les "signaux contrastés" provenant du marché immobilier américain au dernier trimestre 2009. Au total, la banque a effacé la moitié de la valeur de cette catégorie d'actifs, qui représentait un montant d'environ 6 milliards d'euros.
L'exposition plus large de la Société générale aux actifs les plus toxiques a expliqué en large partie la sous-performance de son action en 2009, avec une augmentation de 40 % de son cours de Bourse contre 90 % pour celui de BNP Paribas, le grand concurrent. La division de banque de financement et d'investissement, foyer des pertes récentes, est soumise à une cure de rigueur par ses nouveaux dirigeants. Mais dans la période actuelle de transition, la maison mère va lui allouer moins de capital, et il va falloir vivre avec des revenus stables et une rentabilité en baisse.
L'année 2009 a en outre été marquée par une conjoncture exceptionnelle pour les opérateurs des marchés obligataires, mais la parenthèse est sur le point de se refermer, et les profits inattendus ne pourront plus cacher les zones à problèmes.
La Société générale veut rester prudemment optimiste pour 2010, compte tenu de la bonne performance opérationnelle de la plupart de ses divisions. Mais elle indique aussi que ses provisions au dernier trimestre seront du même ordre de grandeur que celles du trimestre précédent, qui étaient relativement élevées. Une reprise économique mollassonne risquerait ainsi de raviver les craintes sur la qualité du portefeuille de crédits de la banque, et son exposition aux marchés à risque de Russie et d'Europe de l'Est.
A peine sortie d'un passé troublé, la Générale pourrait alors faire face à un avenir à problèmes.
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