Bonjour à tous, je réessaye de comprendre la pensée de Jancovici après avoir écouté
sa conf' sur Youtube. Initialement j'étais
sur FS en essayant aussi de comprendre si les piscines de refroidissement risquent d'exploser ou non comme on en avait discuté lors de Fukushima, mais il est très difficile d'avoir des interactions constructives sur FS. Peut-être que ça intéresse du monde ici ?
1) Notre modèle de civilisation est menacé d'effondrement à une certaine échéance. Quelque part entre 2040 et 2150 ?
-> 1a) Si nous ne parvenons plus à obtenir beaucoup d'énergie, ça s'effondre
-> 1b) Si nous relâchons trop de CO2 (et autres gaz à effet de serre) nous aurons un réchauffement ingérable, ça s'effondre
-> 1c) Donc nous devons rapidement obtenir de l'énergie avec peu de gaz à effet de serre. Objectif : fermer les centrales à charbon
Note : « effondrement » évoque quelque chose de brutal et catastrophique. En toute rigueur la contrainte est que des paramètres diminuent rapidement, y compris le paramètre « population ».
2) Par quoi remplacer les centrales à charbon ?
-> 2a) Par des économies et des EnR. Nécessaire mais insuffisant.
-> 2b) Par de la fusion ou des EnR du futur. Trop tard, sauf révolution technique arrivant vraiment rapidement.
-> 2c) Un effondrement par un autre mécanisme fait disparaître le problème
-> 2d) Par des centrales nucléaires
3) Donc nucléaire rapidement ou effondrement. Scénarios à éviter :
-> 3a) Le nucléaire provoque un effondrement suite à une série d'accidents majeurs (catastrophes naturelles, terrorisme, guerre conventionnelle, erreurs...)
-> 3b) Le nucléaire arrive trop tard, ou s'ajoute aux centrales à charbon sans les remplacer
-> 3c) Ça s'effondre quand même et l'héritage nucléaire est un problème important pour les survivants
Le débat sur le nucléaire porte habituellement sur 3a uniquement. Du coup l'aspect balance bénéfices-risques est complètement passé sous silence et la population veut un nucléaire à risques 0.
Mon évaluation au doigt mouillé est qu'on se dirige vers 3b avec les deux à la fois : du nucléaire trop tard (résistance du public) qui ne remplace même pas le charbon (il faudra une forte volonté politique pour qu'il reste là où il est). Quoi qu'il en soit, même avec une mitigation efficace des risques du réchauffement, les épuisements de ressources continueront à nous menacer d'effondrement, et le nucléaire conventionnel ne fait que repousser la question de l'énergie, sans garantir qu'une réponse sera finalement trouvée.
C'est pourquoi je m'interroge sur 3c, l'héritage du nucléaire en cas d'effondrement. Il faudrait peut-être que je scinde cette discussion en deux, la partie suivante dans un fil sur la sûreté nucléaire ?
Il est un peu hasardeux d'imaginer la forme que pourrait prendre cet effondrement, parce que ce serait le premier effondrement d'une civilisation technologiquement avancée. Je n'arrive pas à me représenter un effondrement « géré », j'imagine plutôt un point de rupture, des pouvoirs locaux débordés par l'anarchie.
En tout cas, pour une centrale donnée, à un intant t la structure qui gère la centrale constate qu'elle ne peut plus gérer et s'oriente vers une fermeture. On est donc dans un cadre où, indépendamment de toute considération nucléaire, une grande partie de la population régionale est morte à relativement brève échéance et les survivants auront des taux de mortalité nettement plus élevés que ce que nous connaissons. On ne va donc pas chipoter pour une petite élévation d'un risque de cancer.
Peut-être même y aurait-il des avantages à (sur)vivre près de la centrale... avec piscine chauffée. On est complètement sorti de ce qui est étudié habituellement.
D'après ce que je comprends des piscines (et donc de toute la centrale en fait si l'on a bien eu le temps de décharger le cœur)
Pa) il n'y aura pas de rejets importants tant qu'elle reste en eau
Pb) il est habituel de considérer qu'une piscine dégage sa chaleur par convection naturelle et ne risque pas de se retrouver hors d'eau, mais c'est faux dans certains (beaucoup de ?) cas. Ça me paraît techniquement réalisable de prévenir ce risque, en fonction de la densité des fûts chauds et de la masse d'eau. Reste à voir combien de temps il faut que ça tienne tout seul avec du Mox par exemple.
Pc)
si les fût se retrouvent au moins partiellement hors d'eau alors qu'ils dégagent encore beaucoup de chaleur, diverses situations sont envisageables. Les phénomènes peuvent être complexes et il est nécessaire de recourir à des simulations pour explorer certains scénarios. Cela a été fait dans le cadre d'une hypothétique attaque terroriste (
http://www.nap.edu/read/11263/chapter/7 il serait utile de trouver d'autres sources ) mais pas dans l'hypothèse d'un abandon prolongé de centrale. On peut avoir des feux de la gaine de zirconium qui dégagent de la radioactivité en aérosols, et éventuellement du H2 avec risque d'explosion. On peut avoir des fusions de combustible avec risque de stratification du corium résultant en une masse critique locale, et là aussi explosion.
Pd) s'il n'y a pas d'explosion, je ne sais pas si ça veut dire que les rejets en aérosols n'iront pas très loin ?
Pe) risque hydrogène : il est habituel de considérer qu'une explosion H2 est impossible dans une piscine qui se découvre. Pourtant certaines simulations le retrouvent. Il faut sans doute des conditions particulières que la conception de l'enceinte peut interdire ?
Pf) risque critique : des moyens de prévention sont envisagés mais je n'ai pas compris.
En conclusion provisoire, une piscine peut péter mais les moyens ne manquent pas de pallier au risque. Il faudrait que le cahier des charges tienne compte du risque d'abandon et que des modélisations soient faites.