Hypothèses : contrairement à la plupart des scénarios, je ne suppose pas que la croissance économique/énergétique soit un a priori : je suppose que la consommation du XXIe siècle, au contraire de celle du XXe, sera principalement limitée par les ressources disponibles. J'adopte un modèle "logistique" à la Lahérrère (qui a deja fait ce genre d'estimation d'ailleurs). Ce modèle suppose que la production P(t) est liée à la quantité extraite à l'instant t Q(t) par une loi parabolique
[réédité erreur de typo]
P(t) = 4 Pmax Q(t) (1-Q(t)/Q0)/Q0
Où Q0 est l'utime recouvrable et Pmax la production maximale atteinte pour Q(t)=Q0/2. Ce modèle n'est qu'une approximation grossière et ne décrit pas les "accidents" de production, mais
- il donne une courbe raisonnable "en cloche".
- il donne bien sûr la bonne quantité totale extraite.
- il permet de trouver une solution analytique à la courbe P(t).
Donc il ne prétend pas être prédictif sur la courbe exacte, en revanche il en donne une forme grossière et peut etre utilisé lorsque les résultats dépendent surtout de la quantité produite : c'est le cas pour le CO2 qui n'est pas très sensible aux fluctuations à court terme mais dépend essentiellement de la quantité totale balancée dans l'atmosphère sur 100 ans (le temps de résidence).
La solution de l'équation logistique dépend de 3 paramètres ajustables :
- la quantité totale Q0
- la production maximale Pmax
- le moment du pic.
(pour les matheux, l'intégration de l'équation différentielle fournit
P(t) = Pmax/ch(2*(t-Tpic)*Pmax/Q0)^2)
J'ai donc pris essentiellement les chiffres de Lahérrère pour Q0, et j'ai ajusté des valeurs raisonnables de Pmax et Tpic pour reproduire les courbes deja connues.
Pour ceux intéressés par les valeurs numériques, voilà les valeurs que j'ai utilisées :
Liquides (pétrole conv+ non conv)
Q0 = 3000 Gbl (410 Gtep)
Pmax = 31 Gbl/an (4,2 Gtep/an)
Tpic = 2015
Gaz
Q0 = 12 000 Tcf (10^12 pieds cubes) soit 310 Gtep
Pmax = 128 Tcf/an (3,3 Gtep/an)
Tpic = 2030
Charbon
Q0 = 1200 Gt (800 Gtep)
Pmax = 6,75 Gt/an ( 4,5 Gtep/an)
Tpic = 2070
A cela, je rajoute le nucléaire, un peu au pif
Q0 = 90 Gtep
Pmax = 1 Gtep/an
Tpic = 2040
et l'hydraulique +renouvelable : je n'ai pas considéré qu'il suivait une loi logistique (bien que Lahérrère considère cela comme possible même pour les renouvelables), mais qu'il croissait vers une limite de 1,5 Gtep/an. Pour le CO2, ça ne compte pas. Pour l'énergie totale, on peut en discuter mais ça sert au moins de référence de base.
Voila les résultats comparés aux données récoltées sur le site de BP
Consommation d'énergie par source :

Bien sur les irrégularités du pétrole et du charbon ne sont pas reproduites (en revanche le gaz fitte assez bien). Mais on ne cherche que l'allure de la courbe et la surface totale.
Représenté en superposé, la "Tartiflette" énérgétique

Pic pétrole en 2015 (supposé au départ)
Pic pétrole+gaz en 2020
Pic fossiles en 2030.
Je rajoute des hypothèses pour la population mondiale : pic en 2050 à 9 milliards d'habitants. Je fitte aussi par une courbe logistique, même si c'est moins justifiable, mais ca fitte bien. J'en déduis aussi la courbe d'énergie totale (pic à 12,8 Gtep/an en 2030) et de la courbe de CO2 (pic aussi en 2030 à 9,1 Gt eq C /an)

[EDIT]Cette partie a été modifiée ici.
Finalement j'ai estimé aussi la concentration en CO2. Pour cela, ne disposant pas des modèles sophistiqués du GIEC, j'ai fait un "modèle du pauvre" en ajustant l'augmentation de CO2 chaque année par
delta PPM = A PCO2 - B(PPM-280)
A et B sont des constantes représentant l'une l'influence de la production de CO2 anthropique (PCO2) sur la concentration, et l'autre l'absorption par les milieux naturels (océans), ajustée de façon qu'on retrouve la concentration de 280 ppm avant l'ère industrielle pour PC02 =0
. A et B sont ajustés pour reproduire les points observés
(voir par exemple http://cdiac.ornl.gov/ftp/maunaloa-co2/ )
Voilà la courbe calculée , superposée à la consommation énergétique /habitant moyenne mondiale (en tep/hab/an).

Bilan : grâce au pic en 2030, non prévu même par les scénarios les plus optimistes du GIEC, la concentration en CO2 pique en 2060 à 440 ppm. Le rechauffement n'excède pas 1°C, ce qui reste modéré. La consommation d'énergie/habitant pique en.... 2010 c'est à dire demain, mais ne descend pas non plus de manière trop dramatique. Elle finit même par se stabiliser à cause de la décroissance démographique, mais cette dernière n'est pas certaine, elle vient juste de l'hypothèse logistique. En tout cas on reste dans des consommations énergétiques voisines du milieu du XXe siècle, même si bien sur le pétrole a presque disparu en 2100 : après on peu gloser sur la quantité de CTL et de voitures électriques qu'on peut avoir...Si vous supposez beaucoup plus de nucléaire (mais alors il faudra de la surgénération) on peut augmenter cette valeur.
Bilan :le scénario le plus simple reposant sur les réserves raisonnablement estimées evite à la fois un RC catastrophique et un écroulement des ressources énergétiques à la Olduvai. Neanmoins, il n'est pas compatible non plus avec la croissance indéfinie. L'humanité stagne et recule, mais la civilisation ne disparait probablement pas, en tout cas pas du vivant de n'importe quel lecteur de ces lignes !

Finalement, pour moi la conclusion est que beaucoup de scénarios catastrophes sont en fait improbables, aussi bien pour le RC que pour la consommation d'énergie. Notons que si en partant de ce scénario "médian", on augmente un des problèmes, alors on diminue l'autre !