Exploitation minière et développement durable

Discussions libres mais portant sur le thème général de la déplétion.

Modérateurs : Rod, Modérateurs

Avatar de l’utilisateur
gte79
Charbon
Charbon
Messages : 255
Inscription : 18 janv. 2007, 18:20
Localisation : Quelque part pas loin de chez moi

Exploitation minière et développement durable

Message par gte79 » 03 févr. 2007, 23:45

Bonjour à tous,

ceux qui ont lu ma présentation auront compris que c'est un sujet qui m'intéresse :)

C'est pourquoi j'ouvre ce topic, qui ne traite pas directement du pic pétrolier, mais d'un sujet lié : les ressources minérales.

Elles non plus ne sont pas infinies, et sont revenues en 2006 sur le devant de la scène avec une hausse des prix sans précédent. Quelles sont les perspectives en terme de réserves ? Quelle sera la place du recyclage dans l'industrie du futur par rapport à l'extraction de matières "fraîches" ?

Quelle place pensez-vous que le secteur des matières premières (hors hydrocarbures) va prendre dans l'avenir ? Va-t-on voir des conflits liés à leur contrôle comme c'est déjà le cas pour le pétrole ? Peut-il y avoir une brutale récession chinoise qui fasse dégringoler la demande et les prix ?

Développement durable d'un point de vue économique et social : impact de cette industrie sur l'économie des pays en développement ? Quels sont les solutions pour qu'elle profite à tous (transparence financière, etc...) ? Comment éviter que les profits aillent parfois alimenter, entre autres, des guerres civiles ?

Développement durable d'un point de vue environnemental : l'industrie minière a un impact indéniable sur l'environnement, qui peut-être vraiment limité quand on s'en donne les moyens. Votre avis sur la question ? Comment pensez-vous que cela va évoluer ?

Bref tout cela fait beaucoup de questions, en gros je résume : y a pas que le pétrole qui s'épuise, les ressources minières aussi! Qu'en est-il des réserves, de la place du recyclage, du développement durable de cette industrie tant pour l'homme que son environnement ?

Toutes vos réponses, vos questions, c'est ici ! ;)
Dernière modification par gte79 le 03 févr. 2007, 23:50, modifié 1 fois.

Avatar de l’utilisateur
gte79
Charbon
Charbon
Messages : 255
Inscription : 18 janv. 2007, 18:20
Localisation : Quelque part pas loin de chez moi

Message par gte79 » 03 févr. 2007, 23:47

Et voilà un premère contribution pour lancer le sujet :

http://www.nrcan-rncan.gc.ca/media/news ... 585a_f.htm

Source : site web du gouvernement canadien.

Forum intergouvernemental sur le développement durable de l'exploration et de l'utilisation des minéraux et des métaux

Le Forum intergouvernemental sur le développement durable et de l'exploitation minière et de l'utilisation des minéraux et les métaux est l'une des initiatives de collaboration volontaire présentée dans le plan de mise en œuvre du Sommet mondial qui a eu lieu à Johannesburg en Afrique du Sud en 2002.

Le Dialogue mondial, l'initiative qui a été mise au point par les gouvernements nationaux ayant un intérêt dans le secteur des mines, des minéraux et des métaux, a été parrainée par le Canada et l'Afrique du Sud. Les 53 pays qui ont participé au Dialogue mondial ont estimé que leurs objectifs seraient plus facilement atteints par l'établissement d'un forum intergouvernemental consacré au secteur des mines et des métaux.

Le Forum veut assumer un rôle de leadership dans la mise en œuvre des priorités du paragraphe 46 du plan de mise en oeuvre du Sommet mondial sur le développement durable concernant les répercussions et les avantages de l'exploitation des mines, des minéraux et des métaux, le renforcement du rôle des parties intéressées dans la mise en valeur des minéraux ainsi que la promotion de pratiques minières durables.

Le Canada, représenté par Ressources naturelles Canada, a accepté d'assurer les services de secrétariat pour la période initiale de cinq années; après quoi on examinera si le Forum doit continuer d'exister. L'assemblée inaugurale du Forum aura lieu du 7 au 9 novembre 2005, à Genève en Suisse.

Parmi les sujets qui seront abordés, on peut mentionner les cadres stratégiques nationaux, la combinaison de politiques qui peut assurer la meilleure répartition possible des retombées économiques et sociales à l'échelle locale, régionale et nationale, et la sécurité financière et la protection de l'environnement, en particulier au sujet de la réhabilitation et de la fermeture des mines.

Au cours de l'assemblée, les pays membres décideront de la meilleure façon de se préparer à l'examen de la Commission des Nations Unies sur le développement durable, prévu pour 2010.

Actuellement, l'Afrique du Sud, l'Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Burkina Faso, le Burundi, le Canada, l'Éthiopie, le Gabon, le Ghana, le Kazakhstan, la Jamaïque, le Kenya, le Madagascar, le Malawi, le Mali, la Mauritanie, le Maroc, le Niger, le Nigéria, les Philippines, la République dominicaine, la République de Guinée, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Russie, le Sénégal, , le Suriname, le Swaziland, la Tanzanie, l'Ouganda, l'Uruguay et la Zambie sont membres du Forum.

L'initiative est soutenue par la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, le Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies, le ministère du Royaume-Uni pour le développement international, la Banque mondiale ainsi que les ministères canadiens des Resources naturelles, des Affaires étrangères et du Commerce international.
Dernière modification par gte79 le 04 févr. 2007, 00:14, modifié 1 fois.

Avatar de l’utilisateur
gte79
Charbon
Charbon
Messages : 255
Inscription : 18 janv. 2007, 18:20
Localisation : Quelque part pas loin de chez moi

Message par gte79 » 03 févr. 2007, 23:54

Voici le paragraphe 46 du Plan de mise en oeuvre du Sommet mondial pour le développement durable :

Source : http://www.un.org/esa/sustdev/documents ... pitre4.htm

46. Les activités minières, les produits minéraux et les métaux sont importants pour le développement économique et social de nombreux pays. Les produits minéraux sont essentiels pour le mode de vie moderne. L’accroissement de la contribution des activités minières, des produits minéraux et des métaux au développement durable implique qu’on agisse à tous les niveaux pour :

a) Soutenir les efforts visant à s’occuper des effets et avantages environnementaux, sanitaires et sociaux, y compris pour la santé et la sécurité des travailleurs, des activités minières, des produits minéraux et des métaux, tout au long de leur cycle de vie, et s’appuyer sur une série de partenariats, en renforçant les activités existantes aux niveaux national et international entre les gouvernements intéressés, les organisations intergouvernementales, les compagnies minières, les travailleurs et les autres parties prenantes pour promouvoir la transparence et l’obligation de rendre des comptes, en vue d’un développement durable des activités minières et des produits minéraux;

b) Encourager la participation des parties prenantes, y compris les populations locales et autochtones et les femmes, pour qu’elles jouent un rôle actif dans la mise en valeur des produits minéraux et des métaux et le développement des activités minières, tout au long du cycle de vie de l’exploitation des mines, y compris après leur fermeture en vue de la réhabilitation des sites, conformément aux réglementations nationales et en tenant compte des impacts transfrontières significatifs;

c) Promouvoir le recours à des pratiques minières durables, en apportant aux pays en développement ou en transition un soutien financier, technique et en matière de renforcement des capacités en ce qui concerne l’exploitation minière et le traitement des produits minéraux, y compris pour les activités minières à petite échelle, et améliorer, là où il est possible et il convient de le faire, les processus générateurs de valeur ajoutée, actualiser les informations scientifiques et technologiques et reconvertir et réhabiliter les sites dégradés.

Avatar de l’utilisateur
Environnement2100
Hydrogène
Hydrogène
Messages : 2489
Inscription : 18 mai 2006, 23:35
Localisation : Paris
Contact :

Message par Environnement2100 » 04 févr. 2007, 02:15

Il me semble que le sujet a été abordé ici même, étudié, répété, rappelé. Il a fait l'objet d'une discussion, d'un scandale et de plusieurs engueulades.

Il y a même eu un moment où chacun savait bien plus qu'il n'aurait voulu sur l'état de déplétion du palladium et du wolfram.

Ca n'a pas empêché l'un d'entre nous de rappeler la quantité exacte d'uranium présente dans un jardin de 100 m².

Au total, oui, c'est un sujet. Mais nous avons un peu de mal à suivre toutes les déplétions en cours : qui trop embrasse mal étreint (électrique bien sûr).
Trop de mépris entraîne des méprises - Phyvette, ca 2007.

Avatar de l’utilisateur
gte79
Charbon
Charbon
Messages : 255
Inscription : 18 janv. 2007, 18:20
Localisation : Quelque part pas loin de chez moi

Message par gte79 » 04 févr. 2007, 15:42

Une archive du monde diplomatique, qui date de 1998, mais n'en est pas moins très intéressante.

Les nouveaux acteurs du secteur minier africain

Les pays producteurs de diamants et de métaux rares en Afrique, parfois qualifiés de « scandales géologiques » en raison de l’énormité de leurs ressources, sont aussi, souvent, les moins développés : leurs dirigeants ont consacré plus d’énergie à s’assurer le contrôle de ces richesses qu’à tenter d’en faire profiter leurs citoyens. Les ressources minières ont été le nerf des guerres civiles en Angola, au Liberia, au Sierra Leone ou en République démocratique du Congo, pour le plus grand profit des opérateurs internationaux.

Par François Misser et Olivier ValléeDepuis la seconde guerre mondiale, le continent africain est un producteur essentiel de métaux stratégiques : le Congo belge avait assuré la livraison d’uranium aux Américains, tandis que les nazis rêvaient d’un axe ferroviaire entre Alger et le Niger, pour évacuer les minerais... La production de cobalt du continent couvre 40 % des besoins mondiaux et la République démocratique du Congo (RDC, ex-Zaïre) détient à elle seule 50 % à 60 % des réserves connues dans le monde ; le deuxième producteur est la Zambie, qui pourrait être rejoint par l’Ouganda, après la mise en exploitation de la mine de Kasese.

L’Afrique assure aussi la livraison de la moitié, en volume, du diamant mondial. Les grands producteurs sont la République démocratique du Congo, le Botswana et l’Afrique du Sud. Selon le Bureau américain des mines, 90 % des réserves de métaux du groupe du platine (platine, palladium, rhodium, ruthénium, iridium et osmium) sont situés en Afrique du Sud. Le Zimbabwe en est également producteur ; d’autres pays, comme le Burundi, l’Ethiopie, le Sierra Leone ou le Kenya détiennent des réserves connues ou probables.

Jusqu’au début des années 80, cette importante source de minerais stratégiques fut un élément-clé de la politique américaine et européenne à l’égard du continent africain. Les interventions militaires, lors de la sécession du Katanga en 1960 (1), ou des deux « guerres du Shaba » à la fin des années 70, comme le soutien - occulté - à l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid, permettaient aux militaires et aux gestionnaires de la sécurité industrielle de l’Occident de faire cause commune pour « sauver la route du Cap » et éviter que le coffre-fort minéral du monde libre ne tombe aux mains des « rouges ».

Le marché des minerais non énergétiques est cependant resté faible en valeur, dans les échanges mondiaux, par rapport à celui des hydrocarbures, si l’on excepte le commerce de la bauxite (2). Cette stagnation en volume, ainsi que les fluctuations des prix ont touché particulièrement le continent africain.

Au Congo, les industries, implantées depuis longtemps par de grandes sociétés - I’Union minière du Haut-Katanga exploite le cuivre depuis 1906 et le cobalt depuis 1924 -, ont souffert du manque d’investissement, après que leur nationalisation les eut transformées en source de profit pour les proches de Mobutu. De 1988 à 1993, la production de cuivre est passée de 465 000 à 48 400 tonnes, celle du zinc de 47 300 à 4 200 tonnes, le cobalt de 10 000 à 2 400 tonnes... Seul le diamant a fait exception, avec une production fluctuant entre 13 et 18 millions de carats.

Ces statistiques du diamant, souvent approximatives, la production et la commercialisation « informelles », ainsi que le transit par des pays de complaisance, ont contribué à brouiller l’image d’un secteur dont on ne connaît pas exactement le montant réel des échanges. La contrebande et les détournements, qui touchent l’ensemble de l’Afrique diamantifère, ont fini par s’étendre à d’autres minerais comme le cobalt, l’or, ou le cuivre, qui - au Congo comme ailleurs - ont été pillés, vendus à des traders extérieurs, et expédiés vers le reste du monde.

Le président Mobutu Sese Seko avait privatisé une grande partie du sous-sol de son pays, après avoir monopolisé la rente du secteur industriel minier. Il y a eu ainsi conjonction entre un marché mondial peu porteur pour les productions minières africaines, et la désagrégation des cadres institutionnels et industriels de la production, sur un continent qui s’enfoncait dans la crise politique et économique.

Ainsi, à côté d’un marché minier stagnant pour l’Afrique, une série d’enclaves d’extraction du diamant ont suscité, depuis la fin des années 80, l’intérêt de nouveaux opérateurs, et encouragé une vaste économie informelle, sous forme d’exploitation artisanale, qui a concurrencé la production industrielle. Les monopoles de la centrale du diamant du conglomérat De Beers, ainsi que de plusieurs filières publiques d’exportation des Etats africains, ont été remis en cause, puis contournés par des circuits de fraude, afin d’échapper à la fiscalité et au contrôle des changes.

L’incrustation, à travers le diamant, de cette logique de rente dans des pays ravagés par la misère, les conflits et la corruption, a facilité l’irruption d’acteurs qui empruntent leurs méthodes, leurs marchés et leurs ambitions aux mafias internationales, aux intérêts géopolitiques et au recyclage de l’argent sale. La fraude du diamant se compte en millions de dollars et la vente des pierres est devenue le deuxième poste à l’exportation de l’Afrique, après le pétrole.

Cette manne, qui échappe au contrôle des groupes internationaux à la différence de la filière pétrolière, a aiguisé les appétits des parties en guerre au Liberia, au Sierra Leone ou en Angola. Les artisans africains de l’extraction, les « creuseurs » et les acheteurs de diamants de tous pays ont été les relais ou les complices de ces affrontements politiques et armés. Les quelques pans industriels de l’activité minière qui subsistaient dans ces pays ont souvent fait appel aux mercenaires ou à des forces paramilitaires comme la Société minière de Bakwanga (MIBA).

Les Etats se sont associés aux aventuriers. Et les méandres des filières de fraude ont embrasé une bonne partie du continent africain, dans des conflits dits de « faible intensité » ou des guerres civiles meurtrières.

La militarisation de l’activité économique
Pour de nombreux groupes miniers, qui voient dans la dégradation des monopoles publics autant de brèches attirantes, ce modèle de la traite minière dérivé du diamant a servi de leçon. La reprise de l’économie mondiale à partir du milieu des années 90, et la stabilité des cours du pétrole ont ravivé l’intérêt et la capacité d’investissement pour les autres minerais dont l’Afrique regorge, de l’or classique au niobium, en passant par le magnésium.

L’ex-Zaïre donne un avant- goût des nouvelles stratégies minières dans une Afrique incertaine, entre transition démocratique et libéralisation économique. Le Congo « démocratique » dispose des deux tiers des réserves mondiales de cobalt, du dixième du cuivre, du tiers du diamant, ainsi que d’un potentiel appréciable d’or, d’uranium et de manganèse.

Quelques figures illustrent les positions des acteurs miniers, comme celle de M. Maurice Templesman, un ami du maréchal Mobutu, qui aura brassé cuivre et diamant, y mêlant la politique internationale : il avait su persuader l’ex-président démocrate américain M. James Carter que le meilleur gardien du trésor congolais - bien qu’aussi son voleur - restait bien le maréchal Mobutu. La CIA avait alors son principal bureau africain à Kinshasa : ses agents, héritiers de la lutte contre l’ancien premier ministre nationaliste Patrice Lumumba (3), représentaient des acolytes des diamantaires pour leurs opérations d’extraction et d’exfiltration.

Cette gestion des mines selon le modèle rentier a contribué à ruiner le secteur industriel, et à étendre la crise dans tous les secteurs, devenant - bien plus que La Baule (4) - le ferment de la contestation des régimes autocratiques que Paris et Washington avaient si longtemps couvés.

Avec la transition démocratique de 1991, les généraux zaïrois s’étaient reconvertis eux aussi dans la chasse au diamant, boudant leurs missions de répression. S’affranchissant peu à peu de la tutelle politique et financière du maréchal, ils étaient devenus autant de « seigneurs des carrières », en cheville avec des escrocs et des faussaires, mais à l’abri de toute sanction.

D’une dictature de fer, l’ex-Zaïre était passé peu à peu à une oligarchie régionalisée et privatisée (5), qui ne disposait plus du ressort nécessaire pour résister à l’avancée de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) dirigée par M. Laurent-Désiré Kabila : ce groupement, outre qu’il disposait d’un véritable sanctuaire au Kivu, baignait dans le contexte de la nouvelle économie minière zaïroise décentralisée, devenue l’« affaire de chacun », dans un monde de paupérisation où les « cailloux » représentaient l’unique espoir de ne pas mourir de faim. M. Maurice Templesman n’a pu cependant contrarier le nouveau cycle politique que Washington voyait se dessiner, avec de nouveaux responsables comme l’Ougandais Yoweri Museveni ou le Rwandais Paul Kagamé.

Le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA), le parti au pouvoir en Angola, confronté lui-même dans sa région riche en diamants, le Lunda Norte, à la résistance de M. Jonas Savimbi - qui mène, à travers l’Union nationale pour l’unité de l’Angola (Unita), une lutte sans merci contre Luanda grâce aux ressources minières extraites par ses soins et exportées par avions entiers - a été conduit à aider l’AFDL de M. Laurent-Désiré Kabila dans la conquête du Shaba, une des grandes provinces minières de l’ex-Zaïre : afin de fermer une des voies de sortie des diamants du Lunda Norte.

Grâce aux richesses minérales des régions dont elle prenait le contrôle, l’AFDL put trouver les munitions nécessaires à sa guerre de libération. Elle se donna du même coup des alliés provisoires et surprenants, comme le colonel belge Willy Mallants, l’un des plus importants propriétaires de la Société congolaise minière du Kivu, qui exploite l’or du Maniéma (6), frère d’armes de certains des militaires belges ayant participé à la mise à mort de Patrice Lumumba comme à la mise en orbite du maréchal Mobutu.

D’autres hommes - et d’autres pratiques - se placent dans le fil de la mutation minière qui accompagne la transformation politique du continent, comme M. Jean-Raymond Boulle. Né à l’île Maurice, il fut le plus jeune directeur général de la compagnie De Beers dans l’ex-Zaïre, puis se lança dans la vente à grande échelle de diamants au Texas, et fonda en 1992 Diamonds Fields Ressources, qu’il revendit en 1996 au canadien Inco, après avoir coté en Bourse un gigantesque gisement de nickel et de cobalt. En 1995, il a fondé American Mineral Fields dont l’objectif déclaré est de permettre aux investisseurs américains de participer à la mise en valeur du sous-sol africain.

Le projet de M. Jean-Raymond Boulle est de réactiver la mine de Kapushi, propriété de la Générale des carrières et des mines (Gécamines), compagnie d’Etat qui produisait jusqu’en 1988 plus de 100 000 tonnes de zinc et de 50 000 tonnes de cuivre. Il pense pouvoir revenir à ces niveaux rapidement, avec un investissement de 50 millions de dollars, en joint venture (entreprise à capitaux mixtes) avec la Gécamines. Mais l’« homme aux mains de diamant » a aussi un accord de partenariat avec l’Anglo-American Corporation of South Africa, le géant de l’or, qui financerait les 100 premiers millions de dollars de tout investissement réalisé conjointement au Shaba. Il a également un accord d’association pour le diamant avec IDAS-Ressources, une société belgo-néerlandaise qui a pour raison sociale l’enlèvement des mines antipersonnelles, mais qui est désormais détentrice de concessions diamantifères de la taille de la Suisse dans la zone de la rivière Cuango, en Angola.

Le groupe minier de type nouveau est donc une architecture financière passant par les Bourses nord-américaines, surtout Vancouver et Toronto, qui contracte parfois des alliances avec des conglomérats comme De Beers, et avance aux côtés de nouveaux responsables politiques comme MM. Kabila ou Museveni, à l’aide de mercenaires dotés d’équipements dignes de petites armées modernes. Il y a chez certains de ces acteurs de la mine africaine un peu de la junior company (une société peu capitalisée, qui joue son avenir boursier et technique sur un pari) ; et beaucoup de militarisation de l’activité économique, dans la capture de territoires miniers.

La constellation formée autour des célèbres « Executive Outcomes » (7) incarne le mieux le retour à une politique privée de la canonnière : ses hommes sont intervenus, de l’Angola en 1993 au Sierra Leone en 1997, pour lutter contre les forces rebelles, surtout quand elles menaçaient les richesses minérales. Les hommes de MM. Anthony Buckingham et Eben Barlow, les deux porte-étendard de cette société de prestations paramilitaires, ne cherchent pas à planter le drapeau d’un pays : leur prime de guerre se paie en droits d’exploitation de gisements, confiés à leurs sociétés spécialisées, comme Branch Energy, Branch Mining ou Heritage.

M. Salim Saleh, demi-frère du président Yoweri Museveni, détiendrait des participations dans Branch Mining, qui exploite en partenariat une mine d’or dans le parc national de Kidepo, en Ouganda. Il posséderait aussi 45 % de Saracen Ouganda, qui assure la sécurité des mines d’or et des opérations armées contre les rebelles ougandais. Ainsi se tissent, selon un écheveau serré, des relations entre mines et sécurité, diamant et bauxite, Bourses de Vancouver et intérêts basés à Bangkok ou à Tel Aviv. On y retrouve la plupart des protagonistes de cette nouvelle ruée vers les minerais stratégiques, du Sierra Leone à l’Ouganda, dont certains possèdent également des permis en Afrique sahélienne, au Mali ou au Niger.

En l’absence de nouveaux opérateurs français dans les zones francophones, un des pivots de la présence française dans le domaine minier reste la MIBA, la plus grosse unité industrielle d’extraction de diamants du Congo démocratique, dont le Crédit agricole mutuel se retrouve le principal actionnaire, par prises de contrôle successives de groupes financiers belges et français.

Le Congo démocratique semble, après avoir eu comme « compagnons de lutte » des groupes junior comme ceux de M. Jean-Raymond Boulle, se tourner à nouveau vers les « valeurs sûres » de l’industrie minière. A la fin décembre 1997, M. Laurent-Désiré Kabila a annulé les gigantesques contrats concernant les projets avec l’American Mineral Fields International (AMFI), et Lundin, un magnat suédois intéressé par les dépôts de cuivre et de cobalt de Tenke Fungurume. Pour prendre la suite, la Gécamines va créer un consortium avec Anglo-American, Billiton, Iscor, l’Union minière et la Compagnie chinoise des métaux non ferreux pour le développement de Kolwezi-Ouest, qui renferme les quatre cinquièmes des réserves de cuivre et de cobalt de la Gécamines.

La reconnaissance du poids des grandes forces du secteur minier dans la « nouvelle Afrique » tient à plusieurs facteurs : les junior companies, y compris les paramilitaires, si elles peuvent mieux gérer le risque politique minier africain, sont incapables de supporter le coût financier et le risque technique de gisements immenses et complexes ; la privatisation, qui a été un des éléments par lesquels les pouvoirs africains ont pu ouvrir les vannes de la dérégulation des mines, est de nouveau sous le contrôle plus étroit de la Banque mondiale, qui n’aime pas beaucoup les juniors ; enfin, les intérêts miniers américains sont regardés avec méfiance, tant pour des raisons historiques que financières et politiques.

Mais la marge est étroite, pour des Etats africains désireux que la mise en valeur des ressources minérales - fer des monts Nimba au Liberia ou magnésium au Congo-Brazzaville -, ouvrent de nouvelles perspectives : un développement échappant au pillage et à l’engrenage des guerres civiles pour la conquête des dernières richesses naturelles d’économies dévastées.

Avatar de l’utilisateur
jimfells
Brut léger
Brut léger
Messages : 461
Inscription : 21 juil. 2006, 08:41

Message par jimfells » 05 févr. 2007, 23:03

Notre belle technologie (Prius, iPods, lampes à économies d'énergies, centrales nucléaires... ) repose sur un pillage permanent.

Avant de faire de l'écologie pour Bobo, ne faudrait-il pas sauver l'Homme ?

.

Goupil666
Brut léger
Brut léger
Messages : 460
Inscription : 11 juil. 2006, 18:13

Pic global

Message par Goupil666 » 05 avr. 2007, 10:21

Revue S!lence (Ecologie, Alternatives et Non-violence) no 345 d'avril 2007, page 29, de Michel Bernard.

Après la fin du pétrole

Après une rapide introduction au pic du pétrole, du pic gaz, du pic charbon et du pic uranium ils rajoutent:
Mais c'est oublier un peu vite qu'il ne faut pas que de l'énergie pour produire des objets. Il faut aussi différents matériaux et dans le seul domaine des métaux, la situation est déjà tendue.

L'indium, découvert à la fin du 19e siècle, est un métal utilisé au départ principalement dans les fusibles et les transistors. D'usage plus récent on le trouve dans les écrans plats de télévision ou d'ordinateur, mais également dans les photopiles. Problème: ce métal est particulièrement rare et les stocks connus ne permettront pas d'assurer plus de 13 ans de la consommation actuelle.

Les stocks connus d'argent ne permettent de répondre à la demande actuelle que pour les 28 prochaines années, l'or aux 37, le plomb pour 43, le zinc pour 45, le cuivre 63, le nickel 93, le fer 118 et le platine 184.
Ces chiffres symboliques cachent une réalité économique bien plus dramatique. Le pic de Hubbert, moment donc où la demande dépasse l'offre, arrive forcément bien plus tôt que ces délais.

Avec une croissance de la demande en moyenne de 4.5% au niveau mondial, les prix s'envolent déjà. Certains veulent croire à des phénomènes spéculatifs, à un retard d'adaptation des capacités de production. Mais la réalité est plus dramatique: la nature généreuse n'en peut plus et les limites de son exploitation ont été atteintes.
Ils terminent l'article en parlant des limites du recyclage, limites imposées par la dégradation irréversible des matériaux.

Avatar de l’utilisateur
phylippe
Modérateur
Modérateur
Messages : 813
Inscription : 19 mai 2005, 09:04
Localisation : Belgique, Bruxelles

Message par phylippe » 05 avr. 2007, 10:27

Voilà qui va apporter de l'eau au moulin de Diogene.


*** fusion *** par energy_isere
«Lorsque le dernier arbre aura été abattu, le dernier fleuve pollué, le dernier poisson capturé, vous vous rendrez compte que l'argent ne se mange pas» - Proverbe Cree

th
Condensat
Condensat
Messages : 683
Inscription : 18 sept. 2005, 22:54
Localisation : Toulouse

Re: Pic global

Message par th » 10 avr. 2007, 21:55

L'indium, découvert à la fin du 19e siècle, est un métal utilisé au départ principalement dans les fusibles et les transistors. D'usage plus récent on le trouve dans les écrans plats de télévision ou d'ordinateur, mais également dans les photopiles. Problème: ce métal est particulièrement rare et les stocks connus ne permettront pas d'assurer plus de 13 ans de la consommation actuelle.
On s'était posé la question dans un fil sur le photovoltaique sur la disponibilité de 'Indium. Visiblement il ne faut pas trop compter dessus, pour nos futures cellules en couches minces en CIGS : ( indium, gallium and diselenide ), GIS,

"the greatest shortcoming of the human race is our inability to understand the exponential function"- Bartlett.

Avatar de l’utilisateur
GillesH38
Hydrogène
Hydrogène
Messages : 30055
Inscription : 10 sept. 2005, 17:07
Localisation : Berceau de la Houille Blanche !
Contact :

Message par GillesH38 » 11 avr. 2007, 08:24

encore un pot de confiture qu'on est en train de bouffer allégrement sans se poser la question de savoir si il y a encore des fruits.... :-(
Zan, zendegi, azadi. Il parait que " je propage la haine du Hamas".

Avatar de l’utilisateur
Schlumpf
Modérateur
Modérateur
Messages : 2367
Inscription : 20 nov. 2005, 12:11
Localisation : Wiesbaden

Message par Schlumpf » 22 avr. 2007, 23:19

tant que tu ne fais pas tomber la tartine, c'est l'essentiel...
L'Homo sapiens se conjugue à la première personne du présent irresponsable...

Répondre