Message
par nopasaran » 27 sept. 2005, 19:14
Je reproduit l'article (avant qu'il ne deviennent payant) car il me parait très intéressant :
L'essoufflement de la croissance britannique pèse sur les déficits publics
LE MONDE | 27.09.05
Principal artisan de la bonne santé économique du Royaume-Uni depuis huit ans, le chancelier de l'Echiquier, Gordon Brown, ne fait plus de miracles. A-t-il perdu la baraka, ou, plus gravement, perdu la main ? La réponse est en partie affaire de jugement politique. Mais une chose est sûre : l'économie britannique s'essouffle. Le phénomène n'a pour l'instant rien de dramatique, mais il risque, à terme, de ternir la réputation du probable dauphin de Tony Blair.
Il y a quelques semaines, Gordon Brown prédisait, contre l'avis de la plupart des experts, que la croissance britannique oscillerait en 2005 entre 3 % et 3,5 %. Il y a quelques jours, le chancelier a dû concéder qu'elle ne dépasserait pas 2,5 %, voire, plus probablement, 2 %. Ce chiffre reste nettement meilleur que la croissance moyenne de la zone euro, estimée à 1,2 % par le Fonds monétaire international (FMI).
La contrition n'est pas la première qualité du ministre des finances. Ayant reconnu tardivement son erreur de pronostic, il l'a donc attribuée aussitôt à deux événements extérieurs au royaume : la flambée du cours du brut et la langueur des économies européennes. Le marasme des principaux partenaires de la Grande-Bretagne freine sans doute, à la marge, sa croissance. L'impact de la hausse pétrolière est plus difficile à mesurer.
Le monde, a déclaré M. Brown, affronte un "choc pétrolier aussi fort que dans les années 1970" . L'affirmation, évidemment excessive, lui procure une explication trop commode. D'autant que, grâce au brut de la mer du Nord, le pays est encore autosuffisant en pétrole. Il n'y a pas si longtemps, M. Brown reconnaissait l'effet à peu près neutre des hausses pétrolières sur les finances publiques. Nombre d'experts partagent ce jugement, car le budget bénéficie alors des surcroîts de revenus fiscaux fournis par la TVA sur les carburants et par l'impôt sur les profits des compagnies pétrolières. La hausse du brut, estime-t-on à la City, érode la croissance de 0,6 à 0,7 %. On est loin de la chute annoncée pour cette année (1,5 %).
ATTENTISME
Celle-ci tient surtout à des facteurs domestiques. Primo, la consommation des ménages, principal moteur de la croissance, est très molle, en raison du surendettement des foyers et de la contraction du marché immobilier. La grande distribution pâtit de cet attentisme. Secundo, les entreprises, peu enclines à prendre des risques, ont ralenti leurs investissements.
Tout cela contrarie l'emploi et la productivité. Pour le septième mois d'affilée, le nombre des demandeurs d'emploi a très légèrement augmenté (0,2 % depuis janvier). Cette hausse n'affecte pas le moral de l'opinion car, dans le même temps, le nombre global des gens au travail continue de croître. La productivité britannique, par travailleur ou par heure travaillée, quoique en hausse depuis cinq ans, reste nettement moins bonne que la française.
L'essoufflement de la croissance diminue les rentrées fiscales et met en danger l'équilibre budgétaire. La Commission européenne et le FMI ont mis en garde Londres contre une aggravation du déficit (3,2 % du PIB depuis deux ans). Ce qui est en cause, c'est le maintien par Gordon Brown de la "règle d'or" qu'il s'est fixée : "Emprunter seulement pour investir", notamment dans la santé et l'éducation, et financer les dépenses de fonctionnement par les revenus ordinaires de l'Etat. Gordon Brown pourra-t-il longtemps maintenir cette discipline, sans augmenter les impôts ou réduire les dépenses ? Il en va de la crédibilité d'un homme qui veut succéder à Tony Blair et, une fois premier ministre, maintenir la solidité de l'économie tout en poursuivant la transformation de l'Etat-providence.
Jean-Pierre Langellier