Les importations de brut dépassent les exportations pour la première fois depuis vingt-cinq ans La manne pétrolière touche à sa fin en Grande-Bretagne LE MONDE | 11.11.05 |
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Paradoxalement, le boom de la "capitale" pétrolière britannique coïncide avec la perte progressive, par le Royaume-Uni, de son indépendance énergétique. Selon les chiffres publiés mercredi 9 novembre par l'Office des statistiques nationales (ONS),
Albion a enregistré au troisième trimestre le premier déficit de la balance pétrolière depuis le début des années 1980 ! En volume, les exportations de pétrole brut ont représenté 11,2 millions de tonnes,
en baisse de 24 % par rapport au deuxième trimestre, tandis que les importations ont progressé de 3,3 % à 13,68 millions de tonnes.
Sur la période juillet-septembre, le manque à gagner pétrolier s'est élevé à 683 millions de livres (1 018 millions d'euros), une première sur un trimestre depuis la mise en exploitation du pactole de la mer du Nord. "C'était quelque chose d'attendu.
L'essor de la mer du Nord est derrière nous. Mais le rythme de plus en plus rapide d'épuisement des richesses est une mauvaise nouvelle pour le gouvernement au moment où les prix des hydrocarbures sont élevés et vont le rester", souligne Michael Hughes, économiste en chef de la banque d'affaires Barings Asset Management.
Certes, les réparations pendant l'été et l'incendie d'un champ expliquent en partie les chiffres du troisième trimestre. Reste que provoquée par l'écart grandissant entre le déclin régulier de la production et la progression de la demande, le bond des importations devrait accentuer le "trou" de la balance commerciale. Les gisements de la mer du Nord, vieillissants, sont, en effet, arrivés à maturité. Les réserves pétrolières du Royaume qui atteignaient 15,4 milliards de barils en 1979, sont tombées à 4,5 milliards à la fin de 2004. Le pays produit actuellement autour de 2 millions de barils par jour (mbj) de brut contre 2,9 millions à l'apogée de la production, en 1999.
Au début de cette année, l'Association britannique des opérateurs off shore a estimé que
le Royaume-Uni deviendra importateur net de pétrole en 2009 et de gaz dès cette année. Mais pour bon nombre d'experts, ces prévisions sont trop optimistes. Sur les neuf premiers mois de l'année, le solde reste positif (281 millions de livres) mais il diminue, passant de 5,7 milliards de livres en 2002 à 1,7 milliard en 2004.
Certains n'excluent pas une balance pétrolière négative sur l'ensemble de l'année 2005. Désormais, les groupes pétroliers BP et Royal Dutch Shell préfèrent aller explorer en Russie, dans le golfe de Guinée ou en Asie.
A l'heure du creusement du déficit budgétaire provoqué par la hausse de dépenses publiques, la baisse de la production pétrolière entraîne moins de recettes fiscales. Par ailleurs, répondre à la pression politique en faveur d'un abaissement des coûts du carburant, autre importante source de revenus du Trésor, devient plus ardu. S'ajoute la volonté du gouvernement de relancer l'exploitation dans la zone britannique, ce qui interdit l'alourdissement de la pression fiscale sur les opérateurs proprement dits.
Sa marge de manoeuvre se rétrécit d'autant que l'industrie déjà mal en point en raison de la faiblesse de l'investissement est touchée par l'augmentation de la charge énergétique.