Les salariés de Total interpellés par Greenpeace sur les sables bitumineux
LEMONDE.FR | 26.11.09
Dans le flot d'hommes et de femmes en costume et attaché-case qui se dirigent vers la tour Total à La Défense (Hauts-de-Seine), leurs blouses orange dénotent. Casque sur la tête, pancarte autour de la poitrine, tracts en main, les militants de Greenpeace proposaient, jeudi 26 novembre, un jeu-concours aux salariés du pétrolier. Le but : répondre à un quiz sur les sables bitumineux pour gagner un voyage en Alberta, au Canada.
"Connaissez-vous les sables bitumineux ?", interpelle Greenpeace. Si la majorité des employés, pressés de rejoindre leurs bureaux, ne prennent pas le temps de s'arrêter, certains jouent le jeu. "Oui. Mais pas leur processus d'exploitation", concède Jérémie, géologue chez Total. Il faut dire que le sujet est délicat et que les grands groupes évitent de trop en faire la publicité.
Résidus de pétrole qui ont migré dans les roches superficielles, ils prennent la forme d'un bitume très visqueux et lourd, aggloméré avec du sable ou du schiste. Leur exploitation, très coûteuse, a été rendue possible depuis quelques années par l'augmentation des cours du pétrole. Elle se fait dans des mines à ciel ouvert ou des gisements souterrains, au Canada, Venezuela ou à Madagascar, par des compagnies comme Shell, Statoil ou ConocoPhillips. En France, Total s'est donné pour objectif de produire, à l'horizon 2020, 200 000 barils de ce pétrole par jour, soit 9 % de sa production actuelle. "Il y a un important risque de pollution des sols, de l'air et surtout des nappes phréatiques, explique Ignace Salpeteur, chercheur au Bureau de recherches géologiques et minières. Les compagnies pétrolières doivent prendre des précautions en extrayant ces hydrocarbures, qui contiennent des métaux lourds comme de l'uranium, du nickel ou du cadmium."
CINQ FOIS PLUS DE CO2
Pour Greenpeace, les conséquences sur l'environnement sont bel et bien présentes. "Plus de 3 000 km2 de forêts primaires ont été détruites pour produire ce pétrole, des immenses lacs toxiques ont été formés, des rivières détournées, déplore Sylvain Trottier, l'un des militants de Greenpeace. Cette exploitation requiert des ressources considérables en électricité, eau, carburant.
Au total, de son extraction à sa consommation, ce pétrole émet cinq fois plus de gaz à effet de serre que le pétrole conventionnel."
Alors, une question se pose, contenue dans le quiz : "Quelle est la position officielle de Total pour justifier ces investissements ?" Petite gêne du côté des salariés. "On a besoin de ce pétrole pour faire rouler nos voitures, à défaut de mieux. Mais j'espère que Total va trouver des solutions aux problèmes de pollution", confie Luc, ingénieur en électricité. "Il faut laisser les sites dans l'état dans lequel on les a trouvés. Ce qui impliquerait par exemple de replanter des arbres", ajoute Jérémie. Chez Total, on concède que l'exploitation des sables bitumineux est extrêmement polluante. "Mais aujourd'hui, on a un problème d'énergie car la demande augmente avec les pays en développement. On cherche donc des solutions pour limiter l'impact écologique de l'exploitation de ces gisements", y affirme-t-on.
Le tirage au sort du quiz sera effectué lundi à 15 heures dans les locaux de Greenpeace France. Le gagnant pourra découvrir les conséquences de l'exploitation des sables bitumineux en Alberta. Au programme : le survol des mines et des lacs, des rencontres avec les populations autochtones et une visite des sites d'exploitation.
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