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par Philippe » 28 janv. 2011, 22:28
André,
Je n’ai pas la réponse à la question sur les risques telluriques. Je ne suis pas du tout spécialiste de ces questions. Je n’ai pas pu ouvrir le lien (message « cet article n’est pas disponible »).
J’aurais tendance à penser que la fracturation hydraulique n’est pas une opération assez puissante pour déclencher un tremblement de terre. Il est possible que l’ouverture d’une fracture, à 2 500 mètres de profondeur, soit perceptible en surface. Je ne sais pas s’il y a eu des travaux scientifiques sur le sujet. Ce ne doit pas être difficile à faire (placer quelques capteurs pour enregistrer les éventuels mouvements du sol, suivant un maillage à définir au droit du drain horizontal est une opération simple et peu coûteuse). Je vais voir si la profession travaille là-dessus.
En revanche, l’exploitation des gisements peut, elle, causer des tremblements de terre. On soutire du sous-sol des produits, surtout du gaz, (parce qu’en général le pétrole soutiré est remplacé par de l’eau), dont la pression aidait à supporter le poids de toutes les couches géologiques situées au-dessus. La réorganisation, en sous-sol, des roches privées de leur soutien gazeux sous pression, peut engendrer des tremblements de terre. C’est, par exemple, le cas à Lacq (Pyrénées-Atlantiques). Pour en savoir plus, tapez « séisme » et « Lacq » sur un moteur de recherches. J’ai vu écrit que ces séismes ne pouvaient pas dépasser une magnitude de 3,5 sur l’échelle de Richter, mais j’ignore le crédit qu’il faut apporter à cette affirmation. Le fait de savoir si un puits peut résister à un séisme est une question importante, surtout dans une région comme Lacq, où le gaz brut est extraordinairement meurtrier (15% d’hydrogène sulfuré dans le gaz brut). Les sociétés pétrolières et les services de l’Etat ont dû se pencher ardemment sur la question. Là encore, je n’ai pas d’informations, mais je pense qu’ils ont dû conclure à l’absence de risques.
De façon anecdotique, les pétroliers ont remarqué depuis longtemps que les puits de pétrole produisaient davantage après un tremblement de terre. C’est un phénomène connu, et bien étudié notamment par les Russes. Les scientifiques ont apporté des explications à ce phénomène. Ce sont les mêmes explications que l’on apporte au constat que les puits situés près des voies de chemin de fer produisent davantage que les autres (les vibrations induites par le passage des trains, notamment les basses fréquences de quelques dizaines de hertz, fournissent en sous-sol une énergie qui aide à la redistribution des liquides dans les pores de la roche).
Je suis pétrolier, mais je suis surtout citoyen. Je ne cherche ni à rassurer, ni à inquiéter. Il est normal de se poser toutes ces questions. Leur apporter des réponses exige énormément de temps. Mon message, tiré d’une longue expérience, est que les risques principaux, pour l’environnement, proviennent plutôt des vieux puits (disons datant d’avant les années 1960) que des forages actuels, quel que soit l’objectif géologique de ces derniers. Les puits les plus anciens, en particulier, ceux du XIXème siècle, présentent le maximum de risques : ils étaient peu profonds, et les tubes n’étaient pas cimentés. Heureusement, la nature est généralement bien faite : les argiles traversées en cours de forage finissent généralement, avec le temps, par se refermer sur les tubes, restaurant ainsi une étanchéité douteuse (les argiles, comme le sel, sont des matériaux meubles) ; d’autre part, le soutirage des hydrocarbures fait chuter la pression dans les réservoirs, ce qui contribue à y confiner les hydrocarbures qui restent : leur énergie potentielle est insuffisante pour permettre leur remontée vers la surface. Cela dit, on trouvera toujours des contre-exemples. La flaque de pétrole en forêt de Haguenau (Bas-Rhin), montrée dans un reportage de l’émission 100% MAG sur M6, provient d’un vieux forage de la fin du XIXème siècle, mal bouché, et n’est pas, comme c’était affirmé dans le reportage, un suintement naturel. On se console en se disant qu’elle fait le bonheur des sangliers et de tous ces animaux sauvages heureux de venir s’y déparasiter.