Aujourd'hui, les produits electronique
demain , les voitures,
aprés-demain , les AIRBUS

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Après ses tee-shirts, la Chine vend son acier, ses télés et ses lave-linge
LE MONDE | 06.12.05 | 15h19 SHANGHAÏ CORRESPONDANT
Pour la première fois de son histoire, la Chine est devenue, sur les dix premiers mois de l'année 2005, exportatrice nette de véhicules : d'après l'agence Xinhua, le pays a vendu à l'étranger 135 000 unités jusqu'en octobre, surtout des camions à destination de pays en voie de développement, et n'en a importé que 128 000, en grande partie des voitures de luxe, en provenance du Japon, d'Italie ou d'Allemagne.
Les chiffres du commerce extérieur chinois dans le domaine de l'automobile sont minuscules. Et pour cause : Pékin a choisi de faire fabriquer les quelque 5 millions de véhicules, qui sortent de ses chaînes de montage chaque année, par des constructeurs étrangers, tous présents en Chine dans des sociétés mixtes aux côtés de fabricants chinois.
Mais ils sont révélateurs d'une tendance qui pourrait faire de la Chine, dans un futur pas si lointain, un nouveau Japon : quand on sait que les investissements tous azimuts des marques étrangères en Chine sont en train de créer une capacité de production de 20 millions de véhicules en 2010, pour un marché intérieur qui pourrait ne pas dépasser les 9 millions d'unités (selon un scénario, raisonnable, de 10 % de croissance annuelle des ventes), il y a de quoi s'inquiéter.
Car ce qui ne se passera peut-être pas dans l'automobile avant dix ans est déjà en train d'avoir lieu dans quelques autres secteurs : les excédents commerciaux chinois ont atteint 80 milliards de dollars (67,9 milliards d'euros) pour les dix premiers mois de l'année, contre 32 milliards de dollars en 2004. Les prévisions vont de 90 à 115 milliards de dollars pour l'année 2005.
Or une telle performance du commerce extérieur chinois marque une vraie rupture avec le passé. "Contrairement à une idée communément répandue, le modèle de développement commercial suivi par la Chine depuis le début des années 1980 n'a jamais engendré d'excédents commerciaux massifs", écrit Stéphane Cieniewski, conseiller financier à la Mission économique de Pékin, dans une note récente sur le sujet.
La Chine a dégagé des excédents compris entre 20 et 35 milliards de dollars de 1999 à 2004, en raison d'un mode de développement gourmand en importation (énergie, biens d'équipement), et d'un positionnement à l'exportation de produits à faible valeur ajoutée. Mais ce modèle est en train d'évoluer.
Une analyse plus précise des chiffres révèle que l'explosion des surplus commerciaux chinois cette année est d'abord due à une baisse des importations. Deux facteurs sont à l'oeuvre : d'une part, l'appétit vorace de la Chine en biens d'équipements lourds (matériel de centrales électriques, machines-outils) et en énergie s'est refroidi à la suite de mesures de "contrôle macro-économique" mises en oeuvre par le gouvernement chinois en 2004. La Chine est en quelque sorte au régime sec.
Mais surtout, notent les experts, la politique industrielle de substitution des importations dans la chimie, la sidérurgie, l'électronique ou le textile commence à produire ses effets. Dans les aciers, la Chine est exportatrice nette depuis 2004. C'est ainsi que sa capacité de fabrication pour les aciers inox a quadruplé depuis 2000, pour le plus grand malheur des groupes sidérurgistes mondiaux, dont les exportations vers la Chine sont en baisse constante.
Dans l'électronique, secteur où la "substitution" est la plus avancée, la Chine s'équipe massivement en usines de semi-conducteurs, financées par les groupes taïwanais. Malgré tout, celles-ci conservent encore une ou deux générations de retard par rapport aux Coréens ou aux Japonais.
En revanche, la Chine est, pour les produits électroniques grand public, de plus en plus maîtresse de son propre marché, et de plus en plus présente à l'exportation : c'est le cas de l'électroménager, de la télévision (TCL), des télécommunications (Huawei). Le ralentissement des importations chinoises n'est pas encore compensé par une demande intérieure robuste : malgré son récent boom, la consommation intérieure chinoise reste faible et est de plus en plus satisfaite par la fabrication par les marques étrangères elles-mêmes de leurs produits en Chine.
Géographiquement, les exportations de l'Allemagne et du Japon, gros fournisseurs de biens d'équipement, sont en train de marquer le pas : la croissance à deux chiffres des années passées ne sera pas au rendez-vous en 2005. En revanche, la France est un peu moins touchée : ses exportations devraient se maintenir en 2005 à 15 %.
L'explosion de ses excédents commerciaux n'est pas forcément une bonne nouvelle pour la Chine : les exportations de biens et de marchandises représentent désormais près de 40 % du produit intérieur brut (PIB). Pour la sixième économie mondiale — qui passera cette année devant l'Italie — un ratio aussi élevé constitue une anomalie. Les exportations sont équivalentes à 32 % du PIB en Corée mais à seulement 15 % dans les vieux pays industrialisés. Un tel écart a pour conséquence d'exposer dangereusement la Chine aux évolutions conjoncturelles internationales et aux pressions extérieures.