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Les participants a oleocene seront nombreux a être d'accord , cependant, sur "globeco.fr" on peut lire ce commentaire.Une grave crise alimentaire menace le monde, la croissance mondiale épuise les réserves agricoles
Capital, mars 2006
Propos recueillis par Patrice Piquard
Le principal danger qui nous guette est l'assèchement des ressources naturelles, démontre de manière implacable l'américain Lester Brown. Selon cet expert, qui veut réconcilier écologie et économie, il existe pourtant des solutions.
Capital : Dans votre dernier livre, vous affirmez que la détérioration de l’environnement est si rapide qu’elle pourrait entraîné un effondrement de l'économie mondiale. A quelle échéance ?
Lester Brown : Dans vingt ans tout au plus, si nos comportements ne changent pas. Car aucune économie, aussi sophistiquée soit-elle, ne peut survivre a la destruction de l'écosystème dont elle dépend. Depuis 1950, la population mondiale est passé de 2,5 a 6 milliards d’habitants, et la richesse moyenne d’un terrien a été multiplié par sept. Mais cette croissance phénoménale provoque l'épuisement des ressources naturelles. En 2004, les découvertes de gisements pétroliers, n’ont représente qu’un quart des quantités consommées. Et la disparition des forets, l’expansion des déserts, la diminution des nappes phréatiques, la baisse des stocks de poissons dans les océans s’aggravent chaque année. Nul besoin d'être financier chevronne pour comprendre que nous signons des chèques sans remettre de l’argent sur le compte. Et si nous continuons, nous allons faire faillite. L'histoire compte bien des exemples de civilisations qui ont disparu : les Sumériens, parce que leur système d'irrigation était déficient et avait imbibe de sel les terres cultivables ; les Mayas, du fait de la déforestation et de l'érosion des sols ; les habitants de l'île de Pâques, incapable de fabriquer des canots de pèche après avoir coupe tous les arbres. C’est ce qui nous guette.
Capital : Le décollage de la Chine et de l’Inde aggrave-t-il l'épuisement des ressources naturelles ?
Lester Brown : Oui, au point que le développement de ces deux pays va bientôt se heurter a un mur. La Chine est déjà le pays qui consomme le plus de céréales, de viande, de charbon, d’acier…De nombreux experts prétendent que, si la croissance s’y poursuit au rythme de 8% par an, la consommation moyenne de chaque habitant équivaudra des 2031 a celle d’un Américain aujourd’hui . Or cela est absolument impossible : la planète ne le supporterait pas. Si les Chinois mangeaient autant de viande que les Américains , leurs élevages absorberaient la moitie de la production mondiale de céréales ! Et s’ils avaient trois voitures pour quatre habitants, comme aux États-Unis, leurs besoins en pétrole dépasseraient la production mondiale. A l'évidence, le modelé économique occidental, ne peut fonctionner ni en Chine, ni en Inde.
Capital : Le principal danger qui nous menace, selon vous, n’est pas l'épuisement des ressources pétrolières, mais une grave crise alimentaire. Pour quelles raisons ?
Lester Brown : Parce que la destruction de l’environnement a déjà des conséquences dramatiques sur l’agriculture. Prenez l’eau. Chaque homme en boit en moyenne quatre litres par jour. Mais, pour produire sa ration quotidienne de nourriture, il en faut 2.000 litres. Or le niveau des nappes phréatiques baisse partout. C’est une évolution invisible. Pourtant, elle transforme le Texas, le Kansas, le nord de la Chine et des régions d’Inde en terres sèches, donc incultivables. De plus, l’urbanisation convertit chaque année 3 millions d’hectares en routes, en immeubles, en supermarchés…
Capital : Les rendements agricoles ne progressent-ils pas ?
Lester Brown : Non, ils plafonnent. Résultat : après avoir triple de 1950 a 1996, la production de céréales n’augmente plus. Au cours des six dernières années, elle a été cinq fois inférieure a la consommation. Ce qui veut dire qu’il a fallu puiser dans les stocks, dont le niveau est désormais au plus bas. Comme la population mondiale progresse de 70 millions d’habitants par an, la production par personne a déjà baisse de 10% par rapport a son maximum historique. Bref, dans le domaine alimentaire comme dans celui de l'énergie, nous sortons de l’ère de l’abondance pour entrer dans celle de la rareté.
Capital : Pourtant, contrairement a celui du pétrole, le prix de l’alimentation n’augmente pas…
Lester Brown : Cela ne saurait tarder. Depuis 1998, la production de céréales de la Chine a baisse, de 392 a 322 millions de tonnes. Le pays le plus peuple du monde n’est donc plus auto-suffisant dans le domaine alimentaire, au point d'être devenu en 2003-2004 le premier importateur de blé et de soja. Tôt ou tard, peut-être des cette année, les Chinois auront une mauvaise récolte et devront acquérir 40 ou 60 millions de tonnes de céréales sur le marche mondial. A ce moment-la, les prix bondiront, doubleront peut-être, du jour au lendemain. Conséquences : les pays du tiers monde, qui importent une part importante de leur alimentation, seront déstabilisés par des émeutes de la faim ; les paysans européens pourront enfin vivre sans subventions agricoles ; les États-Unis, qui exportent 40% des céréales vendues sur le marche mondial, redresseront leur balance commerciale. Et, partout dans le monde, l’expression “indépendance alimentaire” deviendra aussi courante que celle "d'indépendance énergétique".
Capital : Pourquoi dites-vous que la hausse des prix du brut menace la production alimentaire ?
Lester Brown : La flambée du prix du baril a deux conséquences. D’abord, elle augmente les coûts de la filière alimentaire. Tracteurs, pompes d’irrigation, usines d’engrais, camions transportant les récoltes, industrie agro-alimentaire…Tous utilisent d'énormes quantités de pétrole et de gaz. Ensuite, et surtout au cours actuel du brut, la fabrication de biocarburants devient rentable, même sans subventions. Une partie de la production agricole (canne a sucre, maïs, betterave, soja, noix de coco, sorgho, blé, huiles de palme, d’arachide et de colza) peut donc servir autant a l’industrie alimentaire qu’a celle des biocarburants.
Autrement dit, les supermarchés rentreront progressivement en concurrence avec les stations-service pour s’approvisionner. Depuis cinq ans, la production d’éthanol et celle de "biodiesel" a déjà triple. Au Brésil, le secteur prive vient d’investir 5 milliards de dollars dans les distilleries d’éthanol , avec l’intention d’exporter en Chine et au Japon. Aux États-Unis, un dixième de la production de céréales (pour l’essentiel du maïs) a été consacre l’an dernier a fabriquer 34 millions de tonnes d’éthanol. En France, la fabrication de biocarburants atteint seulement 400.000 tonnes, mais on souhaite la décupler d’ici a 2015. Ironie de l’histoire : cette évolution, que les écologistes appelaient de leurs vœux, aggrave le risque d’une crise alimentaire dont souffriront en premier lieu les 2 milliards d’humains les plus pauvres. Il sera en effet plus rentable de vendre des biocarburants aux automobilistes que de nourrir des clients démunis. Ajoutons que cette ouverture d’un nouveau marche pour l’agriculture va entraîner les pays du tiers monde qui fabriquent des biocarburants a prix très compétitif (15 centimes d’euro le litre au Brésil) a accélérer la déforestation pour développer leur production.
Capital : Le modèle de croissance actuel nous menant a la catastrophe, pouvons-nous encore en adopter un autre ?
Lester Brown : Oui, a condition de mener d’urgence les changements indispensables pour préserver l'écosystème terrestre. A l’image des pays qui ont transforme leur économie en un temps record, en période de guerre ou pendant le plan Marshall. C’est possible parce que nous disposons déjà des technologies pour construire cette nouvelle économie. Par exemple les voitures a moteur hybrides ou électrique, les éoliennes géantes a fort rendement, les systèmes d’irrigation par goutte-a-goutte, les tubes fluorescents et les appareils ménagers consommant dix fois moins d'électricité. De même, nous savons déjà recycler, le papier, les métaux, les pneus, les composants électroniques. Il reste juste a nous décider.
Capital : A supposer que nous le fassions, quelle serait la feuille de route ?
Lester Brown : D’abord, stabiliser la population a 7 milliards d’individus, au lieu des 9 milliards prévus par l’ONU en 2050. Cela ralentirait la destruction de l’environnement et faciliterait l'élimination de la grande pauvreté. La Thaïlande et l'Iran, qui ont réduit très fortement leur croissance démographique, sont les exemples a suivre. Ensuite, restaurer les ressources de la planète, en créant des réserves océanographiques interdites de pèche, en mettant en œuvre un programme mondial de reforestation et de contrôle de l'érosion, et en économisant l’eau dans les cultures irriguées. D'après mes calculs, il faudrait y consacrer 62 milliards de dollars par an, mais il est difficile d’imaginer un investissement plus rentable. Enfin, utiliser moins de matières premières et d'énergies polluantes. Il s’agit d’une part de concevoir tous les produits durables de sorte qu’on puisse recycler tous leurs composants : et d’autre part de promouvoir les énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermique…), en rétablissant la vérité des prix. Si on incluait le coût des maladies dues a la pollution de l’air, celui de la destruction des forets par les pluies acides et celui des catastrophes climatiques dues au réchauffement de la planète, le prix de l’essence devrait, selon certaines études, quintupler aux États-Unis.
Capital : Les individus peuvent-ils contribuer a la réussite du programme ?
Lester Brown : Bien sur. Il ne tient qu’a eux de supprimer les produits jetables – des mouchoirs en papier aux emballages de boisson en aluminium en passant par les sacs plastique – de pratiquer le tri sélectif des déchets, d’utiliser le vélo en ville et d’acheter des voitures, des appareils électroménagers et des éclairages qui consomment peu d'énergie.
Capital : Croyez-vous a l'avènement de cette économie durable d’ici vingt ans ?
Lester Brown : Les choses évoluent vite, et les médias peuvent les accélérer, en aidant l’opinion a comprendre le potentiel de "l’eco-économie". Mais je crains qu’il faille une catastrophe ecologique majeure pour que le tournant soit vraiment pris.
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globeco.frVoici Lester Brown, fondateur du « World Watch Institute » qui publie tous les ans « L’état de la planète », ouvrage traduit dans des dizaines de pays et qui s’est vendu au cours des dernières années à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires ; les thèses sont les mêmes que celles de Paul Ehrlich : Lester Brown prévoyait aussi une très grave pénurie de produits alimentaires avant la fin du 20ème siècle, avec des famines dans les pays occidentaux ; aucun expert digne de ce nom ne prend aujourd’hui ses prévisions au sérieux, mais cela n’empêche pas le World Watch Institute de plastronner dans les médias ; il est vrai que Lester Brown est un ami personnel de Ted Turner, ancien patron de CNN, et de la femme de ce dernier, Jane Fonda, grande écologiste devant l’éternel ! On dit même que Lester Brown aurait exercé une grande influence sur Al Gore, qui, il est vrai, n’est pas à une ânerie près lorsqu’il parle d’environnement !
Qui croire ?
Phyvette