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par Nico_ » 29 juil. 2006, 16:03
Pour faire court, l'industrie pétrolière est une industrie à cycle très long, de 10 à 20 ans, presque celle qui a les cycles les plus longs. Seul le nucléaire a des cycles plus long en fait.
Un cycle industriel est le temps entre le moment où un dirigeant décide d'un investissement, ici souvent plusieurs milliards de dollars, et le moment où l'installation résultante fermera, faute d'être économique opérationnellement.
Chez nous, cela prend typiquement 15 à 20 ans pour les grands projets.
On distingue notamment les coûts d'investissement, massifs, comme pour construire une raffinerie, un pipeline une plateforme des coûts d'opérations (payer le rig de forage au jour le jour, le bâteau de soutien, les vols d'hélicoptères, etc...).
Pour lancer un investissement donc, il faut s'assurer que l'on va faire une plus-value sur cettte investissement et à terme d'une dizaine d'année.
Prennons un exemple :
Vous savez peut-être que Gazprom est en train de choisir ses partenaires pour le lancement de la phase I de dévelopment du champ à gaz Shtokman, situé à 650 km au nord de Mourmansk en mer de Barents, en zone Russe.
Gazprom possède la licence d'exploitation (elle a le monopole pour le gaz en Russie).
Ensuite, elle va choisir des partenaires ( 5 ont été préselectionnés : Total Norsk Hydro, Statoil, Chervron Texaco, ConocoPhillips) qui vont prendre une part dans le champ. Gazprom restera à 51% et la somme des deux ou trois partenaires finaux sera de 49%. Par exemple, ca pourrait être Norsk Hydro 15%, Statoil 10%, Total 5%, Chevron 8% et ConocoPhillips 11%.
Ainsi chaque compagnie fournit sa part dans l'investissement initial. Ici, pour la phase I plus de 10 milliards de dollars, à mon avis, le montant final sera quelque chose comme 20 milliards de dollars.
Cette somme est soit empruntée sur le marché à des banques ou à des fonds d'investissements (Londres, New York) jusqu'à 70% et les 30% restants sont financés par augmentation de capital, en emttettant des actions ( ce que Gazprom ne peut pas faire, par exemple, n'étant pas côtée, elle ne peut que financer par de la dette).
On appelle ca un financement 30% equity, 70% debt.
Cette somme n'est pas forcémet réunie en cash à un moment T comme pour un prêt personnel mais les versement vont s'échelonner dans le temps, selon les besoin de dépenses du projet.
Au court de la phase de montage du projet (ici 7 à 8 ans) on mets en place les infrstructures : plateforme offshore, construction des rigs de forage, des bateaux de soutiens, des aéroports et héliports, des ports et bases logistique. On met aussi en place les infrastructures des principaux sous-traitant (Halliburton, Schlumberger, ...).
On installe aussi les pipelines de transport, l'usine de liquéfaction du Gaz. On passe commande des Tanker de Gaz liquifiés auprès de constructeurs, etc...
Tout cela est construit partout dans le monde par une multitutde de sous-traitants et de constructeurs. Ils ne peuvent le faire qu'à condition que leur plan de charge ne soit pas saturé (ie que d'autres clients n'aient pas passé commande avant vous et saturent ainsi les outils de productions, cela vous contraindraient à investir dans un outil de production, un bassin de production de bâteau par exemple et avoir des surcoûts importants).
Il fat aussi s'assurer qu'on aura un marché pour écouler la production escomptée qui est évalué par les ingénieurs réservoir et process. Ici, le gaz sera vendu principalement sur le marché américain avec des contrats de fourniture à long terme et le reste ser vendu partout dans le monde sur le marché "Spot" (celui dont les prix font la couverture des journaux mais qui est en fait marginal).
ConocoPhillips et Chevron peuvent ici assurer l'ouverture du marché américain grâce à leur réseau de distribution (réseau de pipeline et usine de regaséification sur les côtes du golfe du Mexique).
Pour se lancer dans un investissement il faut s'assurer principalement qu'il y aura un marché solvable : un réseau de distribution, que la production ne soit pas saturé par le reste du marché, ce qui provoquerait une chute des prix et donc un projet non rentable à l'arrivée avec parfois faillite de la compagnie à suivre.
Par exemple en 1986, il y a une chute énorme des cours du brut spot due au fait que la production mondiale était en surcapacité de 10 millions de barrils par jour. Il n'était donc plus intéressant d'investir dans ce contexte. Aujourd'hui, c'est le contraire, on a une grosse demande et il redevient très intéressant d'investir, au risque de saturer de nouveau le marché dans 15 ans... ce qui dépend de la production certe (et ici, Cochet a raison de mentionner la "déplétion", la baisse de la production des vieux champs aujourd'hui en production) mais cela dépend aussi de la demande qui peut chuter plus vite que la production.
Si des pays émergeants faisaient rigoureusement faillite à cause de prix du pétrole trop élevé pendant deux trois ans (disons autour de 200 dollars...), quelle demande de consommation peut-on escompter d'eux dans 15 ans ?
Si on fait le mauvais pari, on perd à l'arrivée...
Voilà pourquoi on se lance moins vite dans un investissement pétrolier que pour acheter un hamburger chez McDo.
1 ) Apprenez l'anglais
2 ) Lisez "The Prize" de Daniel Yergin
3 ) Lisez "Twilight in the Desert" de Matthew Simmons
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