De l' imagination pour dans 50 ans.
Le futur est impensable (« non-pensable »).
par Turgot 18.11.08
Gamin, je suis un jour tombé sur une vieille revue, datant des années 1920, dans laquelle un article illustré « imaginait » l’an 2000. L’an 2000, pour ces braves gens, c’était un ciel rempli de gros biplans à hélices ou de très gros dirigeables, et des trains à vapeur très rapides, qui roulaient facilement à 150 km/heure.
En fait, notre capacité à imaginer, à penser l’avenir, se réduit péniblement à une prolongation de tendances et de techniques actuelles. Par définition, nous sommes incapables d’imaginer les ruptures que l’avenir nous réserve, celles qui changent effectivement la face du monde dans lequel nous vivons. Dans le film de Kubrick, 2001 : l’odyssée de l’espace, qui date de 1966, l’écran d’ordinateur du vaisseau spatial est du type de ceux qu’on trouvait dans les années 60 (lettres vertes sur fond noir). L’idée même d’un écran plat, en couleurs, n’avait pas effleuré le réalisateur ou son décorateur.
En réalité, il suffit de remonter en arrière de « seulement » vingt ans pour réaliser cette impuissance à imaginer l’avenir.
Il y a vingt ans, le téléphone « portable », c’était une valise, assez lourde. A la limite, on pouvait imaginer une valise moins lourde ; mais on n’imaginait certainement pas ces mini-téléphones à écran tactile sur lesquels on peut recevoir la télévision, et qui filment, et qui font le café.
Il y a vingt ans, nul ne prévoyait les progrès foudroyants d’internet. Lorsqu’on voulait acheter un livre, faire un virement bancaire, consulter un document en bibliothèque, il fallait mettre ses souliers, braver les intempéries, et ne pas hésiter à faire la queue. Aujourd’hui, quelques clics, chez soi, et le tour est joué… Depuis le fin-fond de l’Ardèche, vous avez accès à la Bibliothèque du Congrès américain.
Il y a vingt ans, pour trouver son chemin dans une ville, il fallait avoir le bon plan sur les genoux et ne pas hésiter à tourner en rond. Quiconque vous aurait dit, à cette époque, qu’une machine grande comme la main vous guiderait – par des « à 200 mètres, prenez la prochaine à droite » prononcés d’une voix douce - aurait été traité de fou furieux.
Il faut l’admettre : nous sommes dans l’incapacité de prévoir ce que sera la technique dans 15-20 ans : on peut tout au plus prévoir des téléphones portables encore plus petits (greffés dans l’oreille ?), des ordinateurs encore plus puissants et légers, des voitures encore moins gourmandes en énergie ; mais nous sommes incapables de prévoir les vraies nouveautés qui marqueront alors notre existence. A fortiori, ce que sera le monde dans 60 ans échappe totalement à notre imagination.
Au lieu de céder à la panique, en extrapolant paresseusement des tendances d’aujourd’hui, rêvons un instant.
Nous sommes en 2060.
Les déplacements pour le travail ou les études, c’est terminé. Les progrès des communications sont tels qu’on travaille chez soi, tout en étant en contact permanent avec les « collègues » ; on étudie à distance, dans de grands rassemblements virtuels de cerveaux, et il n’y a plus de barrière de la langue puisque la traduction instantanée fait que tout le monde se comprend. Nous pensons avec horreur aux hordes qui, au début du XXIème siècle, prenaient le matin et le soir le train, le métro, le RER ou l’avion.
Les villes, du reste, se sont dégonflées, puisqu’il n’y a plus besoin de proximité physique des individus qui travaillent ensemble. On vit, à la campagne, ou au Burkina Faso, ou en Patagonie, tout en « travaillant » à Paris, Londres ou New York. Les économies d’énergie, de ce seul fait, sont considérables, puisqu’on ne se déplace pratiquement plus.
L’énergie, d’ailleurs, on en a à ne plus savoir qu’en faire. D’abord, on a domestiqué la fusion nucléaire, qui fournit de l’électricité à profusion. Mais en fait, les progrès des cellules photovoltaïques de 6ème génération ont été tellement rapides que chacun, avec un panneau de petite dimension, fabrique toute l’énergie dont il a besoin pour sa maison ou sa voiture électrique. On pompe encore un peu de pétrole, pour les besoins de la chimie, mais les immenses réserves qu’on a découvertes au fond des océans sont désormais laissées à l’abandon, car personne n’utilise plus les énergies fossiles.
La nourriture ? Les progrès des OGM ont été tels qu’on cultive dans les déserts, dans les steppes glacées de Sibérie. Les surfaces cultivées ont été multipliées par 10, la production par 30. L’eau ? On a fait de telles découvertes dans les procédés de désalinisation de l’eau de mer qu’on ne sait plus quoi faire de toute l’eau potable produite. Des fleuves irriguent ce qui était autrefois des déserts, qu’on a transformés en forêts. On a recréé des espèces animales autrefois disparues ; on a repeuplé les océans, et la prolifération des thons rouges devient un problème.
Et puis, il y a des progrès que je préfère taire, car vous ne me croiriez pas. Surtout, ça dépasse votre capacité d’imagination.
Si on ne s’ennuyait pas autant, tout irait pour le mieux…
ce n' est pas le scénario auquel je crois .....