Je plussoie tout a fait ce point. C'est un point auquel je reflechissais ces derniers jours.
Pour moi, la democratie repose essentiellement sur le fait que les differents points de vue aient un juste echo dans l'espace public. Savoir qui prend la decision, qui est elu, me semble a la reflexion moins important que la capacite' de diffuser les opinions diverses et a` les discuter de facon equitable.
Je prends un exemple concret a petite echelle. J'ai un collegue qui developpe l'idee qu'ici au boulot, on ne doit pas voter les differentes decisions pour arbitrer les desaccords. On doit discuter entre nous jusqu'a avoir une convergence sur les decisions, puis voter une proposition assez consensuelle adoptee a une grosse majorite'. Parfois, on arrive a l'unanimite' et on ne vote pas du tout. Assez paradoxalement, cette idee marche tres bien, l'ambiance est vraiment tres bonne. On a donc plutot reduit le poids du vote pour augmenter le sentiment d'inclusion des enseignants-chercheurs qui travaillent ici.
A grande echelle, je crois que les mecanismes psychologiques sont les memes. Si une majorite' de pouvoir organise un debat impartial sur un sujet, ou chacun a la parole, ou les differentes opinions sont entendues, et ou un arbitrage est rendu, qui fait la synthese entre ce qui est entendu dans les debats et ce qui etait dans un programme politique clairement affiche', alors le sentiment d'appartenance et de participation de la population sera bon, quel que soit le systeme de vote ( direct, indirect, frequent ou rare...). Le cas oppose' est le cas la resonnance dans l'espace public et mediatique est grossierement different de ce qu'on entend dans la rue, ou les cas ou les arbitrages finaux sont differents de ce qui a ete' exprime' dans les debats ou par le vote.
Si on regarde la montee du sentiment pour certains francais d'avoir quitte' la democratie, je crois que 2005 a ete' un tournant. Il correspond a la situation catastrophique de paragraphe precedent : desequilibre du debat mediatique ou une propagande importante a eu lieu et quasi-seulement des points de vue pro-europe se sont exprime's. Puis vote qui montre que les gens ne veulent pas de l'orientation proposee, malgre l'intensite' de la propagande. Puis finalement, non prise en compte du souhait des citoyens puisque le meme texte peu ou prou a ete' adopte' peu apres.
Et depuis il y a eu d'autres situations ou ce scenario s'est produit. Les francais votent a gauche, Valls prend une enorme banane aux primaires, et Hollande choisit Valls et Macron aux postes cle's.
Mon sentiment est que ce n'est pas le systeme de vote ou la constitution qui donne un sentiment d'appartenance ou de rejet du systeme. C'est la pratique des institutions qui compte bien davantage qu'un systeme formel. Cette pratique est une construction historique, il y a une grosse inertie. Une pratique ploutocratique s'apparente a un pays corrompu. C'est tres difficile de revenir en arriere. C'est finalement assez independant des systemes. Par exemple, les Danois ont un systeme medical tres centralise', qui permet a priori bien davantage de corruption que d'autres systemes. Pourtant le danemark a ete' bien plus rapide que la moyenne des pays a adapter sa politique vaccinale aux informations negatives qui sont arrivees progressivement, ce qui montre qu'il est mieux protege' que la moyenne du poids des lobbies. A l'inverse, la france, autre pays a la centralisation importante, est le dernier pays a discriminer les soignants en absence de toute raison objective. On voit que les pratiques sont tres differentes dans deux structures toutes deux centralisees.
Ca ne dit bien sur pas qu'il ne faut pas reflechir aux institutions. Il y a des propositions d'amelioration interessantes. Mais ca veut dire qu'il ne faut pas attendre le graal. Dans tout systeme, il y aura une pratique, et des forces antidemocratiques qui chercheront a desequilibrer les echos mediatiques du sentiment populaire, ou a mettre des copains aux postes cles' pour que les textes votes' soient une traduction fausse'e de cet echo.