Externalité climatique de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes : un coût exorbitant?
Les opposants au projet de l'aéroport mettent en avant comme critique, entre autre, la contribution au réchauffement climatique du projet de construction d'un aéroport près de Nantes, l'incohérence avec les engagements de la France pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre (facteur 4 d'ici 2050). Les partisans du projet mettent en avant l'intérêt économique et restent généralement discret sur le climat.
Cependant, ces deux approches ne sont pas forcément incompatibles, et les partisans de l'aéroport auraient peut-être tort d'esquiver la question, pourvu d'apporter des chiffres solides pour montrer l'intérêt du projet, y compris en tenant compte des externalités climatiques.
Comment faire? Nous allons procéder à divers calculs.
D'abord, estimons les émissions de GES du projet
de Notre-Dames-des-Landes, ou plus précisément, du trafic aérien de la région nantaise dont ce projet doit pérenniser l'existence, susciter et accompagner la croissance.
A partir des données pages 6-7 du document
http://virageenergieclimatpdl.org/sites ... 3_1012.pdf
on peut évaluer les émissions de GES à 3 500 000 teCO2 environ les émissions de GES liés au projet
La contribution de l'aéroport est à mettre en rapport avec les émissions globales de GES sur terre. Elles sont de l'ordre de 2000 tonnes depuis le début de l'ère industrielle, et suivant les tendances actuelles elles seraient de l'ordre de 800 milliards supplémentaires d'ici 2030. Le CO2 représente la moitié du forçage radiatif des gaz à effet de serre, on peut dire que le total sera d'environ 5 600 000 millions de TeCO2
La contribution des aéroports nantais sera donc d'environ 3 500/5600 000 , soit 1 sur 1600, des émissions globales d'ici 2030 si on veut bien continuer le scénario "buiseness as usal". Nous retiendrons de 1/1600ème dans la part de responsabilité imputable à l'aéroport.
Combien rapporte le projet?
Son utilité sociale et économique est indéniable. Suivant l'extrait de l'enquête publique, p.32 de ce pdf :
http://www.loire-atlantique.equipement- ... artie2.pdf
suivant le scénario moyen le bénéfice attendu est de 911 millions d'euros jusqu'en 2042, notamment grâce au temps économisé par les habitants de la région. Prenons approximativement et pour arrondir, la valeur de 500 millions d'euro d'ici 2030.
Combien de victimes du réchauffement climatique? Est-ce si important?
Rares ont été les tentatives de mettre à jour précisément les conséquences du changement climatique sur la biosphère et les être humain qui en tirent leur subsistance. Le GIEC s'arrête avant. Cependant, plusieurs médias ont relayé il y a quelques mois cette information : "d'ici 2030 plus de 100 millions de personnes en mourront prématurément ", d'après une étude menées sur ce sujet tabou. Le tableau se précise suffisamment pour pouvoir donner des valeurs relativement précis, obtenir une répartition par région, sur ce sujet...
Pour plus d'information, voir par exemple
http://www.latribune.fr/actualites/econ ... -2030.html
Ce seul chiffre à cette date nous conduit à limiter toutes nos évaluations à 2030, comme on le voit dans cet article. Rien n'est dit pour la suite des évènements, cependant il est bien que le nombre de victimes annuelles après 2030 de la déstabilisation du climat soit encore supérieure suivant le scénario tendanciel.
Quelle est la valeur de la vie humaine?
Cette question pourrait paraître saugrenue. La posture philosophique classique consiste à refuser à donner une telle valeur, en la considérant infinie. Cependant, une valeur peut être déduite des investissement pour la sécurité dans les transport. Par pragmatisme, le coût de la personne ne peut pas être considérée infinie car il devrait alors impliquer des investissements infinis pour la sécurité.
Ainsi suivant
http://www.economie-environnement.alsac ... cle31.html (s'inspirant notamment du rapport Boiteux)
"Un consensus semble se dégager pour estimer la valeur statistique de la vie à environ 120 fois le PIB par habitant, soit entre 1 et 3 millions d’euros (2,45 pour le France)."
Qu'on se rassure! Cette valeur relativement élevée ne concerne pas les victimes du réchauffement climatique, essentiellement situées dans les pays pauvre : Inde, Bangladesh, Viet-Nam...On pourra considérer pour ces victimes que le PIB annuel par habitant est de l'ordre de 1000 euros.
Conclusions
Ainsi : si 1/1600 des cent millions de morts du réchauffement climatique ont une valeur moyenne de 120*1000 euros, on obtient une externalité climatique pour l'aéroport de l'ordre de
7,5 milliards d'euros pour son fonctionnement d'ici 2030.
On remarque donc que cette valeur est quinze fois plus élevée que le bénéfice socio-économique attendu pour la région nantaise.
Cependant, l'extrême dilution des responsabilités dans cette problématique environnementale mondiale permet à chaque acteur de se décharger entièrement des siennes, que ce soit individuellement ou collectivement. Ainsi le calcul ci-dessus sera vu comme ce qu'il est : une abstraction insensée qui ne saurait être motif d'action.
Par ailleurs, eu égard au refus net par les pays industrialisés d'aider les principaux pays victimes du changement climatique (respectivement proportionnellement à leur contribution aux émissions de GES/à leurs impacts socioéconomiques) , refus bien confirmé lors de la récente conférence de Doha, on peut raisonnablement espérer que cette externalité économique en restera une ( en ce sens que cela restera un coût
externe, lointain, pour d'autres), et donc peut être négligée.